vendredi 29 septembre 2023

La V.O. du vendredi n°243 : The Theater (Zenescope - Juillet 2012)


Il existe, quelque part dans le monde, des endroits très particuliers d'où rien ne semble ressortir indemne. Des endroits ressemblant à n'importe quel autre du même genre, mais où la vie elle-même semble aspirée, où les gens les plus normaux se mettent à agir de façon totalement anormale et où même les plus vertueux découvrent l'horreur qui guide la raison vers les profondeurs.


Parmi ces endroits, il y en a un vraiment très spécial. Un cinéma de quartier tout ce qu'il y a de plus normal, de plus authentique, une véritable relique des années fastes où les films étaient projetés à la journée et où l'on pouvait s'acheter une séance pour trois fois rien. Aujourd'hui, c'est surtout son âme que l'on risque en s'installant confortablement dans les sièges usés.


Au travers de cinq histoires, cinq récits sur pellicule qui seront projetés aux spectateurs avides de frissons, ce sont cinq façons de sombrer dans l'horreur et le néant qui seront présentées et abordées, avec une morale douteuse à la fin et surtout un petit dénouement rien moins que personnel pour les pauvres malheureux qui se seraient risqués à rester jusqu'au bout du générique.


Qu'il s'agisse d'une pandémie zombie, d'une affaire de serial-killer d'auteurs à succès, d'un trou béant qui aspire tous vos sales petits secrets dans une banlieue chic, d'un voisin qui cache un lourd passif en essayant de se racheter une nouvelle vie, ou bien encore d'un homme bien sous tous rapports qui du jour au lendemain disparaît de la mémoire de tout le monde... voici le genre de programmes que l'on projette dans ce petit cinéma anonyme tenu par une famille pas vraiment comme les autres.


Vous aurez bien du mal à rencontrer le patron, le patriarche qui a tout bâti de ses mains : on dit qu'il ne quitte plus beaucoup son bureau ces temps-ci. Sa fille s'occupe de toute la partie administrative et également de l'événementiel, tandis que les rares employés également membre de la famille s'affairent à faire tourner la boutique. Mais vous seriez bien mal avisés d'aller jeter un œil en coulisses... mieux vaut éviter en effet la salle de projection, et gardez-vous de prendre un supplément spécial avec votre seau de pop-corn. Enfin, ne restez jamais jusqu'à la fin du générique... ça pourrait surtout être la vôtre.


---

 

Je n'attendais pas grand chose de cette parution Zenescope, il faut dire que ça remonte à loin maintenant la dernière fois que j'ai lu et chroniqué quelque chose venant de chez eux, à mon grand regret d'ailleurs. On va tâcher d'améliorer cela, mais tout d'abord le sujet présent, cet étrange cinéma dont peu de clients ressortent après une bonne séance de frissons.


Si les deux premières histoires étaient vraiment sympas, celle sur la pandémie de zombies étant traitée sur un plan particulièrement intimiste a tout pour vous toucher exactement là où il faut, faisait résonner la corde sensible et abordant le sujet des zombies sous un angle très personnel. La seconde histoire, racontant la progression d'un auteur en devenir en parallèle d'une série de meurtres d'écrivains de best-seller, est franchement bien scénarisée là encore mais déjà un peu plus spectaculaire et bourrée de clins d’œils pas vraiment finaux aux grands noms du genre horrifique aux États-Unis, en comics comme en romans. On se régalera de certaines scènes vraiment bien trouvées, mais on commence déjà à entrer dans le passable.


Les récits suivants tendront malheureusement à approfondir cette impression, allant de simplicité brute en clichés et déjà-vus assez évidents par moments, bref ça ne renouvelle pas le genre, au contraire la série participe même à enraciner davantage des poncifs déjà là depuis un bon moment. La toute dernière histoire, toutefois, sur cet homme qui semble disparaître de la mémoire de tout son entourage d'un seul coup, était une bonne surprise mais arrivant cependant trop tard pour sauver cette mini-série.


Les dessins des couvertures sont très bien travaillés, comme toujours chez Zenescope, et c'est comme toujours l'intérieur qui pèche par trop de simplicité. J'aime beaucoup le format consistant à raconter une seule et même histoire par chapitre, et chaque chapitre racontant donc une histoire différente autour d'un axe commun, ici le cinéma d'horreur. C'est un format que l'on connaît bien depuis des décennies déjà, avec les Contes de la Crypte ou les magazines Creepy et Eerie par exemple, dont Zenescope s'est faite l'héritière moderne avec ses Tales of Terror que je compte bien lire un jour également.


Bref vous l'aurez compris c'est toujours sympa quand il s'agit de passer le temps et de s'occuper pour préparer Halloween ou bien juste entre deux autres lectures, mais malgré des qualités certaines à plusieurs endroits ça reste quand même un comic-book passable qui ne fera pas date dans le genre de l'horrifique, c'est plutôt comme une sorte de petite halte histoire de réviser ses bases avant d'oser emprunter un chemin disons... plus pernicieux.

lundi 25 septembre 2023

Les Contes Interdits - Pinocchio (ADA Éditions - Juin 2018)


Patrick n'était encore qu'un enfant quand ses parents ont fait de lui un monstre, en le faisant participer à des jeux pervers et en les lui faisant subir également quand l'envie leur prenait. A tel point qu'avant même ses dix-huit ans, Patrick s'est pendu à l'arbre derrière sa maison, peut-être en espérant échapper à tout ça. Ses parents furent arrêtés, et Patrick décroché juste à temps pour être emmené à l'hôpital en urgence absolue.


Amnésique, Patrick ne se souvient de rien de son passé, hormis quelques bribes qui remontent parfois à la surface à travers ses mauvais rêves et quelques allusions qu'il surprend entre les adultes parlant de son cas. Une travailleuse sociale décide de le placer chez son grand-père maternel, le temps que les choses s'arrangent. Le vieil homme, du nom de Joseph, est tout sauf ravi d'accueillir un petit-fils dont il n'avait aucune idée de l'existence, et surtout pas après toutes les horreurs qui sont sorties dans la presse au cours de l'enquête. En plus, Joseph a ses habitudes bien arrêtées, une vie solitaire organisée entre l'alcool et la menuiserie artisanale, et une collection maladive de jouets qu'il répare ou fabrique et entrepose n'importe où dans sa maison-dépotoir.


Amené à vivre avec Joseph au moins jusqu'à sa majorité, Patrick va devoir se débrouiller pour trouver à manger et survivre dans ce capharnaüm, survivre à l'école aussi où les brutes locales ont tôt fait de lui mettre la main dessus, survivre surtout avec les souvenirs absents qui ne demandent qu'à remonter à la surface à travers des sensations étranges, une envie de cruauté pure envers certains animaux également, et une répugnance manifeste pour le sexe féminin.


Patrick, tout amnésique qu'il soit, n'est pas un ange pour autant. Il passe le plus clair de son temps sur son ordinateur portable, à s'inventer une vie et de faux profils Facebook, pour arnaquer des jeunes femmes en se faisant passer pour une pauvre victime et en leur extorquant affection et surtout argent pour assurer son train de vie. L'objectif de Patrick est clair, il veut réunir suffisamment d'argent pour se tirer de chez Joseph, qui n'a pour lui que mépris, et mener la grande vie par ses propres moyens, souvent à la limite de la légalité.


Quand les arnaques en ligne ne suffisent plus, Patrick n'hésite pas un seul instant à sauter sur les occasions les plus baroques qui se présentent à lui : dealer des amphétamines à la sortie des écoles, combattre dans une arène frauduleuse pour le plaisir d'hommes aussi pervers que ses propres parents, et voler et surtout surtout, mentir, encore et toujours. Plus le mensonge est gros, plus le plaisir que Patrick en retire l'est tout autant. Bientôt, se faire passer pour une victime de la vie ne suffit plus non plus, il en rajoute des caisses sur les mauvais traitements qu'il subit au quotidien dans son établissement scolaire, qu'il ne fréquente d'ailleurs pratiquement plus. Et les gens en ligne sont assez naïfs ou assez horrifiés par ses récits pour le croire et lui prodiguer encouragements et soutiens financiers.


