samedi 31 janvier 2015

The Crow - Midnight Legends tomes 1 et 2 (Delcourt - Février 2014 et Janvier 2015)


Si vous suivez les articles de ce blog depuis Juin 2014, vous avez du lire celui sur la série originale The Crow de James O'Barr, en Août de la même année ce me semble. Sinon, bienvenus et prenez le train en marche, tout en tâchant de rattraper votre retard si possible !

Je vais vous parler ici des séries dérivées du phénomène The Crow. Après l'histoire première, de nombreux auteurs et dessinateurs ont eux aussi voulu apporter leur pierre à l'édifice en créant de nouveaux récits autour de cette légende brutale et tragique. C'est en partie ce qui donne la collection Midnight Legends, où l'on retrouve certaines de ces nouvelles histoires. Toutes ne sont pas de qualité, loin s'en faut, et le moins que l'on puisse dire c'est que par moments on a surtout l'impression de voir un mauvais pastiche d'un chef-d'oeuvre globalement incompris par ces nouveaux auteurs désireux de rendre hommage à leur façon. C'était le cas notamment pour les second et troisième films de la saga au cinéma, ainsi que pour la médiocre série-télévisée des années '90, dont le souvenir s'efface heureusement un peu plus chaque année.
Delcourt nous fait donc paraître depuis un an cette collection, et voici le moment pour moi de vous parler des deux premiers tomes, très inégaux.

Je vais passer rapidement sur le premier, signé Jerry Prosser au scénario (comics Alien ou encore Predator) et Charlie Adlard au dessin (Walking Dead aujourd'hui, est-il besoin de le préciser). Parue en 1994, cette histoire raconte le retour à la vie de Michael Korby, assassiné au cours d'un braquage de voiture sur la route avec sa femme alors qu'ils venaient de se marier depuis peu. 15 ans après, deux corbeaux viennent le tirer des limbes et le ramènent dans le monde des vivants pour qu'il exerce sa terrible vengeance sur les responsables de son meurtre et de celui de sa femme. L'un des deux, Darryl, sort justement de prison après avoir purgé sa peine suite à ce crime, et désire plus que tout refaire sa vie et repartir sur de meilleures bases, entouré de sa famille et de ses amis, voulant à tout prix se racheter. Mais ses projets de rédemption vont tourner court quand Michael surgira de la nuit pour s'en prendre à lui et à son complice, leur apportant la peur et la mort en paiement de leurs actes passés. Une tragédie en trois temps, trois morceaux de vie relatés en parallèle les uns des autres : Michael, Darryl et l'inspecteur de police chargé de cette enquête, qui se retrouvera mêlé au carnage en tentant de protéger son suspect.
J'ai dis que je passais rapidement sur ce premier tome, car selon moi il est d'une médiocrité affligeante et reflète exactement le phénomène dont je parlais dans mon introduction : l'incompréhension crasse par de nouveaux auteurs du concept d'origine et son inévitable déformation. Ici nous n'assistons qu'à un récit brutal, violent, moche et sans réelle profondeur, sans personnages auxquels s'attacher ou s'identifier. Rien. Rien de ce qui faisait la grandeur et la beauté d'une tragédie aussi poignante et douloureusement sentimentale telle que le The Crow d'origine. C'est donc une sacrée déception en ce qui me concerne, en plus je trouve que le dessin de Charlie Adlard est vraiment... pas terrible, pour rester poli, et m'empêche complètement d'entrer dans le récit. C'est une récupération très maladroite et malhabile, essayant même de donner de nouvelles ''origines'' au mythe, mais ne parvenant pas à nous y faire croire. Il en faut pour tous les goûts, c'est sûr, et certains aimeront sûrement cette direction et ces choix de narration, mais pas moi, et surtout pas en comparaison de l’œuvre d'écorché vif de James O'Barr. Un mauvais point donc, et un assez mauvais départ pour cette collection. Voyons maintenant si la suite rattrape cela...


Et là je dirais que l'essai est transformé. Le tome 2, Temps mort, est d'une justesse quasi-parfaite et d'une beauté rappelant agréablement celle de la toute première histoire. Joshua, Amérindien assassiné avec toute sa famille peu après la Guerre Civile américaine, revient 100 ans plus tard parmi les vivants pour traquer les réincarnations des rebelles sudistes en fuite qui prirent sa vie, celles de sa femme et de son fils. Le corbeau lui donne l'occasion de retrouver les descendants de ses sauvages assassins, dans une traque sans merci qui fera naître la peur en leur cœur et permettra également d'empêcher une nouvelle nuit d'horreur de se produire.
La douleur est bien là, enfin, celle qui donne naissance à un récit comme The Crow, la tragédie mêlée de poésie et surtout d'amour, le seul véritable moteur de toute l'histoire. Comment est-il possible que ce second tome soit à ce point meilleur et mieux dans le ton que le premier ? Tout simplement parce que cette fois c'est James O'Barr en personne qui signe le scénario, assisté par John Wagner (Judge Dredd), et que les dessins (toujours en noir et blanc, marque de fabrique de The Crow) sont l’œuvre d'Alex Maleev (Daredevil). Un casting de choix qui sait y faire et ne nous déçoit absolument pas, comment cela aurait-il pu être possible de toute façon sachant que l'auteur d'origine revient aux commandes ! On reconnaît immédiatement son style, sa souffrance et sa beauté d'écriture. Un des signes distinctifs est la présence entre les différents chapitres de morceaux de poèmes ou de légendes tribales, tournant toujours autour du thème de la vengeance, de l'amour et du corbeau, messager de l'au-delà.

Alors, peut-être suis-je un peu dur avec le premier tome. C'est vrai que je ne peux pas être objectif lorsqu'il s'agit de quelque chose touchant à The Crow (et je rappelle que le principe même de l'objectivité veut qu'il soit impossible de l'atteindre, on ne peut que s'en rapprocher), et qu'une déception me reste vraiment en travers de la gorge. Il y a sûrement des qualités que je n'ai pas su apprécier ou voir, dissimulées pour moi derrière les trop grossiers défauts. Mais le fait est que la différence est là : lisez le tome 1, lisez le tome 2, vous la verrez par vous-mêmes assez facilement. D'ailleurs je vous enjoins comme à chaque fois de vous faire votre propre avis et votre propre ressenti de lecture, je ne suis là que pour vous donner le mien, non la vérité absolue, et que jamais je ne serai ''dictateur du bon goût'' comme on dit. Ces goûts et préférences appartiennent à chacun, je n'émets donc ici qu'un simple conseil personnel si l'on peut dire.
Fort heureusement il n'est absolument pas nécessaire de lire le premier tome pour pouvoir ensuite lire le second, chaque histoire est parfaitement unique et indépendante de l'autre. Il n'y a guère pour ma part que l'esprit du collectionneur qui m'oblige à avoir les deux dans ma bibliothèque. Série à suivre et qui je l'espère contiendra dans les prochains tomes davantage d'histoires de l'acabit de Temps mort, avec ou sans James O'Barr.

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

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