Après
une longue attente pour les fans francophones la voici enfin, la
version française du texte de la pièce de théâtre tirée de
l'univers de Harry Potter, à partir d'une histoire originale de J.
K. Rowling elle-même adaptée par John Tiffany et Jack Thorne.
Déjà,
un premier point à aborder avant toute chose, il s'agit du texte de
la pièce de théâtre tel quel, et non de la pièce en version
romancée comme on aurait pu s'y attendre (du moins comme je m'y
attendais personnellement sans savoir jeté un œil à la version
anglaise, disponible plus tôt). C'est donc vraiment une pièce de
théâtre que l'on aborde ici, et d'emblée cela représente une
première barrière pour la lecture : fan de la saga littéraire,
forte de sept romans, c'est assez difficile de se représenter un
retour dans le giron de Harry Potter sous forme de pièce de théâtre.
C'est davantage une histoire de préférences personnelles que de
réelle mise en forme problématique, mais je sais que je ne suis pas
le seul à avoir eu cette étrange impression de décalage en lisant
le début du livre. Mais passons au résumé maintenant, il est fort
simple :
L'histoire
reprend où l'on en était resté à la fin du septième tome, le
fameux épilogue écrit depuis de nombreuses années à l'avance.
Harry accompagne son second fils, Albus Severus Potter, pour sa
première année à Poudlard et son premier voyage à bord du train
magique, le Poudlard Express. Il s'avère bien vite cependant que le
jeune Albus connaît quelques difficultés à se hisser au niveau de
son illustre paternel : en effet, il se retrouve à Serpentard
et a comme meilleur et seul ami le fils de Drago Malefoy, Scorpius,
dont la rumeur prétend qu'il pourrait être le fils de Voldemort ne
personne. Mais alors que tout est sensé les opposer, les deux amis
vont poursuivre ensemble leur scolarité jusqu'à un certain point de
rupture avec leurs parents, surtout concernant Albus. Devenu distant
à l'égard de Harry, ne parvenant pas à supporter un héritage
aussi lourd, le jeune homme alors entré dans sa quatrième année
envisage, par une suite d'événements bien déterminés, de voler un
Retourneur de Temps au Ministère de la Magie et de l'utiliser pour
revenir dans le passé, à l'époque du Tournoi des Trois Sorciers,
afin de ramener Cédric Diggory à la vie dans leur présent en
l'empêchant d'être tué par Voldemort. Albus et Scorpius vont dès
lors se retrouver embarqués dans une suite d'aventures à travers le
temps, tâchant tantôt de corriger le passé et tantôt de réparer
leurs erreurs, tandis que dans le présent les adultes se lancent à
leur poursuite pour les empêcher de commettre l'irréparable. Car,
comme on le sait bien, modifier un seul petit détail dans le passé
peut avoir d'énormes conséquences dans le présent et l'avenir. Une
leçon que les deux jeunes garçons devront apprendre à la dure,
avant qu'il ne soit trop tard.
Si
le plaisir de retrouver l'univers de Harry Potter est toujours bien
vif et présent, il n'est pas tout à fait intact. Certes ce huitième
volume est officiel et il sert de suite à la saga elle-même (qui
n'en avait pas forcément besoin mais passons), mais l'histoire fait
davantage l'effet d'une fan-fiction assez aboutie plutôt que d'une
vraie histoire officielle. La faute en premier lieu à une assez
mauvaise présentation du temps écoulé, des pans entiers de
l'histoire sont zappés pour nous amener le plus rapidement possible
à la quatrième année d'Albus et de Scorpius et aux événements
liés au Retourneur de Temps. Qu'on se comprenne bien, je ne juge pas
la qualité du travail accompli autour de cette pièce de théâtre
et de tous les efforts des metteurs en scène ainsi que de l'auteur
originelle, mais à la lire comme ça on a surtout l'impression de
passer à côté de quelque chose d'important par moments. En fait,
l'expérience doit être bien plus vibrante, passionnante et surtout
vivante quand elle est faite au théâtre, devant la scène, avec les
acteurs et toute la mise en scène, les décors, les ''effets
spéciaux'', que l'on ne retrouve ici qu'en didascalies assez
appauvries qui ne parviennent pas à nous faire saisir toute
l'ampleur du projet et toute son énergie.
