Alors
là, attention, on va parler d'un film dont je ne me suis toujours
pas remis du visionnage, il y a trois semaines de cela, tandis que
vous profitiez béatement de mes articles sur les vampires. Soleil
Vert
(Soylent
Green),
de Richard Fleischer, est l'adaptation cinématographique sortie en
1973 d'un roman de science-fiction/anticipation de Harry Harrison
intitulé Make
Room ! Make Room ! paru
en 1966. Carrément dans les critères de Radiophogeek donc, et si je
décide de vous parler de ce vieux film c'est avant tout parce qu'il
m'a plu et qu'il porte énormément de réflexions qui sont encore,
par anticipation, d'actualité de nos jours mine de rien, si ce n'est
encore plus réalistes qu'à l'époque (un peu comme la faillite
officielle de Detroit en 1987 dans RoboCop
qui est devenue il y a quelques mois de cela une triste réalité).
En 2022, la population humaine a augmenté de façon
drastiquement exponentielle, si bien que les ressources naturelles de
la planète sont devenues des raretés s'arrachant à prix d'or et
parfois de vie : la viande, les vrais fruits et légumes, le
lait, les œufs... tout cela n'existe pour ainsi dire plus que dans
les castes les plus aisées de la société, et encore en tant que
produits de luxe. A New York, où l'on compte désormais près de 44
millions d'habitants dont 20 millions de chômeurs dans le dénuement
le plus complet, le gouvernement n'a pas d'autre choix que
d'organiser de grandes distributions publiques de nourriture aux
foules affamées qui sont prêtes à déclencher une véritable
émeute sanglante au moindre manque. La société Soylent
commercialise et distribue des plaquettes de nourriture artificielle
de substitution, baptisées Soleil Rouge et Soleil Jaune, sortes
d'agglomérats de plancton et autres organismes primaires qui forment
donc depuis des dizaines d'années la seule et unique nourriture
connue des basses castes, au grand désespoir des rares anciens qui
se souviennent encore vaguement du goût et de l'aspect de la vraie
nourriture d'autrefois. Alors que sort un nouveau produit alimentaire
baptisé Soleil Vert, l'un des dirigeants de la société Soylent est
retrouvé assassiné chez lui dans sa résidence de luxe des
quartiers riches de la ville, apparemment sans le moindre signe
d'effraction ou de vol. Le policier Thorn va alors se charger de
l'enquête, dans un premier temps par pur intérêt personnel afin de
pouvoir prélever sur les lieux du crime tout ce dont il aurait envie
et ainsi alimenter son petit réseau d'informateurs, mais bien vite
il va commencer à s'intéresser de plus près à cette affaire qui
dissimule une étrange conspiration du silence, où plusieurs grands
noms se retrouvent mêlés et où l'avenir de l'humanité se joue
peut-être. Est-ce un règlement de comptes ? Une vendetta ?
Une menace ou un chantage sur Soylent et ses partenaires au sein du
gouvernement ? Ou bien... une punition divine ? Thorn devra
prendre toutes les précautions durant son enquête, car une fois
cette vérité trop bien gardée enfin dévoilée, le monde pourrait
bien basculer dans la folie la plus totale...
Je
ne vous en dis volontairement pas davantage, je pense même en avoir
déjà un peu trop révélé sans le savoir. Toujours est-il que la
réflexion de ce film, et du roman qu'il adapte, est assez cynique et
déshumanisée finalement, ce qui avait pour but de profondément
choquer les penseurs de l'époque et de faire réfléchir aux
conséquences possibles de l’appauvrissement de la planète et de
ses ressources pour une humanité toujours plus nombreuse et
exigeante. D'autres thèmes sont aussi traités, tels que
l'esclavagisme moderne (au travers des femmes considérées comme du
simple mobilier dans les appartements coûteux des riches et des
profiteurs, destinées à convenir ou non à chaque nouveau locataire
et à satisfaire ses moindres exigences), la crainte du peuple par
ses élites dirigeantes, la vision de ce peuple comme une masse
informe et terrible, grondante, qu'il faut considérer comme un
animal sans libre-arbitre pour le priver de ce dernier et le
manipuler. La mort assistée est aussi au nombre des thèmes abordés,
de même que le suicide pur et simple, au début et à la fin du film
et de différentes manières. Un bel hommage a d'ailleurs été rendu
à ce film par Les
Simpsons
lorsque Grand-Père Simpson, humilié, décide de mourir et se rend
alors dans un centre d'accompagnement spécialisé.
Soleil
Vert,
c'est un film qui fait réfléchir sur bien des choses, mais
principalement sur les dangereuses dérives d'une société
déshumanisée et au bord du gouffre, où tous les moyens sont bons
pour subsister et se maintenir dans son rang. Et qui, par le fait,
reste encore très vrai même de nos jours, malgré le petit côté
arriéré des technologies que l'on imaginait à l'époque pour 2022.
Ça pourrait limite être la petite touche d'humour involontaire et
bienvenue du film si on le regarde aujourd'hui, pour permettre de
détendre un peu l'atmosphère qui ne manquera pas de grandement
s'alourdir devant cet ensemble de plans-chocs, d'idées-chocs et de
propos-chocs. Et de toute façon ça ne fera aucun mal à votre
culture, bien au contraire !
Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et
je vous souhaite une bonne séance, en espérant vous retrouver
bientôt pour un nouvel article !
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