Jusqu'au jour où tout ça ira beaucoup trop loin, même pour le mythomane patenté qu'est devenu Patrick. Les choses se bousculent soudain et les malheurs s'enchaînent à un rythme effréné, les combines se débinent, la vérité éclate un peu partout et le sol se dérobe sous ses pieds. Entre les retours de bâton de ses mensonges et les hallucinations cauchemardesques qui font revenir les souvenirs de son enfance dans son esprit torturé, Patrick est au bord de l'implosion, qui se produira fatalement et dans laquelle il entraînera la plupart des gens de son maigre entourage. Même la présence d'une inespérée Fée Bleue dans sa vie, seul vecteur de sincère gentillesse à son égard et seul véritable espoir de liberté, ne sera au final qu'un ultime coup de massue que son existence minable lui assènera pour mieux le renvoyer dans les cordes et achever de le briser.


Plus que tout, Patrick veut être libre, ne plus jamais être le pantin de personne, ne plus jamais rien devoir à qui que ce soit, et s'émanciper des souvenirs, des cauchemars, de la hantise et du goût du sang. Même le sexe ne lui fait vivre que troubles et tiraillements de plus en plus graves et intenses. Au fond du trou, Patrick est sur le point de se faire avaler tout entier par la colère et l'envie de se venger, de tout détruire autour de lui, pour que son monde ressemble à ce qu'il est à l'intérieur, un être brisé de toutes parts et qui n'a déjà plus aucun espoir de revoir un jour la lumière salvatrice.


---

 

Pour être honnête avec vous, chères lectrices et chers lecteurs, en lisant cette version de Pinocchio par Maude Royer dans la collection des Contes Interdits je ne m'attendais pas vraiment à tant de violence morale et physique, même si quelques signes auraient du me mettre la puce à l'oreille.


Je ne peux m'empêcher de regretter un peu cette lecture, car ce n'est clairement pas ce que je m'attendais à y trouver et certainement pas ce qui m'a fait le plus de bien dernièrement dans mes pérégrinations littéraires. Ces réécritures modernes des contes en version très sombre ont toujours eu un côté très voyeur et montreur, et la perversité est une donnée clairement assumée à chaque fois bien qu'à des degrés divers et variés selon les auteurs et autrices de la collection.


Peut-être que j'avais l'espoir assez naïf moi aussi qu'avec une autrice de romans pour enfants comme Maude Royer, ce conte malfaisant ne serait pas si noir, pas si infernal, pas si désespéré et désespérant. Je m'étais trompé, et de beaucoup.


Je n'ai jamais à ma connaissance ressenti le moindre intérêt et surtout la moindre once de compassion pour le personnage principal, du début à la fin. Chaque chapitre, chaque page, est l'occasion de le voir s'enfoncer davantage dans ses méfaits et dans ses mensonges, et de faire souffrir toutes les personnes qu'il approche ou qu'il rencontre. Patrick Nocchio est conçu, selon moi, pour être parfaitement antipathique à quiconque le lira, un portrait saisissant de réalisme de ce que peuvent être les pires trolls et harceleurs que l'on trouve à foison sur les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter/X, Instagram, YouTube, etc. etc. Ces êtres toxiques n'ont pas la moindre parcelle de gentillesse en eux, pas le moindre état d'âme, et doivent être condamnés dès le départ avec la plus grande fermeté pour tout le mal qu'ils font et continueront de faire tant qu'ils ne seront pas arrêtés.


Pour le coup, Maude Royer réussit à nous raconter une vérité qui dérange beaucoup à travers une montagne de mensonges tous plus gros les uns que les autres, une vérité sur la société virtuelle dans laquelle nous vivons toutes et tous, à laquelle nous contribuons et participons à divers degrés, et dans laquelle certaines et certains se noient totalement quand d'autres s'y complaisent éhontément. Franchement, cette lecture n'était pas pour moi, et elle restera je le pense un moment assez désagréable et décevant. Et heureusement, j'ai envie de dire, parce que dans le cas contraire je m'interrogerais fiévreusement sur mes propres inclinaisons à la cruauté perverse et gratuite, du moins si j'avais encore une conscience.


Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

vendredi 22 septembre 2023

La V.O. du vendredi n°242 : Phoenix omnibus tome 1 (Marvel - Juin 2022)


Après avoir déjoué un complot anti-mutants et avoir vaillamment combattu dans une station spatiale en orbite terrestre, les X-Men tentent de regagner la surface de la Terre mais leur navette est endommagée et prise dans une tempête solaire. Ils vont se consumer soit en entrant dans l'atmosphère, soit dans les vents solaires impitoyables... ils courent tout droit entre les bras de la Mort, et cette fois personne n'en réchappera miraculeusement.


A moins que... usant de ses dons de télépathie et de télékinésie, Jean Grey, alias Marvel Girl, maintient les commandes de la navette en fonction et s'enferme dans le cockpit afin de diriger la course folle de l'engin, permettant ainsi à ses compagnons d'aventure de s'en tirer mais se condamnant elle-même à une mort atroce. Assaillie par les radiations et les forces cosmiques, Jean est sur le point de périr quand une voix résonne dans son esprit. Quelque chose a entendu son appel, sa prière silencieuse, et vient alors à son secours.


Désormais, tout le monde la connaîtra sous le nom de Phénix. Dotée d'un pouvoir pratiquement illimité, Jean devient du jour au lendemain la mutante la plus puissante qui soit sur Terre, et même par-delà les étoiles. Rien ni personne ne saurait l'égaler, rien ni personne ne saurait même l'atteindre à son niveau actuel. Elle est tout simplement devenue l'avatar privilégiée de l'une des puissances primordiales de l'univers lui-même, celle de la Création, l'étincelle du Big Bang et l'ultime flamme qui emportera tout à la fin des temps.


Mais Jean demeure néanmoins une jeune femme, une simple humaine, pouvoirs faramineux ou non, et bien vite il apparaît que toute cette puissance est difficile à appréhender même pour elle, encore plus à contrôler. Un côté sombre se forme dans son esprit, une facette de sa personnalité qui ne supporte pas la moindre frustration, pas la moindre résistance, et qui ne vit que pour déployer son pouvoir et consumer tout ce qui lui fait face. Pendant un temps, Jean parvient à contenir ses mauvais instincts, mais au bout d'un moment c'en est trop et le mal prend le dessus. La douce Marvel Girl est bien loin à présent, et le terrible Phénix Noir dévore l'énergie de systèmes solaires entiers pour satisfaire sa soif de liberté et assouvir sa faim dévorante pour le pouvoir absolu.


Alors que ses compagnons tentent de la raisonner, les forces impériales Shi'ars débarquent et l'accusent d'avoir détruit des mondes porteurs de vie pour son propre désir incontrôlé. Jean doit faire face au jugement des peuples les plus avancés de l'univers connu, et dans un moment de faiblesse resté légendaire elle provoquera sa propre mort entre les bras de son amant, Cyclope, dont la dernière image de son aimée sera l'apaisement sur son visage, redevenant enfin la Jean Grey que tout le monde connaissait.


---

 

Avec la Saga du Phénix Noir, Chris Claremont et John Byrne frappent un grand coup dans le petit monde si bien ordonné des comics Marvel de ce tout début des années '80. Une membre fondatrice des incroyables X-Men trouve la mort, apparemment pour de bon, et de façon on ne peut plus dramatique. Le symbole est fort, la morale de l'histoire l'est toute autant, et quelque part personne n'est vraiment à l'abri des retombées de ce récit novateur.


Dans ce premier omnibus consacré au personnage de Phénix, tel qu'incarné par Jean Grey donc, Marvel nous permet de redécouvrir cette grande tragédie cosmique aux dimensions pourtant si humaines. De la naissance du Phénix-Jean à sa disparition dans ses heures les plus sombres, vous assisterez à tous les grands moments du personnage ainsi qu'aux réactions de ses frères et sœurs d'armes durant les temps forts comme dans les scènes plus intimistes.