Un
autre mauvais point concernant les personnages, qu'il s'agisse des
anciens comme des nouveaux. Tous ont plutôt l'air creux et assez
différents du souvenir ému que l'on en a gardé à la sortie du
dernier tome, dont on retrouve l'épilogue en ouverture de cette
pièce. Harry, Ron, Hermione, Ginny et Drago tombent un peu à côté
de la plaque par moments, certes ils sont devenus adultes et ont
désormais de nouvelles préoccupations et responsabilités, mais
certains passages nous font dire qu'ils n'ont pas été développés
autant qu'il l'aurait fallu ou du moins qu'on l'aurait voulu. Passons
tout de suite sur le personnage d'Albus Severus Potter, qui ne
suscite malheureusement pas un grand engouement de sympathie (la
faute à pas de chance) pour nous pencher sur le cas de Scorpius
Malefoy, LA vraie réussite de cette œuvre. Ce personnage-ci est
travaillé, profond, on ressent de la sympathie voir une forte
empathie pour lui, c'est véritablement lui qui transporte le lecteur
au cœur des aventures vécues dans cette histoire par les deux amis,
et d'ailleurs les auteurs ne s'y sont pas trompés puisqu'ils ont
pris le soin de le mettre toujours en avant. Qu'il s'agisse ou non du
véritable ''enfant maudit'' du titre, c'est en tout cas celui auquel
on s'attache le plus et qui nous pousse à continuer la lecture pour
en savoir davantage.
Qu'on
se comprenne bien, mon avis général sur cette pièce de théâtre
est bon, voir plutôt bon. Le plaisir de retrouver Harry et ses amis
et compagnons, de voir les familles évoluer et se développer, de
retrouver tout l'univers des sorciers de J. K. Rowling, bref tout
cela c'est du bon, c'est même pour le mieux quand on songe à
certains personnages comme Scorpius qui nous accrochent immédiatement
et nous entraînent derrière eux comme leurs parents l'ont fait en
leur temps. Mais les thématiques ont changé, les intrigues sont
plus complexes, sombres et adultes, c'est le mot juste. Il ne s'agit
pas tant du retour potentiel de Cedric à la vie que de la relation
compliquée et conflictuelle qui unit Harry et son fils, pareillement
pour Drago et Scorpius. Le thème principal est bien la difficulté à
être l'enfant d'un sorcier aussi connu et reconnu historiquement, le
poids des rumeurs et de l'héritage, bref la rupture entre deux
générations si on veut. Générations qui vont apprendre petit à
petit à se rapprocher et à faire des concessions, à communiquer et
à échanger, à établir une certaine complicité. Ce n'est pas tant
Harry Potter et l'enfant maudit
que Harry Potter et l'apprentissage d'être père, de nouer des liens
forts avec son fils malgré le lourd héritage familial et surmonter
les épreuves de la vie ensemble, l'un pour l'autre.
Beaucoup
d'idées à traiter, à assimiler, beaucoup d'éléments à suivre et
à découvrir. Beaucoup de nouveaux personnages, une histoire
originale et une intrigue à plusieurs branches et dimensions, bref
tout ce qu'il faut pour faire une bonne histoire sur le papier. Mais
ça ne suffit pas forcément pour faire un bon Harry Potter, il y a
également une certaine magie à mettre en œuvre qui se retrouve ici
au travers des descriptions de ce qui se passe dans le théâtre
durant le déroulement de la pièce, mais que nous lecteurs ne
pouvons pas vivre pleinement et ça en devient assez frustrant.
Je
ne déconseille pas cette lecture, elle ravira certainement de très
nombreux fans de la saga et nouveaux lecteurs bienvenus, mais il faut
s'attendre à une petite pointe de déception malgré tout, à cette
légère imperfection qui en fait une histoire à part, à la fois
plus adulte et construite et pourtant terriblement simpliste par
endroits, voir naïve. A lire de toute façon, c'est rapide et
efficace et ça ne demande pas beaucoup d'efforts !
Sur
ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite
une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un
nouvel article !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire