Une année s'achève, une autre commence tout juste. Et avec le nouveau cycle des saisons, les attaques des Pirates rouge se font plus pressantes, plus intenses sur les côtes du royaume des Six-Duchés. Mais cette fois-ci pourtant, un espoir se fait lui aussi chaque jour plus pressant : les navires de guerre du roi-servant Vérité sont presque tous achevés, certains sont déjà sortis en mer et protègent le littoral du royaume, et lors des quelques escarmouches en mer avec l'ennemi ce sont des victoires rassurantes qui sont présentées au peuple reconnaissant.
Mais bien vite, cela ne suffit plus. On murmure que les Pirates ont pris pied sur les Îles Proches, au Nord, et que le duc de Béarns leur fait bon accueil en échange de l'immunité lors de leurs attaques. Des rumeurs infondées mais qui courent bien vite parmi la populace et, surtout, qui sont largement répandues par les fidèles du prince Royal, toujours en quête quant à lui d'un nouveau moyen de s'emparer du pouvoir.
Alors que les Six-Duchés se déchirent autour de la question des dépenses à fournir pour poursuivre la protection des côtes et la fabrication des coûteux navires de guerre, le roi-servant Vérité ne peut que constater l'inefficacité de sa méthode et doit faire un choix douloureux et très risqué : s'en aller tel le légendaire roi Sagesse il y a bien longtemps, quérir l'aide des Anciens, ces divinités résidant au-delà des Montagnes et du Désert des Pluies. Un voyage dont fort peu sont revenus, un voyage qui pourrait bien tout bouleverser pour le royaume.
Vérité s'engage donc auprès de son père le roi Subtil à ramener l'aide des Anciens selon l'antique promesse jadis échangée, et part pour son périple avec une maigre escorte, espérant revenir à temps avec de bonnes nouvelles. Royal s'empresse de revendiquer le pouvoir laissé vacant par son aîné, ce que son père a le plus grand mal à lui refuser étant donné son propre état de santé, qui ne fait que se détériorer. Subtil n'est plus que l'ombre de lui-même, une ombre de roi qui a cessé de régner dans les faits depuis un certain temps, mais à qui Fitz reste lié malgré tout par son engagement et son honneur.
Et tandis que Vérité est parti au loin à l'Ouest, à Castelcerf le prince Royal organise de sublimes festivités pour ses proches et fidèles, alors que les cordons de la bourse sont selon lui bien trop serrés pour se permettre de financer de nouveaux navires. Les Duchés de l'Intérieur, qui sont toujours restés loyaux à la branche maternelle de Royal, profitent de ses largesses tandis que les côtes sont ravagées par les Pirates et que la reine-servante Kettricken elle-même doit se lancer à l'assaut avec ses gardes pour rallier le peuple et lui inspirer de nouveau espoir.
Quant à Fitz, il est partagé entre son serment de loyauté envers le vieux roi et les observations qu'il ne peut s'empêcher de faire quant au relâchement général de cette loyauté chez d'autres puissants du royaume. Tenu par sa promesse de ne jamais s'en prendre à la personne de Royal, Fitz est bien obligé de ronger son frein en attendant que le mécréant se trahisse tout seul, mais le prince est fourbe et ses propres services de renseignements sont d'une efficacité à toute épreuve. Bientôt, il sera temps de remplacer le roi mourant, et de faire taire pour de bon celles et ceux qui espèrent encore le retour de Vérité sur le trône. Même Umbre se révèle impuissant contre tant de duplicité, et l'assassin du roi ne peut que tenter de réparer de son mieux avec l'aide de Kettricken les liens distendus entre les Duchés.
Soudain, tout se précipite : Burrich, qui escortait Vérité durant son voyage, revient sévèrement blessé au château et demande à voir le roi aussitôt. Vérité serait tombé dans une embuscade dont il se serait apparemment tiré de justesse, là-bas dans les Duchés Intérieurs. Sans doute des brigands lui répond-on... et c'est cet instant de faiblesse que choisit le prince Royal pour frapper un grand coup. Castelcerf resté sans nouvelles de son roi-servant légitime, Royal annonce le trépas de son aîné et sa volonté de prendre sa suite en tant que souverain. Fitz et Umbre, aux abois, mettent alors un plan de la dernière chance en action avec l'aide de Kettricken : faire sortir le roi et la reine-servante du château en toute discrétion durant la cérémonie de couronnement de Royal, et s'enfuir au loin en espérant soit rejoindre Vérité soit trouver refuge dans les Montagnes en l'attendant.