Mais la grande originalité de cet album selon moi, c'est surtout la présence des nombreux récits bonus ajoutés par l'éditeur : on trouvera ainsi différents chapitres de Classic X-Men consacrés à Jean Grey et ses nouveaux pouvoirs, cette série parallèle étant bien connue pour servir de bouche-trou à l'époque et permettre aux auteurs de raconter de brefs passages en peu de pages pour compléter l'intrigue principale. D'ailleurs j'avais boudé la sortie de l'omnibus contenant l'intégralité des chapitres de cette série en V.O. comme en V.F., ne la trouvant pas nécessaire ni forcément pertinente dans ma collection. Grâce à cet omnibus Phoenix, je rattrape mon retard et je me consacre seulement à ce qui m'intéresse vraiment sur le moment. Gagnant-gagnant.


Vous aurez aussi le plaisir et la curiosité de lire la fin originelle de la saga du Phénix Noir, telle que l'auraient voulu ses créateurs avant que leur éditeur en chef ne s'interpose pour le bien de la série. Et toujours en guise de bonus confortables, vous trouverez un chapitre de la série What if ?... qui reprend cette fameuse fin inédite en la poussant plus loin encore et en lui offrant une suite logique et terriblement concrète dans un univers parallèle où les choses se seraient passées différemment.


Pourquoi j'aime cet omnibus ? Parce qu'en dehors des grands héros que tout le monde connaît, Marvel ne tente que relativement rarement d'éditer des albums de ce format pour des personnages tirés d'équipes à la base, Phénix n'ayant jamais eu sa propre série dédiée par exemple. Il s'agit davantage d'une sorte de grosse anthologie d'épisodes des X-Men concernant directement ou non Jean Grey durant cette période difficile de transition et de transformation en quelque chose qui allait échapper à tout contrôle.


J'aime aussi le fait que l'on puisse ne pas se contenter d'une seule fin, et profiter de l'occasion pour compiler différentes versions d'une même histoire autour d'un seul et même personnage comme pivot central. J'aime aussi que soient inclues dans cet omnibus les différentes préfaces signées par Stan Lee et Chris Claremont pour les rééditions ultérieures de cette saga dans d'autres formats. Enfin, j'aime le fait que ce soit un tome 1, appelant donc fort logiquement un second et peut-être plus encore par la suite si le lectorat est au rendez-vous.


Pourquoi je vous en parle maintenant ? Parce que justement le second omnibus vient de sortir en V.O., et qu'il me tarde de l'avoir entre les mains car il contiendra pour moi davantage de récits inédits que je n'ai pas encore lu dans l'édition Marvel Classic des intégrales annuelles des X-Men et autres. J'espère que ce petit tour des origines du personnage vous aura donné envie de le découvrir par vous-mêmes également, et peut-être de saisir l'opportunité de démarrer là une belle collection, qui sait ?

samedi 16 septembre 2023

Batman - Knightfall tome 4 : La Quête (Urban Comics - Septembre 2013)


Les nuits se suivent et se ressemblent à Gotham City, une ville prisonnière de sa propre légende noire et où le crime frappe partout et tout le temps. Cette cité maudite a toujours eu besoin d'un protecteur, et aujourd'hui elle en a un nouveau en la personne de Jean-Paul Valley, le dernier Batman en date.


Mais Jean-Paul est lui-même assailli de doutes et d'hallucinations provoquées par le fameux système programmé dans son esprit par son propre père, pendant sa période de formation auprès de la secte d'assassins de l'Ordre de Saint Dumas. Il voit régulièrement les spectres de son père et de son saint patron l'invectiver et lui donner des ordres contradictoires, entre préserver la vie ou bien mettre fin à celle-ci quand cela concerne les criminels qui se multiplient et se déchaînent en ville.


Jusqu'à il y a peu, Jean-Paul parvenait à juguler ces visions et à contrôler les effets néfastes du système en lui. Mais devant tant de violence, chaque nuit sous ses yeux, devant tant d'extrêmes à combattre, même son esprit finit par lâcher, et le système reprend le dessus. Se privant de sommeil pour s'entraîner sans relâche, concevoir une nouvelle armure et de nouvelles armes à y incorporer, Jean-Paul est lui-même devenu une machine à tuer potentielle, et il ne faudrait pas grand chose de plus pour le pousser à commettre l'irréparable.


Quand le tueur en série Abattoir refait surface et menace à nouveau les membres de sa propre famille, suivant sa psychose jusqu'au bout, c'est la goutte de trop pour le nouveau Batman qui décide d'en finir pour de bon avec ce genre d'individus. La traque d'Abattoir ne se fera pas sans mal, et de nombreux innocents seront placés sciemment sur sa route pour tenter de ralentir ou d'arrêter le justicier qui poursuit sa proie, implacable, remontant lentement la piste et se préparant à rendre la justice à sa façon.


D'autres vilains et voyous de tous horizons pointent le bout de leur nez à Gotham durant cette sombre période, mais ils sont tous mis hors d'état de nuire par un Batman aux méthodes expéditives qui n'a pas de temps à perdre en prenant des gants avec eux. Ayant finalement retrouvé Abattoir, Batman le confronte dans une fonderie en activité et se retrouve devant une situation complexe où il doit impérativement faire un choix, entre laisser le criminel mourir ou lui sauver la vie. Et, devant témoins, Jean-Paul décide de laisser le destin s'accomplir.


Désormais, le mot est passé, chez tous les criminels, chez tous les malfrats et même dans les rangs de la police : le Batman ne plaisante plus, et malheur à qui se trouvera face à lui. Même Gordon, pourtant soutien de longue date du justicier masqué, ne sait plus à qui il a affaire exactement, et manque de faire une chute mortelle quand il confronte ce terrible Batman d'un nouveau genre pour lui exprimer sa façon de penser. Intérieurement, Jean-Paul est en pleine descente morale, et il ne se rend pas compte qu'il perd soudain pieds avec son idéal et le cœur de sa Croisade sacrée.


Pendant ce temps, Bruce Wayne poursuit sa propre quête pour sauver le père de Tim Drake, avec l'aide d'un Alfred de plus en plus réticent à l'idée de laisser son employeur risquer sa santé déclinante pour une mission suicide. Remettant sa démission après que Bruce ait à nouveau refusé de prendre le temps de soigner son dos meurtri, le majordome contacte Jean-Paul à son retour à Gotham et le met sur la piste de Bruce pour le sauver avant qu'il ne soit trop tard, mais Batman tombe dans un piège qui l'éloigne de cette piste et permet aux ravisseurs d'emmener leur proie jusqu'à Santa Prisca pour un ultime règlement de compte.


Bruce n'est cependant pas sans ressources pour cet affrontement, et parvient contre toute attente à l'emporter et à sauver la femme qu'il aime, le Dr. Shondra Kinsolving, de son tourmenteur et bourreau. Mais Shondra n'est plus que l'ombre d'elle-même, l'esprit brisé par cette expérience traumatisante, et elle s'effondre après avoir usé une toute dernière fois de son pouvoir régénérant pour soigner Bruce.


Maintenant qu'il a récupéré sa motricité et que le père de Tim est sain et sauf, de retour chez lui, Bruce n'a plus qu'à décider s'il veut reprendre la cape de Batman ou bien s'il laisse son successeur poursuivre son travail. L'ancien détective se verrait bien prendre sa retraite et goûter enfin aux plaisirs d'une vie humaine, mais les révélations de Tim concernant la situation réelle dans Gotham vont convaincre Bruce d'aller confronter Jean-Paul dans la Bat-cave, sur son propre terrain, pour constater de ses propres yeux l'existence du monstre qu'il a grandement contribué à créer.


Désormais il ne reste plus qu'une seule option envisageable : Bruce Wayne doit redevenir Batman, le seul et l'unique, pour le bien de Gotham et de tous ses habitants, avant que Jean-Paul ne franchisse une nouvelle étape dans sa guerre auto-destructrice contre le Mal. Mais même s'il est physiquement remis des blessures infligées par Bane et qu'il n'en garde aucune séquelle, Bruce n'a plus les réflexes qu'il faut pour tenir tête à son successeur, bardé d'armes et doté d'une puissance folle par son armure dernier-cri. Il ne reste qu'une seule solution, aller demander de l'aide à une personne que Bruce redoute par-dessus tout mais qui serait en mesure de l'entraîner suffisamment rapidement pour atteindre son meilleur niveau, quel qu'en soit le prix.


