« Qu'est-ce
qu'une ''victoire'' ? »
C'est
par ces quelques mots que débute ce 15ème tome du manga Médaka-Box,
paru le 22 Août dernier. Un tome qui une fois encore surprend son
lectorat en prenant le contre-pied total des attentes et se permet
une nouvelle mise en abîme, décrivant cette fois les difficultés
et les enjeux d'un héros victorieux, posant tout simplement cette
question : qu'est-ce qu'une ''victoire'' ? Et en effet,
qu'est-ce donc ? L'aboutissement d'une histoire ? Celui
d'une quête ? La finalité du héros du récit et de ses
compagnons ? Ou bien n'est-ce qu'une étape parmi d'autres sur
un parcours bien plus long et complexe ? Lorsqu'on écrit une
histoire sur un laps de temps assez long, doit-on convenir que la
victoire du héros sur ses opposants doit marquer le point final du
récit, ou bien ne servir qu'à l'arrivée dans une nouvelle phase ?
Tandis que Médaka paraît de plus en plus isolée, à
la veille de l'affrontement voulu par Ajimu, son ancien compagnon
Zenkichi poursuit son entraînement intensif pour tenter de
comprendre la vraie nature d'un héros, afin de supplanter son amie
de toujours à ce titre au sein de l'histoire. Un entraînement qui
le poussera à de profondes réflexions personnelles, de grandes
remises en question qui lui permettront de comprendre enfin la vérité
sur son attachement sans failles à Médaka depuis tant d'années...
une révélation-choc qui aura pour effet de totalement changer la
stratégie du futur héros, ainsi que la direction du manga
lui-même ! Et pendant ce temps bien entendu, Kumagawa
entreprend de saboter toute l'opération en réunissant autour de lui
l'ensemble des présidents de comités de l'établissement dans un
jeu de hasard qui devra décider de l'avenir : s'ils perdent,
les présidents devront suivre les consignes de Kumagawa et prendre
position dans l'affrontement entre Médaka et Zenkichi, chose qu'en
tant que personnages secondaires ils ne veulent absolument pas. En
revanche, s'ils remportent la victoire, c'est Kumagawa et l'ensemble
de son Union des Fétichistes qui devront disparaître et laisser
l'histoire suivre son cours normal. Que les jeux commencent !
Encore
une fois Médaka-Box
prouve que derrière le rideau d'un shonen classique sans surprises
se cache en réalité un récit plein de réflexions sur la nature
profonde du milieu du manga au Japon et sur la situation des auteurs.
Ici nous retrouvons le double, voir triple ton de narration que nous
avions déjà dans le tome précédent. Ici, il sera question de la
place des auteurs vis à vis de leur œuvre et du pouvoir qu'ils
conservent dessus une fois qu'elle est publiée et suivie par de
nombreux lecteurs, mais aussi de la nécessité parfois de changer
radicalement la direction d'un récit (passer d'un shonen de combats
improbables et spectaculaires à une comédie romantique un brin
déjantée) pour séduire un nouveau lectorat et renouveler les
idées. Et comme toujours le personnage de Kumagawa, comme celui
d'Ajimu désormais, servent à briser le quatrième mur et à
intégrer le lecteur dans cette réflexion tout en suivant la fiction
elle-même, dans le même temps. Un manga de qualité qui tranche
agréablement avec le reste des parutions shonen récentes, et qui
fait réfléchir. Un exploit en soi !
Bon... inutile de préciser que ce tome confirme ce que
l'on pouvait déjà observer dès les deux ou trois précédents :
la fameuse Médaka-Box, la boîte aux idées, a complètement disparu
de l'histoire dont elle était censée être le cœur au départ.
Preuve s'il en est de l'évolution d'une série de ses débuts à sa
fin, et du développement considérable qu'elle peut connaître grâce
à ses lecteurs mais aussi à son éditeur et sa volonté de brasser
plus large. Gardez à l'esprit que dans ce manga, depuis un bon
moment, tout élément cache plusieurs sens de lecture !
Pour
finir sur la réflexion principale de ce tome, à savoir « qu'est-ce
qu'une ''victoire'' ? », on peut aussi constater que les
auteurs, à travers le personnage d'Ajimu et ses motivations, donnent
cette réponse : la victoire, c'est la fin. La fin de
l'histoire, la fin de l'écriture, le point où le lecteur s'arrête
et où il se considère satisfait. La fin du manga, qui n'a déjà
que trop duré et qui doit toucher au dénouement dans les tomes à
venir sous peine de perdre son lectorat et de s'égarer dans les
intrigues secondaires. Un message que certaines grandes séries
feraient mieux d'entendre, de nos jours, comme Bleach
ou
Naruto
en leur temps, quand il le fallait.
Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et
je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver
bientôt pour un nouvel article !
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