dimanche 30 novembre 2014

Ludwig Fantasy tome 1 (Tonkam - Novembre 2014)


La reine du shojo gothique est de retour avec la nouvelle et seconde partie d'une de ses séries les plus emblématiques et passionnantes, j'ai nommé Ludwig Fantasy, faisant ainsi suite aux quatre tomes parus lors de la décennie précédente de Ludwig Revolution et dont la fin nous laissait sur une immense ouverture. C'est donc avec un tout aussi immense plaisir que l'on peut désormais retrouver, toujours chez Tonkam dans une magnifique édition, les aventures débridées du prince Ludwig parti à la recherche du grand amour au sein du monde des contes de fées, revus et corrigés par l'auteur à l'humour des plus aiguisés !

Après avoir parcouru de fond en combles le continent de Grimm, dont il est originaire, et sans avoir trouvé le grand amour tant recherché, Ludwig décide de prendre la mer et met le cap sur une destination inconnue, toujours accompagné dans son voyage par son fidèle valet Wilhelm un rien victime de son maître et par la sorcière sado-masochiste Dorothéa, toujours déterminée à endurer les supplices les plus vils de la part du prince. Après une série de naufrages plus ou moins accidentels après avoir eu la bonne idée de confier la barre à Ludwig, les trois compagnons font escale sur le continent d'Andersen, où ils se retrouvent d'emblée impliqué dans une enquête au sein d'un royaume au bord de la mer, où le jeune prince se dit visité par une mystérieuse créature marine chaque nuit, et où une servante muette mais non discrète fait tourner son monde en bourrique. Puis il sera temps de faire route vers un petit archipel isolé de tout, pour rencontrer le roi Mikado et tenter de lui obtenir les faveurs et la main de celle que l'on appelle Princesse Kaguya, et dont la beauté est réputée dans tout le pays, pour le plus grand malheur de ses prétendants.

Un excellent nouveau départ pour les aventures perverses et parfaitement égoïstes de Ludwig, et de très bonnes retrouvailles pour les lecteurs de la première heure qui attendaient depuis des années sans trop y croire une suite à Revolution. Kaori Yuki nous fait le plaisir de nous entraîner de nouveau dans sa vision des contes de fées, si particulière et unique en son genre, rafraîchissante et délicieusement irrévérencieuse mais en même temps assez fidèle aux récits originels mine de rien (pour preuve, la documentation fournie par l'auteur et son éditeur afin de faire connaître ces contes aux lecteurs, hors versions Disney). C'est ainsi que l'on revisite avec humour et intérêt La Petite Sirène ou encore Le Conte du Coupeur de Bambous. Oui certes, nous débutons sur le continent d'Andersen mais force est de constater que nous aurons plutôt un fatras d'histoires toutes origines confondues, ce qui n'est pas pour me déplaire non plus ça change du cadre uniquement occidental pour une fois et nous permet, à nous aussi, de découvrir de nouveaux pans de la culture extrême-orientale.
Le dessin est magnifique, comme d'habitude avec Kaori Yuki, le style gothique des décors ainsi que des personnages (vêtements et attitudes) reste fidèle à ce que l'on connaît déjà venant d'elle, un très grand soucis du détail et de la diversité, les personnages sont caractérisés à merveille et donnent l'impression qu'ils nous ont simplement quitté la veille, alors que nous avons du patienter sans y croire pendant plusieurs années pour les revoir. Une lecture facile et très intéressante, amusante et intrigante, en un mot plaisante. Et une très agréable surprise que ces retrouvailles avec Ludwig et ses compagnons, que l'on espérait plus ! Vivement la suite à présent, sautez dessus n'hésitez pas et pour celles et ceux qui prendraient le train en marche, bienvenus et accrochez-vous bien à vos souvenirs de votre enfance bercée par Disney, vous risquez de vous sentir un peu malmenés !

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

mercredi 26 novembre 2014

Nightwing tome 4 - Sweet Home Chicago (Urban Comics - Août 2014)


Quatrième tome de la série Nightwing toujours signée Kyle Higgins au scénario mais avec Brett Booth au dessin, pour le plus grand plaisir des yeux. Paru en Août dernier, ce récit prend place juste après les dramatiques conséquences morales de l'arc Le deuil de la famille ayant touché toutes les séries autour de Batman et de ses alliés. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il s'agit d'un nouveau départ pour Nightwing et d'un grand bol d'air frais et neuf des plus agréables !

