lundi 17 juillet 2017

La question du lundi n°44 : L'âme de Nintendo est-elle partie avec Satoru Iwata ?


Voilà un peu plus de deux ans, le 11 juillet 2015, nous quittait Satoru Iwata, PDG de Nintendo. Avec sa disparition la firme du plombier moustachu se retrouvait orpheline d’un patron humain, ayant la connaissance du terrain (il fût développeur chez Hal Laboratory), de nombreux succès commerciaux (Nintendo DS, Wii) mais aussi un bide retentissant avec les pires ventes d’une console de salon avec la Wii U.
En début d’année est sortie la Nintendo Switch, fruit d’une longue traversée du désert de la fin de l’ère Iwata. Aujourd’hui la société de Kyoto n’a toujours pas trouvé son successeur, Tatsumi Kimishima assurant l’intérim en tant que directeur. D’où notre question du lundi un peu provocatrice : L'âme de Nintendo est-elle partie avec Satoru Iwata ?

Il n’est pas peu dire que la mort de Satoru Iwata fût aussi soudaine qu’inattendue dans le petit monde du jeu-vidéo. On savait le monsieur malade et amoindri, mais le pire semblait derrière lui. Et puis non, dans une attitude toute japonaise l’homme préféra s’en aller en occupant son poste jusqu’à la fin.
Les autres pontes de Nintendo se préparaient-ils au pire ou furent-ils aussi surpris que nous ? Nous ne le saurons probablement jamais. A priori Iwata envisageait bien sa succession, mais à plusieurs années d’échéance. De fait la nomination de Kimishima va dans ce sens : lui le financier, n’est présent qu’en qualité de régent, en attendant la promotion d’un nouveau roi à la tête de Nintendo.

Mais depuis quelque temps déjà, la direction de Nintendo chamboule les traditions pourtant bien ancrées du vénérable consolier : arrivée de plusieurs applications et jeux sur smartphone (alors qu’Iwata y était farouchement opposé), proposition de dlc (contenu additionnel téléchargeable payant) sur les jeux de la firme, arrivée du online payant sur la Switch, partenariat avec Universal pour un parc d’attraction utilisant les personnages de la société… le petit artisan de Kyoto semble avoir cédé au consumérisme digital et à la diversification de ses activités.
Difficile de dire s’il s’agit d’une direction voulu par Kimishima et/ou l’ensemble du conseil administratif de Nintendo, mais avec le décès prématuré de Iwata et la prise de recul en vue d’une retraite bien méritée pour Shigeru Miyamoto et Genyo Takeda, on sent clairement que le phénomène s’accélère avec la prise de pouvoir de la jeune garde de la firme, plus en phase avec l’évolution technologique du média.
Alors certes oui, l’arrivée des dlc s'est faite sous l’ère Iwata, les applications smartphone étaient prévues, le mercantilisme dans la place avec les amiibo, mais clairement ce n’est pas quelque chose que Satoru Iwata devait cautionner en tant que développeur et encore plus en tant que personne. Le four de la Wii U en terme de ventes n’a hélas pas dû laisser les coudées franches au PDG, gageons que l’histoire aurait été toute autre avec un succès plus honorable pour cette machine.
Mais la perte prématurée de monsieur Iwata pour Nintendo a indéniablement précipité ce changement drastique que la société entame en ce moment.

L'âme de Nintendo est-elle partie avec Satoru Iwata ? Clairement oui, du moins d’un certain Nintendo. Celui des années 2000, voire des années '80-'90 dans le prolongement.
Il ne faut cependant pas oublier que la firme du plombier est une société séculaire (elle a été fondée au XIXe siècle) et qu’elle n’en est donc pas à sa première métamorphose ou évolution. Le fait que ses récents dirigeants se soient enfermés dans un certains conservatisme a sans doute freiné la compagnie à bien des égards, mais sa capacité à toujours rebondir alors que tout le monde s’accorde à dire qu’elle est moribonde force le respect.
La volonté affichée de Nintendo de sortir de l’ornière du seul jeu-vidéo peut faire peur tout comme elle peut réjouir, seul l’avenir pourra nous dire si les pontes de la société ont intelligemment géré les propriétés de la firme ou vendu son âme sur l’autel du profit. Nintendo a le potentiel de devenir un géant du divertissement à l’échelle de Disney, avec tout ce que cela peut comporter de bon et de mauvais côtés.

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