samedi 4 décembre 2021

Doomsday Clock (Urban Comics - Octobre 2020)


Plusieurs années après avoir sauvé le monde d'un holocauste nucléaire grâce à un plan tordu de sa conception, Adrian Veidt est de nouveau sous le feu des projecteurs. Recherché par toutes les puissances de la planète, il est acculé et publiquement accusé d'avoir provoqué des millions de morts lors de la fausse incursion de New York en 1985. Mais alors qu'il est sur le point d'être arrêté, celui qui s'est nommé Ozymandias opère un nouveau plan désespéré : retrouver la trace du Docteur Manhattan dans l'univers où celui-ci s'est réfugié, laissant derrière lui un monde à l'agonie.


2017, au sein de l'univers que nous connaissons le mieux. Ozymandias et ses émissaires sont arrivés dans une réalité qu'ils ne connaissent pas, mais où tout semble indiquer que le Docteur Manhattan s'y trouve également. C'est une réalité remplie de héros et de vilains bariolés, de super-pouvoirs et de créatures étranges aux capacités hors du commun, un univers de merveilles et de mystères. Là, Ozymandias en est persuadé, Manhattan a trouvé refuge et se dissimule quelque part, présidant à la destinée de toute une dimension. Maintenant, le plus dur reste à faire : le trouver, et le convaincre de revenir avec lui dans leur propre univers afin de sauver la situation une fois de plus avant qu'il ne soit définitivement trop tard.


Après avoir contacté Batman et Lex Luthor, les aiguillant chacun sur une voie bien précise, Ozymandias met son plan à l’œuvre. Ce qu'il ignore encore, c'est que ce nouvel univers va le changer lui aussi en profondeur et lui apprendre des secrets qu'il n'aurait jamais pu envisager seul. Alors que ce monde s'embrase suite à une profonde crise de confiance envers ses héros, peut-être manipulés par les gouvernements, un dangereux compte à rebours est lancé, et l'horloge repart de plus belle. Cette fois, c'est rien moins que l'anéantissement du multivers tout entier qui représente le point fatidique de non-retour, selon la position que choisira d'adopter le Docteur Manhattan quand le moment viendra. Mais même lui, malgré ses pouvoirs incommensurables, ignore tout de cet avenir.


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Deux mondes, deux crises bien distinctes mais qui se rejoignent autour d'un point culminant, et des milliards de vies en jeu. Tout heureux que je sois d'avoir enfin réussi à lire jusqu'au bout cet imposant récit, je ne souhaite pas cependant vous en divulguer tous les tenants et aboutissants comme je le fais d'ordinaire, parce que comme pour Watchmen en son temps, ça gâcherait tout le plaisir de la découverte et de la compréhension quand le rideau tombe enfin. Je vous invite donc à faire votre propre lecture et à forger votre propre opinion.


La mienne est qu'il s'agit ici de l'un des travaux les plus singuliers et impressionnants de Geoff Johns, dont l'écriture ciselée parvient sans grand mal à se hisser presque au niveau de l'original. Comme pour Watchmen, dont c'est la suite inavouée mais clairement assumée, Doomsday Clock bénéficie de plusieurs niveaux de lectures et d'une portée juste phénoménale dans l'ensemble de l'univers DC. Car c'est bien de celui-ci qu'il s'agira la plupart du temps : les personnages d'Alan Moore sont transportés dans l'univers DC de l'époque Rebirth, subissant les contrecoups de plusieurs réécritures et avançant tout droit vers un avenir des plus chaotiques.


Au centre de la tempête, il y a deux hommes : le Docteur Manhattan, et bien évidemment Superman. Les deux sont amenés à se rencontrer à un moment crucial, décisif, et peut-être même à se confronter jusqu'à destruction complète du multivers. Les travaux de nombreux auteurs clés de DC sont exploités ici, comme Grant Morrison ou encore Scott Snyder, sans oublier Johns lui-même bien entendu. Aidé au dessin par Gary Frank, le scénario nous propose de suivre une enquête plutôt intimiste dans un premier temps, reprenant même les temps forts de l’œuvre originale en les rejouant la sauce DC, puis qui s'emballe jusqu'à un déferlement de puissances et de périls mortels à l'échelle de tout un univers, voire de plusieurs, avant de trouver sa résolution de nouveau dans les actes d'un être bien précis.


Si vous pensez être largués avec ce résumé et cette courte analyse, ce n'est pas grave. Sachez qu'il n'y a absolument pas besoin d'avoir lu tous les travaux des auteurs que j'ai cité ici. Ayez simplement connaissance de Watchmen, des New52 et de DC Rebirth, et ça ira je pense. De toute manière l'éditorialiste d'Urban vous offre un rapide topo au début de cet album, remettant tout dans le bon contexte et rappelant les quelques éléments vraiment essentiels. Il n'y a plus qu'à vous lancer.


Alors au final, est-ce que Doomsday Clock aura une incidence majeure sur l'évolution des titres DC dans un avenir proche ? Ce qui est sûr, déjà, c'est que l'accouchement de cette histoire a été des plus difficiles voir incertains, le projet ayant rencontré plusieurs obstacles et retards avant d'être enfin complet. Le présent du récit se place en 2017, en pleine présidence de Donald Trump (même s'il n'est jamais nommé ni montré), et nous offre un portrait assez bluffant de notre monde à travers le prisme de l'univers DC Comics et de ses héros. On reconnaîtra sans aucun problème certaines grandes problématiques de notre temps, ainsi que certains politiques clairement identifiés eux, mais ce qui marque le plus c'est la résonance de toutes ces crises avec celles du passé, qu'elles soient fictives ou bien réelles. Il y a beaucoup de messages à faire passer à travers Doomsday Clock, pas seulement le traditionnel espoir inébranlable incarné par Superman.


Au travers de cette relecture quasi complète de l'histoire de DC et de ses plus grands héros, y compris dans la gamme Vertigo, Geoff Johns nous livre surtout un témoignage de son amour inconditionnel de cet univers, de ces univers devrais-je dire, et il pousse le vice jusqu'à proposer des ponts vers d'autres éditeurs et donc d'autres multivers ! Si la ligne éditoriale de DC a depuis préféré donner suite aux projets de grande envergure de Scott Snyder, au travers des séries New Justice et Batman Metal notamment, je pense vraiment que l'autre ligne que représente Doomsday Clock vaut la peine d'être conservée quelque part. Qui sait, si même le Docteur Manhattan est incapable de voir l'avenir, peut-être qu'il nous sera encore réservé de belles surprises dans les années futures...


Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

 

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