Après les agissements du Joker, la confiance entre les alliés de Batman et leur mentor est brisée, au moins en partie. Beaucoup ressentent alors le besoin de s'éloigner du Chevalier Noir pour réfléchir à leur avenir et à ce que le Clown Prince du Crime leur a à chacun révélé en secret. Aussi, lorsque Dick Grayson entend parler, par son amie Sonia Branch, de la présence du mafieux Tony Zucco à Chicago (l'assassin de ses parents lors du tristement célèbre accident au Cirque Haly), il saisit l'occasion au vol et quitte Gotham City pour se rendre à Chicago mener l'enquête et tenter d'attraper une bonne fois pour toutes le criminel en exil, et de le livrer à la justice pour enfin tirer un trait sur son passé. Nightwing découvre alors une ville traumatisée par ses ''masques'' et leur assassinat massif il y a quelques années de cela, une ville qui accueille assez violemment les quelques nouveaux héros qui voudraient y exercer leur juste cause, et au sein de laquelle sévit depuis peu un mystérieux cyber-justicier se faisant appeler Le Farceur, entreprenant de révéler aux citoyens de la ville le vrai visage de leur maire et de sa campagne, s'en prenant de façon très agressive aux criminels et se posant comme un héros du peuple. Malgré cela, Nightwing va réussir à trouver ses marques à Chicago et à rapidement se faire une place dans cette atmosphère cruelle et froide, alors que le Farceur sera bientôt le cadet de ses soucis et que la traque du meurtrier de ses parents prend un tour beaucoup plus politisé que prévu. Les criminels de la ville vont bientôt apprendre que les règles de Gotham s'appliquent aussi pour eux à Chicago, et qu'ils ne seront plus à l'abri du héros solitaire qui compte bien nettoyer son nouveau foyer, quitte à s'attirer les foudres d'individus hauts placés et responsables de la disparition des ''masques'' auparavant...

Un excellent tome une fois encore, pour une série qui ne déçoit jamais son lectorat et sait continuellement nous entraîner vers le haut, avec un savant dosage d'action, de noirceur et de sérieux mais aussi beaucoup d'humour et de lumière, Dick Grayson n'étant pas Bruce Wayne. Eddy Barrows se fait remplacer par Brett Booth et je pense que la série y gagne vraiment beaucoup au change, non pas que Barrows soit un mauvais dessinateur, au contraire, mais il avait eu tendance dans les chapitres précédents à baisser un peu la qualité de son travail, tandis qu'ici nous nous retrouvons avec un graphisme très agréable et fluide, lisible, absolument cohérent d'une case à l'autre, et aux couleurs et au découpage captivants. Aucun défaut selon moi, tout est dit dans ce début de nouveau statu-quo pour le personnage, l'histoire est traitée dans son entièreté et nous sommes prêts à passer à la suite au prochain tome. Une série de grande qualité une fois de plus parmi toutes celles composant les New52 de DC Comics, il est d'autant plus dommage qu'elle se soit arrêtée en VO (n'ayez crainte il nous reste encore de la marge chez nous avant de voir la fin) même si c'est justifié par ce qui se passe lors des events principaux de l'éditeur.
En bref une lecture facile, reposante, amusante et captivante, le tout pour un prix correct et sans prise de tête, que du plaisir je vous dis !

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

dimanche 23 novembre 2014

Succubes tome 4 - Messaline (Thomas Mosdi & Marco Dominici - Soleil - Mars 2014)


Et le voici enfin, le quatrième et dernier tome (actuellement) de la bande-dessinée Succubes de Thomas Mosdi. Ici le dessinateur change une nouvelle fois, c'est donc à Marco Dominici que revient la lourde tâche de parvenir à restituer l'ambiance et l'atmosphère si particulières d'une Rome Impériale lors des dernières belles années de la Première Dynastie.