---

 

Dans ce quatrième tome de la saga Knightfall, nous assistons donc à la chute morale de Jean-Paul Valley, qui ne faisait plus aucun doute depuis un petit moment déjà. Le système implanté de force dans son esprit le taraude et le pousse dans ses retranchements jusqu'à faire de lui l'inverse de ce qu'il s'était juré de devenir en reprenant la cape du Batman à son compte, et c'est même un miracle qu'il n'y ait pas eu de mort plus tôt que ça sur son parcours.


Le temps de la Croisade est donc terminé, ainsi et surtout que celui de la Quête, cette mission de sauvetage désespérée menée par un Bruce affaibli mais aussi déterminé que jamais pour sauver des innocents. En parallèle l'un de l'autre, Bruce et Jean-Paul suivent chacun une route qui les mènera immanquablement à un affrontement titanesque très bientôt, car il ne peut exister qu'un seul Batman à Gotham City. Tandis que l'un s'épuise psychologiquement à devenir le bras armé idéal d'une guerre sans fin contre le crime, l'autre bousille son corps à chaque nouvelle intervention et se met en danger chaque jour davantage alors qu'il aspire plus que tout au repos.


Miraculeusement guéri, Bruce va apparemment devoir passer un marché avec une personne redoutable pour redevenir le Batman ultime, avant d'aller combattre Jean-Paul pour tenter de le déposséder de l'identité de la Chauve-souris. Une bataille qui, à n'en pas douter là aussi, s'annonce épique à plus d'un titre et sera relatée dans le cinquième et dernier tome de la saga, sobrement intitulé La Fin. On ne peut pas faire plus simple comme message !


Les auteurs des différentes séries liées à Gotham et son univers redoublent d'inventivité pour donner des adversaires adaptés au niveau de violence de Jean-Paul et qui puissent lui tenir tête au moins quelques chapitres avant de disparaître tout aussi rapidement qu'ils sont venus. On assiste bel et bien à une violence extrême qui se déchaîne autour du justicier, une violence propre à ce milieu des années '90 où il fallait choquer et mettre la barre très haut pour attirer et maintenir le lectorat. Une violence débridée et même décomplexée, quand on voit certains personnages comme le fana d'armes à feu Gunhawk ou le sanguinaire Abattoir, et à laquelle le petit monde de Gotham répond de façon assez mauvaise il faut bien le dire.


La police est dépassée par le degré de violence insoutenable dans les rues, les gangs de voyous et de motards avides de coups faciles se multiplient et les super-criminels habituels restent absents le temps que l'orage passe et que le vrai Batman ne se montre à nouveau pour calmer les choses. Même Gordon est au pied du mur et ne sait plus à quel saint se vouer pour protéger les citoyens de sa ville.


Esthétiquement parlant, les adversaires du Batman version Jean-Paul Valley sont assez représentatifs de cette période créative : on retrouve des codes vestimentaires et anatomiques propres aux récits développés par Image depuis 1992, comme Spawn et autres. Des muscles ostentatoires, des armes qui le sont tout autant, de grands mouvements de cape dans les ténèbres, et des scénarios plus simples à suivre mais pas moins riches en action pour autant, au contraire même. Ces personnages aussitôt créés aussitôt jetés dans l'arène sont tout bonnement destinés à la poubelle par la suite, leur seule utilité concrète étant de pousser le personnage principal à emprunter un chemin extrême qui le transformera à jamais. La violence n'engendre que davantage de violence dans son sillage, et il est grand temps que cette période assez particulière se referme avec le retour du héros véritable sous le masque, même si cela ne se fera pas sans mal évidemment.


Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

 

vendredi 15 septembre 2023

La V.O. du vendredi n°241 : ORMUS #1 (Obscura Comics - Avril 2022)


A bord du vaisseau d'exploration Raia-447, deux humanoïdes à la peau bleue observent une planète qui n'apparaît sur aucun de leurs plans. Odessa et Atlas sont en mission dans le cosmos pour repérer d'éventuelles formes de vie sur les planètes déjà répertoriées par les cartographes de leur monde, mais cette étrange nouvelle planète bleue n'est signalée nulle part. Ou plutôt, tout laisse penser qu'elle aurait été retirée des archives, comme si elle ne devait plus en faire partie.


Odessa, d'un caractère bien trempé et au tempérament aventurier, décide de faire atterrir le vaisseau à la surface de ce nouveau monde, car les derniers relevés indiquent la présence de pyramides très similaires à celles que leur propre planète comporte en son sein. Atlas essaie bien de l'en dissuader, mais peine perdue, même après avoir reçu l'ordre direct de leur commandant Sonos de ne pas s'approcher davantage et de quitter ce secteur.


L'atterrissage cependant se fera avec difficulté, le vaisseau connaissant soudain une avarie technique qui pousse son pilote, Atlas, à se crasher sur les dunes de sable de l'immense désert qui s'offre désormais à eux. Odessa et Atlas vont partir en exploration dans la direction des pyramides, à pieds, tandis que leur robot de bord s'affaire à réparer ce qui peut l'être et à reconnecter les systèmes de communication. Quand les deux explorateurs parviennent enfin à une oasis, ils y découvrent les fameuses pyramides et sont à présent convaincus qu'elles sont identiques à celles qu'ils connaissent déjà sur leur monde. Qu'est-ce que cela signifie ?


Sonos, de son côté, est très contrarié que ses subordonnés lui aient désobéi, et plus encore qu'ils aient mis le pied sur cette planète qu'il semblait vouloir garder inconnue et hors des radars. Il active alors un protocole spécial pour envoyer à leur poursuite Decima, une tueuse émérite déterminée à exécuter ses directives à la lettre.


---

 

A l'origine, j'ai découvert Sun Khamunaki avec ses illustrations réalisées pour Coffin Comics et Zenescope il me semble, puis sur son propre site où elle répertorie ses différents travaux et offre même la possibilité d'acheter des prints, tous plus séduisants et funs les uns que les autres. Pour en savoir davantage sur l'artiste elle-même, référez-vous à mon article sur son premier artbook.


ORMUS, c'est pour elle la consécration d'un rêve longtemps mis de côté, le temps d'avoir les compétences et le savoir nécessaires à le mettre en œuvre. Cette série de science-fiction n'offre à-priori pas grand chose de très original dans le genre, on retrouve beaucoup d'éléments déjà connus et exploités ailleurs (pyramides aliens, intelligences artificielles, explorateurs désobéissants, planète inconnue, etc.) mais ici il faut surtout juger le talent de la dessinatrice, dont les planches sont juste plus magnifiques les unes que les autres !


Si au départ tout paraît assez sombre et qu'on a un peu de mal à distinguer tous les détails de ce style digital, c'est évidemment parce que cela se déroule dans l'espace et dans un environnement clos. Quand on arrive dans le désert, en plein soleil, tout nous apparaît soudain dans sa plus belle version et on ne peut qu'admirer les détails, les textures, les expressions de langage corporel adoptées par les personnages ainsi que leurs attitudes et caractères... à n'en plus finir.


La série est classée M, pour Public Mature, ce qui veut dire qu'il y aura certainement des scènes assez adultes à un moment donné, et connaissant le style de l'artiste ça ne m'étonnerait pas le moins du monde. Mais pour l'instant, ce seul premier chapitre n'offre que des merveilles à contempler, des images sur lesquelles on imagine sans mal que Sun Khamunaki a passé des heures et des heures à tout perfectionner pour un rendu optimal. Signalons aussi qu'elle n'est pas toute seule sur ce projet, puisqu'elle fait équipe avec le scénariste Garth Matthams pour donner à ce petit récit une dimension plus construite et structurée que ce à quoi l'on pouvait s'attendre.


Des révélations et précisions seront sûrement au programme dans les chapitres suivants, mais pour l'instant je ne possède que celui-ci donc il va falloir prendre son mal en patience avant d'avoir la suite, l'artiste étant très demandée en plus. Je dirais que c'est un premier essai très encourageant et qui mérite de se faire connaître en dehors du cercle des fans habituels du genre ou des auteurs, et que le projet éditorial d'Obscura Comics semble plutôt bien rôdé même si peut-être pas encore assez solide pour assurer un rythme régulier de parutions. Trois séries sont déjà programmées, et vous trouverez tous les détails utiles sur le blog de Sun Khamunaki et le site d'Obscura.


