samedi 8 novembre 2014

Soleil Vert (Richard Fleischer - MGM - 1973)



Alors là, attention, on va parler d'un film dont je ne me suis toujours pas remis du visionnage, il y a trois semaines de cela, tandis que vous profitiez béatement de mes articles sur les vampires. Soleil Vert (Soylent Green), de Richard Fleischer, est l'adaptation cinématographique sortie en 1973 d'un roman de science-fiction/anticipation de Harry Harrison intitulé Make Room ! Make Room ! paru en 1966. Carrément dans les critères de Radiophogeek donc, et si je décide de vous parler de ce vieux film c'est avant tout parce qu'il m'a plu et qu'il porte énormément de réflexions qui sont encore, par anticipation, d'actualité de nos jours mine de rien, si ce n'est encore plus réalistes qu'à l'époque (un peu comme la faillite officielle de Detroit en 1987 dans RoboCop qui est devenue il y a quelques mois de cela une triste réalité).

En 2022, la population humaine a augmenté de façon drastiquement exponentielle, si bien que les ressources naturelles de la planète sont devenues des raretés s'arrachant à prix d'or et parfois de vie : la viande, les vrais fruits et légumes, le lait, les œufs... tout cela n'existe pour ainsi dire plus que dans les castes les plus aisées de la société, et encore en tant que produits de luxe. A New York, où l'on compte désormais près de 44 millions d'habitants dont 20 millions de chômeurs dans le dénuement le plus complet, le gouvernement n'a pas d'autre choix que d'organiser de grandes distributions publiques de nourriture aux foules affamées qui sont prêtes à déclencher une véritable émeute sanglante au moindre manque. La société Soylent commercialise et distribue des plaquettes de nourriture artificielle de substitution, baptisées Soleil Rouge et Soleil Jaune, sortes d'agglomérats de plancton et autres organismes primaires qui forment donc depuis des dizaines d'années la seule et unique nourriture connue des basses castes, au grand désespoir des rares anciens qui se souviennent encore vaguement du goût et de l'aspect de la vraie nourriture d'autrefois. Alors que sort un nouveau produit alimentaire baptisé Soleil Vert, l'un des dirigeants de la société Soylent est retrouvé assassiné chez lui dans sa résidence de luxe des quartiers riches de la ville, apparemment sans le moindre signe d'effraction ou de vol. Le policier Thorn va alors se charger de l'enquête, dans un premier temps par pur intérêt personnel afin de pouvoir prélever sur les lieux du crime tout ce dont il aurait envie et ainsi alimenter son petit réseau d'informateurs, mais bien vite il va commencer à s'intéresser de plus près à cette affaire qui dissimule une étrange conspiration du silence, où plusieurs grands noms se retrouvent mêlés et où l'avenir de l'humanité se joue peut-être. Est-ce un règlement de comptes ? Une vendetta ? Une menace ou un chantage sur Soylent et ses partenaires au sein du gouvernement ? Ou bien... une punition divine ? Thorn devra prendre toutes les précautions durant son enquête, car une fois cette vérité trop bien gardée enfin dévoilée, le monde pourrait bien basculer dans la folie la plus totale...

Je ne vous en dis volontairement pas davantage, je pense même en avoir déjà un peu trop révélé sans le savoir. Toujours est-il que la réflexion de ce film, et du roman qu'il adapte, est assez cynique et déshumanisée finalement, ce qui avait pour but de profondément choquer les penseurs de l'époque et de faire réfléchir aux conséquences possibles de l’appauvrissement de la planète et de ses ressources pour une humanité toujours plus nombreuse et exigeante. D'autres thèmes sont aussi traités, tels que l'esclavagisme moderne (au travers des femmes considérées comme du simple mobilier dans les appartements coûteux des riches et des profiteurs, destinées à convenir ou non à chaque nouveau locataire et à satisfaire ses moindres exigences), la crainte du peuple par ses élites dirigeantes, la vision de ce peuple comme une masse informe et terrible, grondante, qu'il faut considérer comme un animal sans libre-arbitre pour le priver de ce dernier et le manipuler. La mort assistée est aussi au nombre des thèmes abordés, de même que le suicide pur et simple, au début et à la fin du film et de différentes manières. Un bel hommage a d'ailleurs été rendu à ce film par Les Simpsons lorsque Grand-Père Simpson, humilié, décide de mourir et se rend alors dans un centre d'accompagnement spécialisé.
Soleil Vert, c'est un film qui fait réfléchir sur bien des choses, mais principalement sur les dangereuses dérives d'une société déshumanisée et au bord du gouffre, où tous les moyens sont bons pour subsister et se maintenir dans son rang. Et qui, par le fait, reste encore très vrai même de nos jours, malgré le petit côté arriéré des technologies que l'on imaginait à l'époque pour 2022. Ça pourrait limite être la petite touche d'humour involontaire et bienvenue du film si on le regarde aujourd'hui, pour permettre de détendre un peu l'atmosphère qui ne manquera pas de grandement s'alourdir devant cet ensemble de plans-chocs, d'idées-chocs et de propos-chocs. Et de toute façon ça ne fera aucun mal à votre culture, bien au contraire !

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne séance, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

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