Mais là encore, Royal semble avoir plusieurs coups d'avance et n'hésite désormais plus à tourmenter son pauvre père pour obtenir les réponses qu'il lui faut afin de dénoncer un complot contre sa personne et faire arrêter et destituer tous les traîtres potentiels ! Un traitement dont le roi Subtil ne se relèvera malheureusement pas. Libéré de son serment, Fitz est approché par certains ducs pour prendre le contrôle de Castelcerf en l'absence de Royal quand ce-dernier décidera de déporter son règne vers l'Intérieur, mais c'est encore un échec cuisant et le nouveau roi-servant a tôt fait de désarmer toute velléité de s'en prendre à lui.
Désormais considéré comme traître, Fitz est emprisonné tandis que Kettricken parvient à prendre la fuite avec l'aide d'Umbre et de Burrich. Le Vif, cette magie animale qui coule dans ses veines, condamne Fitz à la pendaison malgré son statut de bâtard de sang royal, et l'assassin n'a que peu de chances d'échapper à sa peine. Alors, perdu pour perdu, Fitz décide de tout faire pour emporter le plus de conjurés avec lui, afin de venger le roi Subtil et la mémoire de Vérité, toujours vivant malgré les bruits rapportés par les fidèles de Royal. Si rien n'est fait, ce pourrait bien être la fin des Six-Duchés tels qu'on les connaît...
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Et la fameuse Nef du Crépuscule dans tout ça me direz-vous ? Si c'est bien du mystérieux navire blanc apparaissant dans les brumes dont il s'agit, on ne le voit que deux fois en tout dans ce roman, troisième tome de la saga, et le peu que l'on sait sur sa légende ne permet pas de confirmer qu'il s'agit d'une réelle menace ou bien d'une vision d'Art ou du Vif de Fitz lors des assauts contre les Pirates.
Le cœur de ce tome c'est bel et bien l'accession au pouvoir du prince Royal, profitant de l'absence de son aîné pour le faire déclarer mort et de la maladie de leur père pour s'emparer de la couronne. Fitz y perdra beaucoup, à commencer par l'amour de sa jeune vie, Molly, qui se détourne de lui pour suivre l'exode ordonné par Royal vers l'Intérieur. Castelcerf et les duchés de la côte sont délaissés et livrés à eux-mêmes face aux Pirates qui ne tarderont pas à revenir après ce fatidique nouvel Hiver.
Robin Hobb nous dépeint ici une situation vraiment désespérée où les chances jouent toutes contre notre héros et ses alliés, les soutiens officiels se retournant comme des gants et les vilains secrets de chacun dévoilés au grand jour par un manipulateur expert dans son domaine. Rien ne semble pouvoir être épargné à notre jeune assassin royal, qui va devoir endurer lui aussi bien des tourments avant de connaître la libération de l'âme, si on la lui accorde jamais.
Aussitôt après la fin de cette lecture j'ai foncé chez mon libraire me procurer les tomes suivants pour tenter d'étancher ma curiosité mais d'après les résumés il semble que ce nouveau statu-quo va durer encore un bon moment, je me demande bien par quelle magie mais je le découvrirai en lisant bien évidemment ! L'autrice sait exactement ce qu'elle fait, et partout on peut constater si l'on est bien attentif de petits signes qui placés çà et là permettent de faire avancer l'intrigue à pas de géant ou au contraire de ralentir les événements juste ce qu'il faut pour obtenir le résultat parfait auprès du lectorat.
Le suspens est à son comble et je vois mal comment les choses pourraient empirer, mais Robin Hobb est une narratrice avisée qui saura toujours nous démontrer avec quel talent elle parvient à tourmenter ses personnages principaux tout en leur offrant un léger espoir de s'en sortir au bout du compte. J'ai particulièrement apprécié et adoré le passage sur la cérémonie de couronnement de Royal et les différents mauvais augures qui s'y sont rapportés grâce à Umbre et aussi au Fou, chacun orchestrant à sa manière une petite débâcle pour l'ego du nouveau souverain histoire de dire qu'il remporte peut-être le prix mais que la victoire morale lui échappera toujours.
Quant au désormais roi Royal, je n'attends que de le voir chuter de son piédestal usurpé, même si cela devait encore prendre trois autres tomes pour y parvenir ! Rarement j'ai autant détesté un personnage d'antagoniste dans une saga de fantasy, d'ordinaire je les apprécie ou je me prends même d'affection pour certains qui savent révéler un genre de noblesse intérieure, mais là rien ne sauve cet affreux et malsain comploteur à mes yeux. Le simple désarroi de feu le roi Subtil en réalisant jusqu'où est prêt à aller son fils préféré pour s'emparer de son trône me suffit à espérer que Royal obtiendra un jour la monnaie de sa pièce, avec les intérêts si possible !
Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

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