Je terminerai en précisant qu'il existe, comme le veut la tradition, plusieurs couvertures alternatives pour chaque chapitre, ce seul premier en comptant déjà quatre à lui tout seul, et que pour ma part j'ai choisi la première couverture (que vous voyez en tête de l'article donc), dont je possède aussi l'illustration en print de taille moyenne, avec lequel on peut se régaler des détails et de la technique sans aucun mal. Si vous le pouvez et le souhaitez, encouragez ces jeunes talents et achetez quelques prints sur les sites concernés, la livraison se fait même en Europe ! Je donne sa chance à ORMUS et j'attends avec impatience de pouvoir lire la suite si elle paraît un beau jour !

jeudi 14 septembre 2023

Trap Hole tome 1 (Kana - Juin 2023)


Haruko est une jeune femme de 29 ans vivant en province et ayant une existence bien rythmée. Elle travaille dans une grande compagnie, elle a de nombreuses amies avec qui sortir, et surtout elle a un fiancé avec lequel un grand et beau mariage est prévu pour tout bientôt ! Bref, une situation idéale pour une femme comblée qui n'attend rien de plus de la vie.


Sauf qu'en réalité, rien ne va. Son fiancé lui déclare qu'il en aime une autre, et préfère lui remettre toutes leurs économies pour le mariage qui n'aura jamais lieu plutôt que de faire machine arrière. Ses amies ne l'aident pas, son travail est devenu un calvaire car elle y croise fréquemment ''l'autre'', et comble de malchance son propre père lui en veut à elle de cette situation !


Alors, au fond du trou, Haruko accepte l'offre saugrenue d'une vague connaissance du Lycée, Asano, qui lui demande de monter à Tokyo et de travailler pour lui dans son restaurant Brésilien. Avec même un logement sur place en prime ! Trop beau pour être vrai ? Même pas, tout est bien là à son arrivée, et Asano est honnête et franc avec elle, il l'aide à pleurer pour évacuer, il lui dégotte un travail comme promis, et un petit appartement temporaire, de quoi rebondir dans la grande ville et se forger une nouvelle vie petit à petit. A l'aube de ses trente ans, Haruko n'a rien à perdre et n'a que l'embarras du choix pour adopter un nouvel itinéraire.


De fil en aiguille, elle se rapproche d'Asano, qui ne fait rien de son côté pour cacher son attirance pour elle. De vagues connaissances, ils deviennent vite amis, confidents... et même amants occasionnels. Cette nouvelle sorte de relation pousse Haruko à s'interroger sur ce qu'elle veut vraiment et ce qu'elle peut s'autoriser, au sortir d'une rupture douloureuse. Elle sait qu'elle n'ira nulle part avec Asano, pas de relation sérieuse en vue, juste du sexe quand elle a besoin pour se changer les idées et faire partir les ruminations qui lui rendent la vie impossible.


Sauf que ce n'est pas aussi simple, encore une fois. Haruko découvre sur le vif qu'Asano n'est pas célibataire, mais surtout totalement marié ! Et évidemment il n'en n'avait jamais parlé, et les petits doutes dans l'esprit de Haruko étaient bien vite réduits au silence dans le feu de l'action. La voilà maintenant jetée à la rue par la femme de son amant, dans une ville qu'elle ne connaît pas, et totalement nue, ayant à peine une petite serviette de toilette pour se protéger. Grâce à la générosité désintéressée d'une jeune femme qui croise son chemin par hasard, Haruko trouve un refuge et essaie de remettre ses idées en place, mais tout ce qu'elle comprend, c'est qu'en tombant au fond du trou proverbial, elle a trouvé le moyen de creuser davantage.


---

 

Aussi étrange que ça puisse vous paraître, cette lecture m'a fait du bien ! Pas parce que je suis un sadique aimant voir la souffrance morale et émotionnelle mise en scène, mais justement parce que rien n'est dissimulé par la mangaka, Nemu Yoko (que d'ailleurs je ne connaissais pas du tout jusque là). Les tourments d'une jeune femme tout juste trentenaire dont la vie rêvée se brise en mille morceaux et qui fait tout pour les recoller tant bien que mal, quitte à prendre des risques, se lancer dans une nouvelle histoire sans lendemain, découvrir qu'elle peut souffrir encore plus qu'elle ne le pensait... je ne sais pas pourquoi, mais un récit de ce genre est toujours assez vivifiant à lire.


Trap Hole est un manga assez court puisqu'il ne comporte que quatre tomes en tout nous promet Kana, et un peu comme dans Nana rien ne nous est épargné des turpitudes et ruminations de notre pauvre héroïne malgré elle, embarquée sur une voie qui se dérobe encore sous ses pieds quand elle pensait s'être enfin stabilisée rien qu'un peu. La leçon est dure à apprendre mais elle fait aussi du bien parce qu'elle permet d'ouvrir les yeux, tout simplement.


Le dessin tout en légèreté fourmille de petits moments adorables, de mimiques mignonnes ou de tronches déprimées et larmoyantes, selon les circonstances, et c'est aussi ça la Vie je pense. La vie d'une jeune femme qui apprend à la dure que son monde n'est pas si parfait et qu'elle va devoir redoubler d'efforts pour se sortir de ce satané trou tant qu'elle le peut encore. Pour l'instant l'histoire elle-même semble assez légère, pas trop crue et pas trop méchante, il y a toujours un moyen de s'échapper, mais peut-être que les tomes suivants vont creuser encore davantage le fossé et que Haruko va plonger plus profond dans la dépression et le désespoir, perdue qu'elle est dans cette grande cité qui ne lui épargne rien.


J'aime ce genre de séries, ces tranches de vie dévoilées au fil d'une pensée qui se déroule, d'un bien-être illusoire qui s'écroule et d'un drame qui se joue sous nos yeux. Pourquoi j'aime ça ? Parce que ça fait remonter chez moi des sentiments très positifs, une envie sincère que l'héroïne se redresse et remonte la pente, parvienne à accomplir quelque chose à force de faire des efforts, une vraie empathie pour ses souffrances émotionnelles, un besoin aussi peut-être un peu voyeur sur les bords de savoir ce qui va lui arriver par la suite et l'illusion toute bête de pouvoir y faire quelque chose en continuant à lire, à faire défiler les pages et les cases, espérant contre toute logique que ça ira mieux au bout d'un moment. On verra bien !


Ce manga est assez frais dans son genre, pas prise de tête du tout, clair à comprendre, facile à suivre, facile de s'y immerger et de ressentir quelque chose avec ses personnages, son personnage principal surtout évidemment, et j'y retrouve ce qui me plaisait dans les œuvres de Mari Okazaki par exemple comme & - And dont j'ai déjà pu vous parler il n'y a pas si longtemps. Peut-être qu'avoir dépassé la trentaine moi-même me pousse à lire davantage de récits de ce genre, loin des fictions incroyables et irréelles, peut-être que c'est une ancre bien à moi pour rester conscient et apprécier les petites choses qui rendent la vie si agréable quand tout va mal tout autour.


Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

mercredi 13 septembre 2023

Dawn of X tome 11 (Panini Comics - Avril 2021)


New Mutants : Les membres de l'équipe de Mirage sont toujours aux prises avec les autorités de la Carnelia, une nation d'Europe de l'Est farouchement anti-mutante, tandis qu'ils essaient tant bien que mal de sortir une jeune mutante du cocon de cauchemar que ses pouvoirs ont généré autour d'elle et de tout ce qui l'environne. Alors que la première tentative s'est soldée par un échec, les Nouveaux Mutants font cette fois-ci intervenir Wildside qui devrait, grâce à ses pouvoirs, changer le cauchemar en rêve agréable et provoquer le réveil de la jeune mutante déboussolée. Pendant ce temps, le Premier Ministre de Carnelia instrumentalise l'intervention des mutants sur son sol grâce à la présence des médias pour en faire une attaque contre son pays et une nouvelle raison de haïr les mutants et de rejeter la Pax Krakoa. Alors que les soldats s'apprêtent à ouvrir le feu, l'arrivée de Magik sur le terrain permet à tout le monde de retourner sains et saufs sur Krakoa, mais l'offense ne sera pas oubliée de sitôt ! Grâce à Glob, Illyana a découvert l'existence d'un site Internet consacré exclusivement à recenser les adresses et données personnelles de mutants tout autour du monde, afin de déchaîner sur eux un torrent de haine et des campagnes de harcèlement sans fin. La Carnelia n'est qu'un résultat parmi d'autres de l'action de ce site, dont il convient désormais de traquer les fondateurs pour les forcer à fermer boutique !