An 48 après Jésus-Christ. Il est de notoriété publique que l'Empereur Claude est un faible, vieillard sur le déclin, et que le véritable pouvoir est entre les mains de son impétueuse épouse, Messaline, mère de ses enfants. Ce que l'on sait moins, c'est que l'Impératrice appartient en secret à l'ordre des Filles de Lilith et a été chargée par ces dernières d'utiliser le pouvoir dont elle dispose pour éliminer les menaces à l'encontre des membres de l'ordre, ainsi que de tout faire pour que sa juste cause en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes puisse un jour se réaliser durablement. Malheureusement, Messaline est une femme aux appétits brutaux et insatiables, et dont la morale douteuse constitue une entrave aux projets de l'ordre. Cependant, de part la position qu'elle occupe, elle n'en demeure pas moins l'atout le plus précieux et la grande prêtresse est assez réticente à l'idée de devoir se débarrasser de l'Impératrice avant qu'elle ne trahisse leur cause, aveuglée par sa propre soif de pouvoir et de luxure. En cela, Messaline ne diffère pas tellement des ennemis des Filles de Lilith, qui commencent d'ailleurs enfin à se rassembler et à s'organiser pour détruire ce culte de femmes qu'ils nomment Succubes. La Confrérie des Loups veille dans l'ombre et attend le premier signe de faiblesse de ses ennemies pour frapper et porter un coup fatal. L'occasion se présente lorsque Messaline s'embarque dans une tentative de coup d'état, alors que Claude se trouve éloigné de Rome elle choisit de divorcer publiquement et d'épouser un jeune sénateur plein d'avenir, rassemblant autour d'eux tout ce que la cité compte d'opposants au pouvoir impérial et de nostalgiques de l'ancienne République. La guerre de l'ombre fait rage entre les partisans des deux causes, les Filles de Lilith et la Confrérie des Loups, et nombreuses seront les victimes, tandis que Rome pourrait bien connaître ses dernières années de faste, alors que la tempête se rapproche dangereusement dans tous les esprits. Et au milieu de tout cela, une femme, dont l'envie de vivre et de profiter pleinement de tous les aspects de la vie pourrait mettre en péril des millénaires de lutte secrète pour une meilleure société, pour un monde plus juste. Pour les Filles de Lilith, ce sera le premier grand revers de leur histoire, qui leur sera presque mortel. Le salut et l'espoir viendront de la folie des hommes et de leur soif de vengeance et de pouvoir, en attendant que le monde change suffisamment pour que la cause des Succubes puisse alors refaire surface.

Ce tome m'a moins plu que les précédents, notamment parce qu'il traite assez crûment de la sexualité débridée de l'Impératrice Messaline. Cependant il y a énormément de points intéressants qui y sont traités, en premier lieu la face sombre de l'ordre des Filles de Lilith est pour la première fois représentée concrètement par une de ses agents, et ce que l'on pensait être une cause juste et immaculée se teinte alors de sombres nuances de gris et de noir. Thomas Mosdi prend même la peine de faire un petit topo historique à la fin du tome et de nous annoncer l'avenir de Rome après la disparition de Messaline et le règne de Claude, en nous introduisant les heures terribles de celui de Néron et de la fin de la Première Dynastie. C'est le premier véritable coup dur pour les Filles de Lilith, mais l'on se doute qu'elles sauront s'en relever par la suite et que tout espoir n'est pas encore perdu.
Concernant le dessin, il semble qu'aucun autre artiste que Marco Dominici n'aurait été mieux placé pour retranscrire à ce point la beauté et la diversité de cette Rome des premiers temps de l'Empire, où le faste le dispute au mystère des intrigues et de la décadence. Car il est aussi question de cela, le déclin lent et progressif d'une civilisation qui jusqu'ici incarnait ce qu'il pouvait y avoir de meilleur dans ce monde ancien et dangereux, à l'aube du progrès mais encore terriblement brutal. Messaline incarne tout à la fois l'héroïne et l'antagoniste principales de ce récit, déchirée entre sa condition de femme et son appartenance à Lilith, et entre son solide et inépuisable appétit pour la vie, le sexe, le pouvoir. Rien ne semble pouvoir arrêter l'Impératrice qui s'accroche de toutes ses forces à tout ce dont elle peut profiter, mais qui n'oublie pas pour autant d'où elle est issue et quels sont les risques qui pèsent sur elle. Image vivante de la décadence, en somme, qui préfigure de ce que deviendra Rome dans quelques siècles. Le style de Dominici est toujours assez réaliste et très similaire à ceux des deux dessinateurs précédents, on retrouve encore une fois ce soucis de préserver une certaine cohérence dans la représentation et un véritable effort pour coller le plus possible à ce qui a déjà été fait et illustré, tout en apportant sa touche personnelle au travers des décors et des styles des différents lieux et personnages. Vivement à présent le cinquième tome pour découvrir une toute nouvelle époque et peut-être le renouveau des Filles de Lilith et leur revanche sur les Loups, en gardant désormais à l'esprit que tout n'est pas noir ou blanc et que les deux camps comptent nombre de contradictions internes. Puisque l'on vient de traiter un personnage historique aussi ambigu et important que Messaline, après la vertueuse et héroïque Eanna, j'attends volontiers une autre de ces Impératrices farouches de légende telles que Jézabel ou Zoé !

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

mercredi 19 novembre 2014

Justice League tome 4 - La Ligue de Justice d'Amérique (Urban Comics - Juin 2014)


Après un troisième tome consacré à l'événement magistral que fut Le Trône d'Atlantide, Urban nous offre un tome 4 nous présentant les premiers numéros de la série Justice League of America, regroupée avec sa grande sœur pour des raisons assez logiques en termes d'arguments de vente et de place disponible dans le catalogue. Cette nouvelle série démarre un peu en parallèle du tome 3 de la Ligue de Justice que l'on connaît, et nous fait découvrir la réaction du gouvernement Américain devant l'apparition de ces êtres à pouvoirs qui peuvent être capables de très bonnes comme de très mauvaises choses... le tout chapeauté par Geoff Johns l'éternel et David Finch l'immense artiste au dessin.

