samedi 28 novembre 2020

Shahrazad (Alayone Comics - Novembre 2020)


Un navire anachronique fait route au cœur de la Mer du Diable, un territoire maudit où plus d’un y a perdu la vie, et parfois davantage. A bord du Cyclope, un équipage uni et un officier tenace, dont on ne connaît que le nom : Shahrazad. Qui est-elle ? D’où vient-elle ? Quelle est son histoire ?

 

Tout cela, nous ne le saurons pas aujourd’hui. Aujourd’hui est consacré à l’aventure présente, la découverte d’une île mystérieuse au cœur d’une tempête déchaînée, des pertes tragiques et des rencontres sauvages venues d’un autre temps. Shahrazad échoue dans l’arène du terrible dieu Janus, seigneur des commencements et des dénouements, et elle devra défendre chèrement sa vie face au maître des destinées et à ses hordes de combattants.

 

Tandis que ce qu’il reste de son équipage fait route pour la sauver, elle lutte sans merci et prend bien des vies. Et, quelque part dans son esprit aussi insondable que le passé et l’avenir de cette créature qui le fascine, Janus éprouve un sentiment nouveau, inconnu lui aussi : le doute. Comment cette femme ayant traversé bien des époques, survécu à bien des âges, affronté bien des périples, peut-elle lui tenir tête ? Pourquoi son avenir n’est-il pas aussi clair que son lointain passé ? Se pourrait-il que celle qui dit se nommer Shahrazad soit bien plus qu’elle ne le paraisse ?

 

Le dieu dédoublé déteste les surprises, même s’il en a longtemps attendu. Son propre avenir est désormais en jeu, en danger, alors que même les éléments se retournent contre lui et que son pouvoir le trahi. La tourmente le gagne, et dans un ultime sursaut de rage il réalise qui se tient devant lui, qui est véritablement son adversaire… tour à tour esclave, princesse, reine, voyageuse, conteuse, amante, combattante… Shahrazad est un mystère vivant depuis bien trop longtemps. Et Janus ne peut le supporter. Qui aura raison de l’autre, au bout du compte ? Et saurons-nous jamais le fin mot de toute cette histoire qui va se perdre jusqu’à l’aube des temps ? Le récit de la vie de Shahrazad ne fait que commencer.

 

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On va tout de suite parler des points forts de cette histoire, de cet album, parce qu’il y en a des tas ! Déjà c’est une véritable petite pépite de l’univers indépendants des comics US, qu’Alayone Comics est parvenue à nous dénicher et à éditer chez nous pour mon plus grand plaisir je l’admets volontiers ! Les couvertures les plus connues sont de J. Scott Campbell, excusez du peu, et je dois dire que celle que j’ai choisi parmi les quatre disponibles à la vente est particulièrement séduisante, l’artiste ayant fait de gros gros efforts pour gommer ses propres tics et imperfections, nous livrant ainsi une illustration somptueuse dont la beauté est encore rehaussée d’un cran par les couleurs chaudes de Nei Ruffino.

 

A l’intérieur, le lecteur émerveillé découvrira un déluge de cases magnifiques et très détaillées, s’articulant autour d’un récit multiple qui couvre bien trop de terrain pour que l’on puisse se lancer dans un résumé exhaustif. Les auteurs, Tom et Kim Hutchinson, Kari et Aaron Castor et Brett Cate, nous régalent vraiment avec une histoire complexe, tissée sur plusieurs plans et défilant autant au rythme de l’action présente que des souvenirs épars de Shahrazad, un mystère vivant qui ne se dévoilera jamais vraiment. Pour le moment du moins. J’ai apprécié cette écriture toute particulière, et j’en redemande encore !

 

Venons-en à la vraie perle au milieu de cette coquille nacrée : les dessins. Signés Mike Krome, c’est un ravissement à chaque page, chaque case, chaque moment de lecture et de plongée dans ce style unique et si plein de sensualité et de charme tout comme de violence et de rage, et très détaillé. L’artiste livre une véritable performance que bien peu en vérité sauront rattraper ou même égaler, on est à un niveau frôlant la perfection et encore c’est peu de le dire !

 

Le point faible, c’est qu’il s’agit d’une histoire qui n’a ni début officiel ni fin, c’est un récit parmi bien d’autres à venir sur un personnage qui a vécu une très longue existence bien remplie. Cela pourrait décourager les lecteurs les plus frugaux, même si je pense que ça ne fait jamais de mal de se lancer sans filet parfois. Toujours est-il qu’au sein d’une industrie très calibrée, ça peut déstabiliser et je le comprends. De même, concernant plus particulièrement l’édition française d’Alayone, il eut été bon je pense d’augmenter un chouia la taille de la police d’écriture, mais c’est vraiment pour chipoter. Tout le reste est parfait ou peu s’en faut, on a même droit à une galerie complète de couvertures en fin d’album, de quoi s’émerveiller devant les magnifiques réalisations des différents dessinateurs ayant travaillé sur ce projet fou.

 

Si tout va bien, Shahrazad devrait connaître une suite, voire plusieurs je l’espère, et je compte bien qu’Alayone Comics soit au rendez-vous encore une fois avec le même souci de qualité que pour ce premier tome. Aucun regret de m’être lancé dans l’aventure, et je souhaite que ce soit un succès à la hauteur des attentes afin d’encourager ce petit éditeur qui se bouge ! A l’heure actuelle il reste peut-être un tiers des exemplaires imprimés à vendre et trois couvertures disponibles sur les quatre de départ, vous pouvez donc vous aussi rejoindre la partie quand ça vous chante, peut-être en vous faisant un très beau cadeau pour Noël qui sait ! C’est mon coup-de-cœur indépendant du mois de Novembre en tout cas, et je ne peux que vous conseiller de vous jeter dessus tant qu’il en reste, si vous n’avez pas peur de lire quelque chose d’atypique et sortant du lot !

 

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

 

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