Wolverine : Logan continue de s'adapter pour survivre. Krakoa n'est pour lui qu'un immense terrain d'entraînement, une Salle des Dangers en perpétuelle évolution et qui maintient ses sens en éveil. Se méfier de tout et de tout le monde, pour protéger tout et tout le monde, voilà le rôle de Wolverine sur l'île. Mais quand un vieil ennemi franchit un portail, couvert de sang et demandant l'asile, il ne faut pas moins que l'intervention de Magneto pour empêcher Logan de faire un massacre. Omega Red semble tout juste sorti d'une grosse bataille qui l'a laissé considérablement affaibli, et tandis qu'il sera détenu dans une cellule spéciale Logan devra remonter sa piste et découvrir ce qui lui est arrivé. Son enquête le mènera jusqu'à Paris, où il fera la rencontre d'un nouveau danger pour les mutants, ou plus particulièrement pour lui : la Nation Vampire. Les buveurs de sang se sont eux aussi rassemblés autour d'un chef charismatique pour fonder un nouvel âge qui leur appartiendrait, profitant du fait que l'humanité soit absorbée par sa lutte pour ou contre les mutants. En miroir de Krakoa, les vampires ont donc eux aussi leur propre nation, qui ne demande qu'à s'étendre... heureusement, certaines personnes sont encore assez lucides pour les combattre et Logan sera sauvé de justesse par l'une d'elles, mais peut-être un rien trop tard pour empêcher Vlad Drakul d'obtenir ce qu'il convoîte. Quant à Omega Red, qui pourrait dire pour qui il travaille véritablement ?


Excalibur : C'est fait : la Grande Bretagne est en guerre ouverte contre Krakoa ! Après qu'un missile en provenance de l'île-nation mutante se soit abattu sur Londres, les hostilités anti-mutantes n'ont pas tardé à exploser partout dans le pays, et les rues sont en flammes tandis que l'on traque les membres d'Excalibur et que l'on brûle les portails krakoans ainsi que des effigies de Charles Xavier. Mais que s'est-il donc passé pour que la situation dégénère à ce point ? Rien que la petite intervention du nouveau roi de l'Outremonde, Jamie Braddock, le propre frère aîné de Betsy, dont les pouvoirs mutants lui permettent de distordre la réalité selon son bon plaisir. En fait, toute cette histoire de guerre n'est qu'une réalité de poche créée par le souverain dément, dans le seul et unique but de fractionner le pouvoir de sa sœur et de provoquer l'apparition de tous nouveaux Captains Britain. Dans quel but final ? Ça, on l'ignore totalement. Mais ce qui est déjà sûr, en revanche, c'est que toutes ces manœuvres ne sont vraiment pas plaire à Saturnyne, la souveraine intransigeante de l'entre-deux qui relie toutes les réalités entre elles. Voyant les manipulations de Jamie comme une nouvelle preuve que la seule présence de mutants dans l'Outremonde est une menace mortelle, elle décrète qu'ils doivent être éliminés sur le champ, Captain Britain ou pas !


Hellions : Maintenant que l'équipe de mutants la plus redoutable qui soit est enfin formée, il est grand temps de l'envoyer sur le terrain ! Objectif du jour : démanteler l'ancien orphelinat Essex dans le Nebraska, qui servait en réalité d'usine à clones pour Monsieur Sinistre à l'époque où il était quelqu'un de moins courtois. Nettoyer derrière lui ne devrait pas prendre bien longtemps... sauf si l'endroit est devenu le repaire d'une bande de clones décérébrés avides de chair fraîche, manipulés à loisir par une revenante, Madelyne Pryor, elle-même clone démoniaque de Jean Grey. Madelyne souhaite se venger de tous les mutants, de Krakoa, de cet idéal nouveau qui leur a tous fait oublier son existence, la condamnant à ses propres limbes. Aujourd'hui, la Reine Démon a un message à faire passer : elle existe bel et bien, et Krakoa tombera dans les flammes et le sang jusqu'à ce que les ultimes survivants se souviennent enfin d'elle ! Si la plupart des Hellions sont vaincus et sur le point d'être dévorés, Psylocke et Wild Child restent discrets et progressent dans les souterrains de l'orphelinat maudit, avec comme priorité de sortir Alex de l'emprise de Madelyne avant que celle-ci ne l'exécute, puis d'éliminer la Reine Démon avant qu'elle ne mette son plan à l’œuvre en réveillant une armée de clones... toutefois, juste avant, Psylocke va devoir rappeler à un Wild Child déchaîné qui commande dans cette équipe !


---

 

Je n'ai pas grand chose à ajouter cette fois-ci, je vous laisse découvrir dans les albums reliés à paraître tout prochainement les chapitres de Hellions comme des autres séries mutantes. Je voudrais simplement attirer l'attention, pour une fois, sur le travail éditorial des équipes de Panini dans cette revue : en effet, difficile de faire revenir un personnage comme Madelyne Pryor sans en rappeler les origines à un public qui ne l'a pas connue à l'époque, et pour le coup le rapide briefing de l'édito permet de bien situer toute cette histoire sans se noyer dans les détails, ce qui est plutôt appréciable il faut bien le dire. Rendez-vous dans les articles concernant les intégrales X-Men annuelles pour en savoir davantage sur la grande période Pryor !


Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

mardi 12 septembre 2023

Future State Justice League tome 1 - 2027-2030 (Urban Comics - Septembre 2021)


Après leur victoire finale contre Perpetua et le Batman Qui Rit, les héros ont permis au multivers de continuer à exister et à croître, offrant ainsi une infinité d'avenirs possibles à de nombreux mondes et de nombreuses versions de la Terre. Mais tous ces futurs ne sont pas forcément dorés...


Ainsi, en 2027, Barry Allen et ce qui reste de la Flash-family luttent sans relâche contre une entité démoniaque ayant pris possession du corps et de l'esprit tourmentés de Wally West, en en faisant ainsi un être incroyablement puissant capable de dévorer toute force vitale chez ses victimes. Poussé dans ses retranchements et privé de ses propres pouvoirs, Barry se tourne vers les armes de ses nombreux ennemis passés pour tenter de trouver une solution pour arrêter Wally une bonne fois pour toutes, mais ce pourrait aussi être sa toute dernière aventure alors que le monde entier s'apprête à sombrer dans les ténèbres.


De leur côté, les Titans affrontent les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse à New York, où ils ont réussi à les attirer grâce à une arme antique, et sont sur le point de renverser la situation et le cours de cette guerre infernale. Grâce au sacrifice de Shazam, les démons sont enfin scellés dans le corps de la seule personne capable de les contenir, mais pour combien de temps ? Pour éviter toute nouvelle incursion, Shazam décide d'emprisonner son ancienne alliée dans le Rocher d'Éternité et d'en fermer les portes grâce à son alter-ego, le jeune Billy Batson, après un marché de dupes avec un seigneur de l'Enfer.


Jackson Hyde est le nouvel Aquaman en titre, tandis que la fille d'Arthur et Mera est devenue Aquawoman mais manque encore cruellement d'entraînement pour maîtriser ses immenses pouvoirs. Sa formation est donc dispensée par son frère adoptif, mais durant leurs voyages ils pénètrent sans le vouloir dans le grand océan cosmique qui relie toute vie dans l'univers, et sont envoyés d'un bout à l'autre de la Création au hasard, cherchant à rejoindre leur planète en traversant des mondes parfois déserts, parfois hostiles. Six ans s'écoulent ainsi, tandis que Jackson est prisonnier sur Neptune et que sa jeune partenaire grandit en apprenant seule à contrôler ses pouvoirs dans le but de le libérer pour reprendre ensuite leur voyage ensemble. Qui sait où leurs brasses les mèneront ?