L'A.R.G.U.S., l'agence para-militaire chargée d'encadrer et de surveiller les êtres surhumains tels que les membres de la Ligue de Justice, envisage depuis quelques temps de former et diriger sa propre équipe de super-héros afin d'avoir une force toujours à disposition sur le territoire en cas de besoin et de danger. Du moins est-ce la raison officielle, car le véritable motif est tout autre : il s'agit de rassembler une équipe qui, le cas échéant, serait à même de tenir tête voir de vaincre les membres de la Ligue de Justice au complet, si jamais ils devenaient une menace pour les États-Unis et pour le reste du monde. Mais on ne trouve pas des êtres du niveau tant physique que moral de Superman, Batman ou Wonder Woman, aussi va-t-il falloir piocher dans les cas ''à problèmes'' listés par l'agence au fil du temps et de ses enquêtes. Dangereux, psychotiques, implacables, peu sûrs, voir totalement inexpérimentés pour certains, c'est ainsi que ces nouveaux héros sont rassemblés sous le commandement du colonel Steve Trevor pour devenir la nouvelle Ligue de Justice d'Amérique, pour le meilleur ou pour le pire. Et sitôt formée, cette équipe de choc devra se concentrer sur la traque et l'éradication d'une nouvelle menace, baptisée Société Secrète des Supers-Vilains, dont Green Arrow est parvenu in-extremis à s'échapper et à en délivrer les principales informations à ses supérieurs avant de sombrer dans le coma. Hawkman, Catwoman, le Limier Martien (Martian Manhunter, pour les nostalgiques), Stargirl, Katana, le nouveau Green Lantern de la Terre et un certain Vibe, tous devront apprendre à se serrer les coudes et à découvrir l'héroïsme en eux sur le terrain, à la dure, et à surmonter leurs différences et traumatismes s'ils espèrent survivre à cette confrontation qui s'annonce impitoyable, et de laquelle semble dépendre bien plus que le sort de quelques vilains ou héros, mais bien celui du monde tout entier et à court terme...

Un tome 4 ma foi fort plaisant et entraînant, qui nous fait entrer dans les coulisses de la formation d'une équipe de supers-héros, à plus forte raison lorsque le gouvernement en est à l'origine. Pour de bonnes comme de mauvaises raisons, le plus souvent ces dernières d'ailleurs. L'on observe un peu l'envers du décors, les conséquences bien humaines et politiques de l'existence d'êtres tels que Superman ou Wonder Woman et les inquiétudes que peuvent soulever leurs combats comme leurs alliances, et la nécessité selon les représentants du pouvoir de disposer de gens aptes à les contrer si nécessaire. On retrouve un peu de la philosophie de Batman là-dedans je trouve, à l'échelle de tout un pays ce coup-ci, c'est assez familier pour nous rappeler des récits emblématiques de l'univers classique tels que La Tour de Babel ou Crise d'Identité ne serait-ce que pour la Justice League. La manipulation des médias comme de l'opinion publique, une démarche très ''commerciale'' dans la vente de cette équipe aux citoyens ordinaires, le tout dirigé d'une main de fer par des experts en communication... nous nous rendons compte assez rapidement que cette nouvelle Ligue est en fait davantage un ''produit'' qu'une réelle conviction, aux yeux de ses créateurs, Trevor mis à part. Et justement, tout le génie sera de nous faire nous attacher à ces personnages et à leurs agissements malgré ce côté très artificiel, et de finir par leur permettre de dépasser leurs ordres et ce que l'on attend d'eux pour devenir, à leur manière, de véritables héros à l'exemple de leurs illustres modèles.
Geoff Johns maîtrise ses personnages et son histoire et sait précisément où il veut les entraîner, et que David Finch s'éclate au dessin même si par moments on ressent quelques petites difficultés à gérer autant de designs différents les uns par rapport aux autres. C'est fluide, clair et facile à lire et à suivre, du bon boulot pour ces premiers numéros de cette nouvelle série, qui sera une partie primordiale de ce qui va arriver par la suite dès le tome 5, une fois l'action recentrée sur la Ligue de Justice habituelle. Une très bonne lecture donc, que je vous conseille, et qui vous offre toute un nouveau point de vue sur la question du super-héroïsme et de la façon dont les simples mortels peuvent le percevoir.

