mercredi 5 novembre 2014

Joyland (Stephen King - Albin Michel - Mai 2014)



Le Roi de l'Horreur n'en finit plus d'écrire sur ses vieux jours et le moins que l'on puisse dire c'est que son nouveau style lui va admirablement bien, ainsi qu'à son lectorat (moi) ! Voici son dernier-né en date, Joyland, paru chez Albin Michel en Mai dernier pour notre plus grand bonheur.

L'histoire se passe durant l'été 1973, dans un petit parc d'attractions aux allures de fête foraine. Nous suivrons le jeune Devin Jones, 21 ans, tandis qu'il obtient un petit boulot pour l'été et se faire un peu d'argent en vue de reprendre ses études à la rentrée prochaine, comme bon nombre d'étudiants dans son cas. Engagé comme travailleur saisonnier, comme ''bleu'', à Joyland, Devin va apprendre à se familiariser avec le milieu forain : sa vie, son atmosphère, son langage, ses codes, sa philosophie si particulière et si riche. Durant cet été de dur labeur, il connaîtra le chagrin, la perte du grand amour, le doute, la dépression, de nouvelles amitiés, l'ambition, la reconnaissance, le sentiment d'avoir trouvé une nouvelle famille, l'amour à nouveau peut-être... mais aussi la peur, bien entendu. Car Joyland a un secret, voyez-vous. Au sein de sa Maison Hantée, se trouve un fantôme qui n'est pas artificiel. Une jeune fille assassinée voici quelques années de cela, dont le corps fut laissé à l'abandon dans l'attraction et dont le meurtrier serait toujours en liberté, anonyme. Devin va entreprendre de lever le voile sur ce mystère et de faire partie des rares personnes à avoir vu ce fantôme de ses propres yeux. Pour lui, c'est bien plus qu'une simple histoire, une légende que se racontent les forains et les locaux pour effrayer les bleus et les touristes. Pour lui, c'est une seconde chance, l'occasion de faire enfin quelque chose de sa vie, de se prouver sa valeur. De rendre justice. Mais, en compagnie de ses camarades saisonniers, Devin va aussi se rendre compte petit à petit que le plus grand danger, à Joyland, n'est pas forcément de rencontrer les morts... et que la confiance est une chose rare.

Comme j'avais déjà pu l'observer dans ses dernières œuvres, Stephen King semble résolument se tourner vers une dimension plus humaine de ses récits, où la place du surnaturel est de plus en plus réduite, jusqu'à n'être plus ici qu'un simple prétexte à l'enquête du personnage principal et surtout à son évolution durant cet été fondamental de sa vie, celui où il passera à l'âge d'homme et où il connaîtra différentes expériences qui le forgeront et feront de lui un être plus sûr de lui et plus solide. Il y a tout de même toujours certains éléments typiquement ''Kingesques'', même à cette période très éclairée et contemplative de sa vie, comme par exemple cette prescience de certains personnages, souvent de très jeunes ou d'assez vieux. Énigmes du destin, messages de l'au-delà ; quelques éléments surnaturels qui ne sont ici que soutiens discrets d'une histoire très humaine, très réelle. Celle d'un jeune homme qui apprend à grandir avec les souffrances de son âge, à accepter le changement et les pertes, la découverte, l'évolution, et à trouver son utilité dans ce monde. A l'image du roman lui-même, l'histoire est somme toute assez courte et simple à suivre, et ce n'est en rien une déception. Cela correspond simplement aux nouvelles préoccupations de Stephen King, l'envie de sortir de ce carcan de l'horreur dans lequel il s'est enfermé depuis le début de sa carrière pour, à l'âge de retraite, parvenir enfin à traiter des sujets bien humains et concrets, à délivrer des messages sincères et d'une portée bienveillante, avec toujours ce zeste de critique un brin cynique (mais plus aussi désabusée) de la société et de ses travers. Un King sur ses vieux jours, désireux d'explorer de nouvelles pistes et, comme l'on pouvait le noter dès la lecture de Docteur Sleep, de simplement porter son regard et celui de ses lecteurs sur des sujets moins horribles, moins surnaturels et irréels qu'à son habitude, et nous offrir plutôt une sorte de réflexion sur nos propres expériences, passées et à venir. Certains cracheront un peu dans la soupe en faisant remarquer qu'il s'agit de plus en plus de romans assez courts et très faciles à lire (police plus grosse, pages avec davantage d'espace, etc.), mais je leur ferai remarquer quant à moi que le Vieil Homme a une carrière très bien remplie derrière lui, et qu'à son âge et à son niveau il peut se permettre de se lâcher un peu la bride et de faire partager ce qui lui plaît. Pour ma part j'apprécie tout autant de pouvoir lire ce genre de format que ceux de ses premiers gros romans, type Ça, où tout était assez petit et serré pour un volume très imposant. Le rapport d'adaptation depuis qu'Albin Michel édite Stephen King (2009-2010 il me semble mais je peux me tromper) est très satisfaisant. Et surtout, fidèle à l'esprit de chaque roman, Joyland en étant le dernier et meilleur exemple en date.

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

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