La Ligue de Justice des Ténèbres a fort à faire elle aussi de son côté, occupée à combattre les forces magiques de Merlin qui s'est emparé de pratiquement tout ce qui pouvait contenir de la magie pour renforcer ses propres pouvoirs et prendre en mains le destin du monde tout entier. Seuls quelques magiciens conservent encore leurs capacités, mais elles sont bien maigres face à ce que le plus grand sorcier de tous les temps est capable d'accomplir. Là aussi, il faudra de nombreuses tromperies et un nouveau marché désespéré avec des forces dépassant l'imagination pour donner une seule petite chance au bon camp de l'emporter dans un avenir lointain.


Et sur une autre Terre, Nubia est devenue la seule héritière de l'armure et du titre de Wonder Woman, affrontant sans relâche la traîtresse Graal, fille de Darkseid, qui tente de s'emparer de tous les morceaux d'une clé incroyablement ancienne capable de percer les frontières des réalités, mais qui pourrait aussi attirer dans le monde mortel des créatures pires qu'infernales qui ne demandent qu'à se repaître de tout ce qui leur est présenté. Comment mieux servir la cause de Darkseid, le grand ennemi de la Vie elle-même, qu'en relâchant sur l'univers ces terreurs sans nom ? Heureusement, Nubia a finalement le dessus sur son adversaire et met son plan en échec une fois de plus, échouant malheureusement elle-même à la neutraliser pour de bon. Il faudra à la jeune et féroce Amazone se méfier de ses propres alliées également, car les ombres sont bien nombreuses dans l'esprit de celles qui ont connu les temps jadis et le Chaos qui y régnait en maître...


Enfin, sur la Terre-3, Amanda Waller a formé un nouveau groupe pour répandre une justice absolue et expéditive et faire respecter sa loi de par le monde : la Justice Squad est née ! Rassemblant des personnages aussi retors que possible dans le rôle des plus grands héros du monde, cette équipe a pour principale mission de fournir à Waller tous les éléments dont elle a besoin pour un projet titanesque qui lui permettrait à terme d'isoler totalement la Terre-3 du reste du multivers, la rendant ainsi parfaite à ses yeux et imperméable à toute menace cosmique future. Encore faudrait-il que ses propres agents acceptent d'aller jusqu'au bout sans faillir, alors que des envoyés d'une autre Terre arrivent pour combattre Waller et le Projet Cocon avant qu'il ne soit trop tard.


---

 

Seconde incursion de ma part dans l'event Future State de DC publié en cinq tomes chez Urban, ici comme vous l'avez lu il est question des séries des autres héros que Batman et Superman, qui ont droit à leurs propres albums dédiés. On retrouve donc pêle-mêle les séries Flash, Teen Titans, Aquaman, Wonder Woman, Justice League Dark ou encore Suicid Squad dans leur version futuriste liée à ce petit saut dans le temps pour voir de quoi l'avenir sera fait.


Gardons toutefois à l'esprit qu'il ne s'agit là que d'avenirs alternatifs, de possibilités qui n'ont rien de vraiment solide ou concret, rien n'est gravé dans le marbre en somme. L'exercice vise simplement à imaginer, pour les artistes concernés, ce qui pourrait arriver si telle ou telle ficelle était tirée. En soi je pense que l'on peut totalement se passer de lire les albums estampillés Future State car ils ne sont pas nécessaires pour continuer à suivre les séries principales de chez DC, mais c'est toujours intéressant d'explorer des futurs possibles.


Je terminerai juste en précisant que, à ma grande surprise, tout le scénario de la série Justice League Dark version Future State repose sur un repompage honteux pratiquement à l'identique de la fameuse scène de reddition du Docteur Strange face à Thanos dans le film Avengers – Infinity War. Comme quoi, les studios et éditeurs s'influencent bel et bien les uns les autres à travers leurs productions, mais là je dois avouer que je ne m'attendais pas à ce que ce soit si ressemblant, c'est peut-être légèrement hors-limite légalement parlant... enfin, ça reste un détournement mineur, voir un hommage maladroit si on veut.


Pour l'instant nous ne sommes allés que jusqu'en l'an 2030, mais les prochains albums nous promettent d'explorer l'avenir de façon encore plus poussée et lointaine, allant parfois jusqu'à plusieurs millénaires dans le futur... Si vous êtes curieux, soyez du voyage, sinon passez outre jusqu'à ce que je reprenne le fil de la continuité DC Infinite.


Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

vendredi 8 septembre 2023

La V.O. du vendredi n°240 : House of M omnibus (Marvel - Janvier 2023)


Tout commence avec une fin, celle des Avengers. Les plus grands héros de la Terre ont été trahis par l'une des leurs, Wanda Maximoff, la Sorcière Rouge, ayant perdu le contrôle de ses pouvoirs et de son esprit. Les victimes s'accumulèrent, tragiquement, à mesure que la folie de Wanda gagnait en puissance. Il s'en est fallu de peu que toute la ville de New York ne soit oblitérée dans les affrontements qui en ont résulté, et c'est grâce à l'intervention de Magneto, le propre père de Wanda, que l'horreur prit fin.


Mais c'était il y a des mois. Aujourd'hui, les Avengers ont cédé la place à une nouvelle génération, les New Avengers, qui ont désormais la lourde tâche de décider du sort de la Sorcière Rouge. Tout ce que l'on sait, c'est qu'elle a trouvé refuge quelque part sur l'île meurtrie de Genosha, auprès de son père et du Professeur Charles Xavier qui tente tout son possible pour la guérir et lui rendre le contrôle de ses facultés. Mais même un esprit aussi puissant que celui de Xavier a des limites, et face à l'ampleur du désastre qui se joue dans la tête de sa patiente, il ne peut que demander une aide désespérée.


Réunissant alors les X-Men et les New Avengers, Xavier leur explique la situation et leur remet le sort de Wanda entre les mains. Ils doivent décider s'il convient de poursuivre les soins, de tester d'autres méthodes... ou de faire cesser ses souffrances pour de bon. Une décision très lourde pour tous ceux qui la connaissaient et faisaient partie des mêmes équipes, presque de la même famille pour certains, une décision qui les hantera quoi qu'il arrive. Résolus à ne pas laisser leurs divergences d'opinion les guider vers une erreur, les héros prennent le chemin de Genosha pour s'entretenir avec la première concernée et se rendre compte par eux-mêmes de son état si préoccupant.


Au même moment, Pietro, frère de Wanda, supplie à genoux leur père de faire quelque chose pour empêcher que le malheur ne s'abatte à nouveau sur leur famille. Mais Magneto est un homme changé par les trop nombreuses défaites, par les trop nombreuses morts qu'il a pu connaître ici sur son île, et il lui est totalement impossible de sauver son enfant. Il est condamné à la regarder dépérir et à attendre que d'autres prennent les choses en mains, mais intérieurement il enrage de cet état de fait injuste et il voudrait tant que tout se passe autrement. Si seulement il en avait le pouvoir, si seulement il en avait encore l'énergie...


Quand les héros arrivent sur Genosha, un calme anormal les y accueille. Soudain, Xavier se volatilise comme par magie, et alors que tout le monde part en urgence à sa recherche dans les ruines de l'ancienne nation mutante, un éclair blanc aveuglant illumine le ciel et embrase toute chose.