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

dimanche 16 novembre 2014

Succubes tome 3 - Eanna (Thomas Mosdi & Gianluca Acciarino - Soleil - Janvier 2012)


Vous l'attendiez certainement aussi impatiemment que moi, c'est enfin le retour de la bande-dessinée Succubes de Thomas Mosdi au sein de mes articles ! Après avoir assisté à l'âge d'or et au déclin de l'ordre des Filles de Lilith, voici le temps de connaître ses origines et les circonstances de sa création, ainsi que de découvrir enfin le plan qui pousse ses adeptes à tenter d'influencer l'Histoire derrière chaque grand homme, quelles qu'en soient les conséquences...

Trois mille ans avant Jésus-Christ. La cité d'Ur, état royal idéal où il fait bon vivre, dirigée par un roi juste et bon, fou amoureux de sa reine, la belle Eanna au charme divin, qui lui rend son amour au centuple. Mais ce paradis en plein désert est menacé par les armées d'une cité rivale, Lagash, tenue d'une main de fer par le roi Mesilim, surnommé le Serpent en raison de sa sournoiserie et de son affection particulière pour ces reptiles. Alors que le siège d'Ur fait rage, une trahison insoupçonnée met en péril sa survie, et le roi Abban se sacrifie ainsi que sa garde personnelle pour donner le temps à sa reine de s'enfuir en mettant en sécurité le plus de monde possible. Malheureusement le traître rattrape Eanna et la fait prisonnière, la condamnant ainsi à servir d'esclave à Mesilim... ou de nouvelle reine, pour asseoir sa légitimité sur sa nouvelle possession. Refusant de se soumettre, Eanna blesse le tyran et est alors condamnée à mourir dans le désert, seule et sans aucune autre ressource qu'une maigre gourde d'eau. Mais, alors que la mort se rapproche, Eanna a une vision de Lilith, Première de Toutes les Femmes, égale d'Adam, née du même limon, qui lui intime de résister encore quelques instants car elle sera bientôt secourue, et trouvera une nouvelle raison de vivre. La vision disparue, Eanna est effectivement sauvée et recueillie par une tribu de nomades, et elle apprend à vivre anonymement parmi eux au sein de leur oasis, mettant au monde l'enfant qu'elle portait de son défunt époux et veillant sur lui, en sécurité. Mais lorsque des émissaires de son ancien royaume trouvent refuge dans l'oasis et la reconnaissent, son passé refait brutalement surface et elle sera confrontée à un choix des plus difficiles : rester parmi les nomades, à vivre paisiblement loin de tout, ou bien revenir à Ur et tenter de reprendre le pouvoir des mains de Mesilim, ainsi que venger la mort de son roi. Sa décision aura de très lourdes répercussions sur l'Histoire et le monde entier, plusieurs milliers d'années plus tard. Eanna, par amour et par vengeance, par volonté de justice et d'équité, va fonder au sein de son royaume un ordre dirigé par des femmes, pour permettre à toutes les filles de Lilith de part le monde d'un jour connaître la liberté et l'égalité face aux fils d'Adam. Celles que l'on nommera plus tard avec dédain les Succubes vont commencer à s'organiser et à influencer les grands hommes qui font l'Histoire, fondant un culte qui perdurera au moins jusqu'à l'ère moderne et qui n'aura eu de cesse, depuis sa création et même avant cela, de protéger et de sauver les femmes. Pour le meilleur et pour le pire à venir, les Filles de Lilith veilleront sur leurs sœurs.

Très bon tome une fois encore, une histoire lointaine qui précède de beaucoup les deux précédentes, et qui nous dévoile enfin les origines de cet ordre de femmes cachées derrière les grands de l'Histoire depuis de nombreux siècles. Il ne reste à présent qu'à assister à la naissance du conflit qui les opposera à l’Église toute-puissante, ainsi qu'à leur avenir après le règne de Napoléon Ier en France. D'ici-là, rien à redire sur le déroulement et l'organisation du récit, Thomas Mosdi semble très bien savoir vers où il se dirige et mène sa barque sans difficultés. Ce tome, plus que tous les autres de part les événements qu'il présente, est une véritable ode au féminisme et à l'amour non de la suprématie mais bien de l'égalité entre les sexes.
Concernant le dessin, je remarque avec un certain étonnement (mais pas désagréable) une ressemblance vraiment frappante entre les styles du tome 2 et du tome 3 (le 1 étant vraiment à part). C'est incroyable que des artistes différents puissent si bien correspondre les uns aux autres autour d'une même histoire et parvenir à en restituer le style si particulier, en en préservant tant le design que l'atmosphère et le soucis du détail, historique comme fictif. C'est vraiment très plaisant à observer, cette continuité graphique si chère à l'auteur, et il faudrait mettre cela plus en avant dans la promotion de cette série car ça relève d'une certaine prouesse tout de même !
A présent, j'attends la lecture du quatrième et dernier tome actuel pour savoir ce qu'il advient des Filles de Lilith quelques siècles plus tard, en espérant que la série ne se terminera pas de sitôt car il reste encore tellement à dire et à raconter ! Tant que cette qualité se maintient, je signe tout de suite.

