Si
vous suivez les articles de ce blog depuis Juin 2014, vous avez du
lire celui sur la série originale The
Crow de
James O'Barr, en Août de la même année ce me semble. Sinon,
bienvenus et prenez le train en marche, tout en tâchant de rattraper
votre retard si possible !
Je
vais vous parler ici des séries dérivées du phénomène The
Crow.
Après l'histoire première, de nombreux auteurs et dessinateurs ont
eux aussi voulu apporter leur pierre à l'édifice en créant de
nouveaux récits autour de cette légende brutale et tragique. C'est
en partie ce qui donne la collection Midnight
Legends,
où l'on retrouve certaines de ces nouvelles histoires. Toutes ne
sont pas de qualité, loin s'en faut, et le moins que l'on puisse
dire c'est que par moments on a surtout l'impression de voir un
mauvais pastiche d'un chef-d'oeuvre globalement incompris par ces
nouveaux auteurs désireux de rendre hommage à leur façon. C'était
le cas notamment pour les second et troisième films de la saga au
cinéma, ainsi que pour la médiocre série-télévisée des années
'90, dont le souvenir s'efface heureusement un peu plus chaque année.
Delcourt nous fait donc paraître depuis un an cette
collection, et voici le moment pour moi de vous parler des deux
premiers tomes, très inégaux.
Je
vais passer rapidement sur le premier, signé Jerry Prosser au
scénario (comics Alien
ou
encore Predator)
et Charlie Adlard au dessin (Walking
Dead aujourd'hui,
est-il besoin de le préciser). Parue en 1994, cette histoire raconte
le retour à la vie de Michael Korby, assassiné au cours d'un
braquage de voiture sur la route avec sa femme alors qu'ils venaient
de se marier depuis peu. 15 ans après, deux corbeaux viennent le
tirer des limbes et le ramènent dans le monde des vivants pour qu'il
exerce sa terrible vengeance sur les responsables de son meurtre et
de celui de sa femme. L'un des deux, Darryl, sort justement de prison
après avoir purgé sa peine suite à ce crime, et désire plus que
tout refaire sa vie et repartir sur de meilleures bases, entouré de
sa famille et de ses amis, voulant à tout prix se racheter. Mais ses
projets de rédemption vont tourner court quand Michael surgira de la
nuit pour s'en prendre à lui et à son complice, leur apportant la
peur et la mort en paiement de leurs actes passés. Une tragédie en
trois temps, trois morceaux de vie relatés en parallèle les uns des
autres : Michael, Darryl et l'inspecteur de police chargé de
cette enquête, qui se retrouvera mêlé au carnage en tentant de
protéger son suspect.
J'ai
dis que je passais rapidement sur ce premier tome, car selon moi il
est d'une médiocrité affligeante et reflète exactement le
phénomène dont je parlais dans mon introduction :
l'incompréhension crasse par de nouveaux auteurs du concept
d'origine et son inévitable déformation. Ici nous n'assistons qu'à
un récit brutal, violent, moche et sans réelle profondeur, sans
personnages auxquels s'attacher ou s'identifier. Rien. Rien de ce qui
faisait la grandeur et la beauté d'une tragédie aussi poignante et
douloureusement sentimentale telle que le The
Crow
d'origine. C'est donc une sacrée déception en ce qui me concerne,
en plus je trouve que le dessin de Charlie Adlard est vraiment... pas
terrible, pour rester poli, et m'empêche complètement d'entrer dans
le récit. C'est une récupération très maladroite et malhabile,
essayant même de donner de nouvelles ''origines'' au mythe, mais ne
parvenant pas à nous y faire croire. Il en faut pour tous les goûts,
c'est sûr, et certains aimeront sûrement cette direction et ces
choix de narration, mais pas moi, et surtout pas en comparaison de
l’œuvre d'écorché vif de James O'Barr. Un mauvais point donc, et
un assez mauvais départ pour cette collection. Voyons maintenant si
la suite rattrape cela...
Et
là je dirais que l'essai est transformé. Le tome 2, Temps
mort,
est d'une justesse quasi-parfaite et d'une beauté rappelant
agréablement celle de la toute première histoire. Joshua,
Amérindien assassiné avec toute sa famille peu après la Guerre
Civile américaine, revient 100 ans plus tard parmi les vivants pour
traquer les réincarnations des rebelles sudistes en fuite qui
prirent sa vie, celles de sa femme et de son fils. Le corbeau lui
donne l'occasion de retrouver les descendants de ses sauvages
assassins, dans une traque sans merci qui fera naître la peur en
leur cœur et permettra également d'empêcher une nouvelle nuit
d'horreur de se produire.
La
douleur est bien là, enfin, celle qui donne naissance à un récit
comme The
Crow,
la tragédie mêlée de poésie et surtout d'amour, le seul véritable
moteur de toute l'histoire. Comment est-il possible que ce second
tome soit à ce point meilleur et mieux dans le ton que le premier ?
Tout simplement parce que cette fois c'est James O'Barr en personne
qui signe le scénario, assisté par John Wagner (Judge
Dredd),
et que les dessins (toujours en noir et blanc, marque de fabrique de
The
Crow)
sont l’œuvre d'Alex Maleev (Daredevil).
Un casting de choix qui sait y faire et ne nous déçoit absolument
pas, comment cela aurait-il pu être possible de toute façon sachant
que l'auteur d'origine revient aux commandes ! On reconnaît
immédiatement son style, sa souffrance et sa beauté d'écriture. Un
des signes distinctifs est la présence entre les différents
chapitres de morceaux de poèmes ou de légendes tribales, tournant
toujours autour du thème de la vengeance, de l'amour et du corbeau,
messager de l'au-delà.
Alors,
peut-être suis-je un peu dur avec le premier tome. C'est vrai que je
ne peux pas être objectif lorsqu'il s'agit de quelque chose touchant
à The
Crow
(et je rappelle que le principe même de l'objectivité veut qu'il
soit impossible de l'atteindre, on ne peut que s'en rapprocher), et
qu'une déception me reste vraiment en travers de la gorge. Il y a
sûrement des qualités que je n'ai pas su apprécier ou voir,
dissimulées pour moi derrière les trop grossiers défauts. Mais le
fait est que la différence est là : lisez le tome 1, lisez le
tome 2, vous la verrez par vous-mêmes assez facilement. D'ailleurs
je vous enjoins comme à chaque fois de vous faire votre propre avis
et votre propre ressenti de lecture, je ne suis là que pour vous
donner le mien, non la vérité absolue, et que jamais je ne serai
''dictateur du bon goût'' comme on dit. Ces goûts et préférences
appartiennent à chacun, je n'émets donc ici qu'un simple conseil
personnel si l'on peut dire.
Fort
heureusement il n'est absolument pas nécessaire de lire le premier
tome pour pouvoir ensuite lire le second, chaque histoire est
parfaitement unique et indépendante de l'autre. Il n'y a guère pour
ma part que l'esprit du collectionneur qui m'oblige à avoir les deux
dans ma bibliothèque. Série à suivre et qui je l'espère
contiendra dans les prochains tomes davantage d'histoires de l'acabit
de Temps
mort,
avec ou sans James O'Barr.
Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et
je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver
bientôt pour un nouvel article !
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