Lorsqu'il se réveille, Wolverine est à bord d'un héliporteur du S.H.I.E.L.D. d'un nouveau genre, et des souvenirs confus se bousculent dans sa tête. Des souvenirs d'une vie dont il n'a pourtant aucune mémoire, d'une existence qui serait la sienne sans l'être vraiment... et, ne le supportant pas, il saute par-dessus bord, se mettant en quête de vérité. Il l'ignore encore, mais il se trouve dans un monde qui ne saurait être plus différent du sien : le monde dirigé par la Maison M ! Une Terre accueillante pour tous les mutants, un monde où l'Homo Superior a vaincu toutes ses entraves et domine largement la planète, son savoir et ses ressources atteignant des sommets auparavant inenvisageables pour le commun des mortels. Un monde où l'Homo Sapiens, voué à disparaître d'ici quelques générations, cohabite en minorité absolue face à une écrasante majorité mutante. Un monde où Erik Magnus, anciennement connu sous le nom de Magneto, a renversé la vapeur et a donné une chance à son espèce de se dresser face à l'oppression dont elle était victime, mais sans acte de vengeance aveugle par la suite. Les humains ne sont pas traités comme une anomalie ni comme du bétail, simplement comme un reliquat génétique condamné à brève échéance et dont il ne faut guère se soucier.


Certains groupuscules terroristes Sapiens tentent bien de leur côté de reprendre les rennes, d'autres s'en accommodent plutôt bien, et dans l'ensemble le monde est en paix et prospère comme jamais. Les rêves de tous les gens qu'il connaît semblent s'être réalisés de bien des façons, tout semble si paisible, si ordonné, si parfait... alors pourquoi Logan a-t-il cette impression que rien n'est à sa place et qu'il lui incombe, à lui seul chez qui demeure le souvenir d'une réalité dépassée, de remettre le monde dans le droit chemin ? Existe-t-il seulement un droit chemin ? Et surtout, de quel droit modifierait-il la vie des milliards d'habitants de la planète pour la conformer à ses propres souvenirs ? Logan a besoin de réponses, et vite. Heureusement, le Destin va placer sur son chemin une petite personne qui a le pouvoir de tout changer, et qui l'aidera à ouvrir les yeux sur le drame qui se joue véritablement en coulisses.


Dès lors, Wolverine doit rassembler le plus de héros possible autour de lui et leur faire voir la réalité telle qu'elle devrait être et non pas telle qu'elle leur apparaît, avant de lancer un assaut général sur le palais royal de Genosha, au cœur du territoire de la Maison M au grand complet. Au final, tout se jouera sur une seule soirée fatidique, et une chose est sûre : personne n'est vraiment préparé à ce qui va suivre.


---

 

Comment vous décrire le phénomène incroyable qu'est House of M dans l'histoire contemporaine de Marvel, sans vous spoiler les meilleurs passages et les plus grands secrets derrière cette intrigue de génie tissée avec les plus grands soins par Brian Michael Bendis au sommet de son art ? Peut-être en vous racontant une bribe de mon passé de jeune lecteur, pour commencer.


Au milieu des années 2000, j'ai eu ma première période de lecture de comics, à travers les revues publiées en kiosque par Panini à l'époque. J'ai débuté avec la fin du run de Grant Morrison, ainsi que la séparation tragique des Avengers, deux éléments primordiaux pour comprendre ce qui arrivera ensuite. Quand j'ai découvert House of M, ça a été une claque monumentale pour le jeune lecteur adolescent que j'étais alors. Jamais encore je n'avais lu une intrigue aussi développée, aussi importante et aussi étendue (je n'avais pas connu les grands events Marvel du passé, comme Les Guerres Secrètes ou L’Ère d'Apocalypse pour les seuls X-Men), tout cela m'apparaissait d'un tel niveau et d'une telle nouveauté, d'une telle audace, que ça ne pouvait forcément qu'être un chef-d’œuvre.


Le dessin très travaillé et absolument bluffant du Français Olivier Coipel était à tomber, et j'ai tout fait pour collectionner toutes les revues qui parlaient un tant soit peu de cet événement colossal, absorbant ici et là quelques bribes d'informations et tâchant de relier de mon mieux les différentes intrigues que je découvrais en même temps. Je me souviens d'avoir lu les Fantastic Four version Fatalis et d'en être ressorti bouleversé, par exemple, mais ce n'était rien comparé à ce qui allait venir avec les deux derniers chapitres du scénario majeur de Bendis. Là, tout a véritablement changé, et durablement en plus !


Il faut se remettre dans le contexte de l'époque, en général les grands cross-over unissant tous les héros face à une menace commune s'arrêtaient sur un retour au statu-quo de départ ou peu s'en faut, alors que là Bendis a eu les coudées franches pour imposer un tout nouvel ordre chez Marvel, qui croyez-le ou non a toujours des répercussions de nos jours alors que nous assistons à la fin de l'ère Krakoa lancée par Jonathan Hickman, un autre grand visionnaire s'il en est. Mais Krakoa n'aurait jamais été possible s'il n'y avait eu, au tout départ, House of M. C'est le point fédérateur par excellence, avec le pan mutant ultra-populaire de Marvel comme socle, et où chacun peut retrouver son ou ses héros favoris dans un beau moment de gloire ou, au contraire, de tourment.


Mais revenons-en à l'omnibus ici-présent, qui arrivera en Version Française d'ici quelques mois chez Panini d'ailleurs. Si j'ai pris le temps de vous raconter le début de mon histoire, c'est pour vous permettre de comprendre que je n'avais à l'époque presque rien compris de ce qu'il fallait vraiment comprendre, tout simplement parce que je ne disposais pas de tous les chapitres de toutes les séries parues durant l'événement, il me manquait forcément des morceaux qui ne sont qu'à peine évoqués dans la série principale mais qui avaient droit eux aussi à leur développement, pour rendre cohérent et très complet ce nouvel univers.


J'ai donc eu besoin de cette relecture récente dans le format omnibus pour découvrir tout ce que j'ignorais jusque là sur House of M, et ça m'a positivement enchanté du début à la fin ! Je ne vous mentirais pas en vous affirmant que toutes les séries sont égales en qualité, c'est loin d'être le cas, mais elles ont tout de même toutes un certain intérêt pour savoir ce que nos héros ont vécu dans leur coin avant le grand rassemblement final. L'album est rempli à ras-bord de ces à-côtés, de toutes ces informations éparses qui n'attendaient qu'un bel omnibus pour être enfin toutes rassemblées elles aussi et former une fresque gigantesque qui reste, de loin, ma préférée du genre encore à ce jour.


Tous les auteurs, tous les artistes de la Maison des Idées ont marché côtes à côtes avec Bendis et Coipel pour étoffer leur vision et nous offrir un tout plus qu'acceptable, couvrant pratiquement tout ce que l'on pouvait faire et imaginer à l'époque. Cet omnibus comporte aussi un nombre record de bonus en cahier de fin, dont les pages du journal fictif The Pulse qui à elles seules nous donnent un aperçu de toutes les autres intrigues qui seront développées. S'y adjoignent des croquis, des crayonnés, des pages de scénario, une interview de Bendis par Newsarama, des remises en contexte, etc. etc., bref tout ce que l'on est en droit d'attendre dans un si bel écrin et un si beau format. Et pour de la V.O., c'est très soigné, n'en déplaise à celles et ceux qui lui font une mauvaise réputation. En témoigne simplement le soin apporté à la couverture sous la jaquette, première et quatrième ainsi que dos, illustrant un portrait de famille emblématique d'un grand moment de la Maison M. Moi ça me séduit déjà pas mal !


Mon seul regret : avoir attendu si longtemps depuis Janvier dernier pour boucler cette lecture et vous la présenter seulement maintenant, alors que la V.F. arrive dans si peu de temps. Ça m'oblige à ne pas vous raconter les meilleures parties, à ne pas vous parler des meilleurs détails, et surtout à ne pas vous spoiler le grand final qui reste une source d'inspiration pour de nombreux auteurs depuis lors. J'espère que vous serez nombreuses et nombreux à découvrir tout ça par vous-mêmes, et je croise les doigts pour que Panini apporte un soin tout particulier à cette œuvre historique à plus d'un titre dans son format omnibus français.


Ça me donne surtout envie d'être à votre place, pour vous qui allez sans doute découvrir cette histoire pour la première fois ou la relire entièrement avec tous les détails et passer des heures à vous extasier devant tant de merveilles rassemblées en un tout enfin digne de ce qu'il contient. Faites-moi signe si vous souhaitez en discuter davantage, et en attendant profitez bien ! Et pour les vieux briscards qui connaissent déjà le tout, et bien reprenez-en donc un petit peu au passage, ça ne peut pas faire de mal !