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

mercredi 12 novembre 2014

Superman - A terre (Urban Comics - Mai 2013)


Dernier grand récit de la période Classique de Superman (1985-2011) avec laquelle nous avons quasiment tous grandit, signé par l'illustre mais peu présent J. M. Straczynski au scénario et Eddy Barrows au dessin, Superman – à terre paraît entre 2010 et 2011 pour clore l'immense historique de l'homme d'acier, au sortir de la plus grave Crise de l'univers DC mais également la plus grave crise personnelle pour le héros, après la découverte puis la perte à nouveau de son peuple d'origine à l'issue d'une guerre impitoyable avec son monde d'adoption. Nécessité était alors de relancer une toute dernière fois Superman sur les traces de ce qui a toujours fait son identité, les valeurs qu'il s'est autrefois juré de défendre et en lesquelles désormais il ne croit plus.

La Nouvelle Krypton n'est plus. Détruite à l'issue de la guerre contre le Général Zod, elle emporte avec elle l'ensemble des survivants de la planète Krypton, le propre peuple d'origine de Superman, qui se retrouve désormais réellement seul rescapé (si l'on excepte Supergirl). C'est un coup dur pour l'homme d'acier, qui perd petit à petit foi en tout ce en quoi il croyait jusqu'à présent. La réaction des Terriens à son égard ne se fait pas attendre, les doutes s'élèvent et beaucoup perdent également confiance en leur protecteur de toujours, se demandant si son allégeance va toujours à la Terre, son monde d'adoption et désormais le seul qui lui reste, ou bien s'il va s'en détacher comme il a tendance à le faire depuis quelques temps. Sommé de s'expliquer, Superman tente de rassurer l'opinion publique, mais il apparaît plus vulnérable que jamais moralement, brisé. Alors, lorsqu'une femme surgit de la conférence de presse et le gifle en plein visage, lui reprochant la mort de son époux qu'il aurait pu soigner s'il avait été présent sur Terre au lieu de se battre loin dans l'espace, c'est le point de non-retour. L'Ange de Metropolis va alors prendre une décision très importante et lourde de conséquences, après une période de profonde réflexion : il va tenter de renouer le contact avec la Terre, avec les gens ordinaires qu'il défend, et faire renaître la foi dans leur cœur ainsi que dans le sien. Pour cela, il va entamer un long périple et traverser l'ensemble des États-Unis... à pieds, uniquement. Suscitant tantôt le déchaînement des journalistes puis l'inquiétude de ses partenaires et amis de la Ligue de Justice, Superman ne reculera devant aucune objection et se forcera à poursuivre cette marche coûte que coûte, affrontant les problèmes du quotidien des gens ordinaires, de ce monde si éloigné du sien, sans super-pouvoirs, sans super-vilains ni menaces cosmiques, simplement des citoyens humains et des problèmes très humains. Une simplicité toute bête qui aidera Superman à prendre conscience de l'importance relative de son combat jusqu'à présent, et peut-être à apprendre à choisir ses véritables combats à l'avenir, pour devenir un meilleur protecteur de la Terre. Mais une série de revers et de surprises attendent encore le Kryptonien, qui sera mis à mal bien plus qu'il ne le croyait durant ce voyage, et dont la cassure morale risque fort de s'accentuer davantage. Au final, peut-être n'est-il plus fait pour être ce qu'il est. Au final... la Terre a-t-elle encore besoin et envie d'un Superman pour la défendre ?

C'est là la plus grosse et la plus grave de toutes les épreuves morales que Superman aura jamais eu à affronter, seul ou presque. S'il peut compter sur le soutien de Loïs ou de Batman, il n'en demeure pas moins isolé de tous, face à sa dépression et au contre-coup horrible que fut la seconde perte de son monde d'origine et le désaveux dont fait preuve à son égard son monde d'adoption. Une période extrêmement sombre donc, avec des propos et des réflexions assez dures que doivent encaisser autant le héros que le lecteur, et qui mettent à mal les fondements-mêmes d'un personnage tel que Superman et tout ce qu'il représente et défend. Une remise en question exceptionnelle et dramatique, mais pas sans issue ni sans espoir ! Car c'est là le véritable message, derrière toute cette noirceur du propos (qui m'a un peu fait penser au début de Civil War chez Marvel, par ailleurs, avec le dilemme moral auquel est confronté Tony Stark), derrière toute cette atmosphère lourde et déprimante et ces réflexions philosophiques plutôt désabusées : malgré tout cela, il faut continuer à garder espoir et à défendre coûte que coûte ses convictions, si l'on croit en elles. Au delà du titre de cette histoire, Superman est bel et bien à terre, autant physiquement que moralement, c'est la chute inédite d'une idole et d'un héros de lumière, qui va apprendre à côtoyer son côté sombre, ses doutes et ses peurs les plus profondes. Mais il s'en relèvera plus fort et plus resplendissant que jamais, prêt à croire en un nouvel avenir et à réaffirmer son attachement aux valeurs qui l'ont vu naître, Vérité, Justice. Une fin admirable pour le Superman de l'ère Classique, et qui fait d'ailleurs la jonction quasi-parfaite avec ce qu'il deviendra à ses débuts dans l'ère des New52 actuelle.

Straczynski signe donc ici un récit magistral où il permet au lecteur de faire connaissance, à la veille de sa fin, avec son plus grand héros jusque dans les plus sombres recoins de son esprit et de ses failles. Cette histoire me prouve quant à moi, par son audace et ses références multiples ainsi bien sûr que son traitement du personnage, que l'auteur connaît on ne peut mieux Superman et était le mieux placé à cette époque pour lui offrir une fin digne de ce nom, belle et spectaculaire, pleine de sens et d'une portée morale convaincante.

Sauf que...

Le mauvais point, selon moi, c'est que justement là encore Straczynski a renoué avec sa légendaire mauvaise habitude d'abandonner ses récits en court de route, obligeant l'éditeur à trouver quelqu'un d'autre en urgence pour les terminer. Superman – à terre n'échappe pas à cette règle, et en plein milieu c'est Chris Roberson qui reprend le bébé et l'accompagne jusqu'à la fin. Un changement d'auteur et de ton qui se traduit directement par un changement majeur dans l'histoire : les super-problèmes réapparaissent, alors que ça ne devait être qu'une longue marche à travers le monde ordinaire et ses difficultés. Roberson n'étant pas Straczynski, il ne peut maintenir l'intérêt et l'attention du lecteur sur un concept aussi peu mouvementé et donc il réintroduit d'un seul coup de grosses menaces héroïques dans l'entourage immédiat de Superman, dont le périple s'interrompt de plus en plus souvent jusqu'à n'être plus qu'un souvenir lointain vers la fin, totalement disparu derrière la nécessité de contrer ces menaces démesurées. Alors, comprenez-moi bien, je ne trouve pas que le message en soi soit gâché par cela, au contraire ça permet même de mieux illustrer Superman se relevant de sa chute et redevenant peu à peu un héros, mais quand bien même je ne peux pas m'empêcher de penser que je me suis senti un peu trahi en voyant ça, sur le coup. J'achète cette histoire justement pour son côté près de l'ordinaire et du quotidien, un retour aux sources magistral pour Superman, et je me retrouve avec toute une seconde moitié qui revient dans l'action super-héroïque loin du ''peuple''. Pour moi le pitch de base a été désavoué en court de route, suite au départ de l'auteur et à la reprise en urgence par un autre, ce qui a tendance à faire oublier tout le concept du début de cette histoire, pourtant la meilleure partie. C'est bien dommage, mais bon ça reste un récit de qualité malgré cela et ce n'est pas la faute de Roberson non plus, il a fait avec ce qu'il pouvait et ce que lui avait laissé Straczynski surtout, pas facile de passer derrière lui beaucoup d'autres peuvent le dire.

Pour conclure, ce récit m'a fait immédiatement repenser à un autre du même genre : Wonder Woman – L'Odyssée, paru globalement à la même époque et servant également au lecteur une telle déconstruction du personnage et de son univers proche, pour mieux s'en relever par la suite et porter un nouveau message d'espoir et de convictions. Tiens, étrange, cette histoire de Wonder Woman était aussi signée et initiée par J. M. Straczynski... et abandonnée en court de route pour être reprise en urgence par Phil Hester. Quelle drôle de coïncidence ! Surtout que dans Superman – à terre, il y a une référence très appuyée à ce qu'il advient de Wonder Woman dans le même temps. Je trouve le parallèle des plus intéressants, moi !

Bref, je termine et je conclue cet article déjà bien assez long, en vous répétant que cette histoire de Superman est magistralement menée de bout en bout malgré ses difficultés en interne, et qu'à mon sens je n'aurais pas pu imaginer plus belle fin pour le personnage Classique de Kal-El, elle lui va finalement comme un gant, peu importe les critiques (qui d'ailleurs sont bien représentées à travers les journalistes qui suivent Superman dans son périple, petite pique amusante je trouve). L'on assiste à la fin de Superman tel que nous le connaissons, et à son grand retour triomphal, plus fort et plus lumineux que jamais, prêt à la transition avec un nouvel univers DC plein de promesses et d'espoirs !

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

samedi 8 novembre 2014

Soleil Vert (Richard Fleischer - MGM - 1973)



Alors là, attention, on va parler d'un film dont je ne me suis toujours pas remis du visionnage, il y a trois semaines de cela, tandis que vous profitiez béatement de mes articles sur les vampires. Soleil Vert (Soylent Green), de Richard Fleischer, est l'adaptation cinématographique sortie en 1973 d'un roman de science-fiction/anticipation de Harry Harrison intitulé Make Room ! Make Room ! paru en 1966. Carrément dans les critères de Radiophogeek donc, et si je décide de vous parler de ce vieux film c'est avant tout parce qu'il m'a plu et qu'il porte énormément de réflexions qui sont encore, par anticipation, d'actualité de nos jours mine de rien, si ce n'est encore plus réalistes qu'à l'époque (un peu comme la faillite officielle de Detroit en 1987 dans RoboCop qui est devenue il y a quelques mois de cela une triste réalité).

En 2022, la population humaine a augmenté de façon drastiquement exponentielle, si bien que les ressources naturelles de la planète sont devenues des raretés s'arrachant à prix d'or et parfois de vie : la viande, les vrais fruits et légumes, le lait, les œufs... tout cela n'existe pour ainsi dire plus que dans les castes les plus aisées de la société, et encore en tant que produits de luxe. A New York, où l'on compte désormais près de 44 millions d'habitants dont 20 millions de chômeurs dans le dénuement le plus complet, le gouvernement n'a pas d'autre choix que d'organiser de grandes distributions publiques de nourriture aux foules affamées qui sont prêtes à déclencher une véritable émeute sanglante au moindre manque. La société Soylent commercialise et distribue des plaquettes de nourriture artificielle de substitution, baptisées Soleil Rouge et Soleil Jaune, sortes d'agglomérats de plancton et autres organismes primaires qui forment donc depuis des dizaines d'années la seule et unique nourriture connue des basses castes, au grand désespoir des rares anciens qui se souviennent encore vaguement du goût et de l'aspect de la vraie nourriture d'autrefois. Alors que sort un nouveau produit alimentaire baptisé Soleil Vert, l'un des dirigeants de la société Soylent est retrouvé assassiné chez lui dans sa résidence de luxe des quartiers riches de la ville, apparemment sans le moindre signe d'effraction ou de vol. Le policier Thorn va alors se charger de l'enquête, dans un premier temps par pur intérêt personnel afin de pouvoir prélever sur les lieux du crime tout ce dont il aurait envie et ainsi alimenter son petit réseau d'informateurs, mais bien vite il va commencer à s'intéresser de plus près à cette affaire qui dissimule une étrange conspiration du silence, où plusieurs grands noms se retrouvent mêlés et où l'avenir de l'humanité se joue peut-être. Est-ce un règlement de comptes ? Une vendetta ? Une menace ou un chantage sur Soylent et ses partenaires au sein du gouvernement ? Ou bien... une punition divine ? Thorn devra prendre toutes les précautions durant son enquête, car une fois cette vérité trop bien gardée enfin dévoilée, le monde pourrait bien basculer dans la folie la plus totale...

Je ne vous en dis volontairement pas davantage, je pense même en avoir déjà un peu trop révélé sans le savoir. Toujours est-il que la réflexion de ce film, et du roman qu'il adapte, est assez cynique et déshumanisée finalement, ce qui avait pour but de profondément choquer les penseurs de l'époque et de faire réfléchir aux conséquences possibles de l’appauvrissement de la planète et de ses ressources pour une humanité toujours plus nombreuse et exigeante. D'autres thèmes sont aussi traités, tels que l'esclavagisme moderne (au travers des femmes considérées comme du simple mobilier dans les appartements coûteux des riches et des profiteurs, destinées à convenir ou non à chaque nouveau locataire et à satisfaire ses moindres exigences), la crainte du peuple par ses élites dirigeantes, la vision de ce peuple comme une masse informe et terrible, grondante, qu'il faut considérer comme un animal sans libre-arbitre pour le priver de ce dernier et le manipuler. La mort assistée est aussi au nombre des thèmes abordés, de même que le suicide pur et simple, au début et à la fin du film et de différentes manières. Un bel hommage a d'ailleurs été rendu à ce film par Les Simpsons lorsque Grand-Père Simpson, humilié, décide de mourir et se rend alors dans un centre d'accompagnement spécialisé.
Soleil Vert, c'est un film qui fait réfléchir sur bien des choses, mais principalement sur les dangereuses dérives d'une société déshumanisée et au bord du gouffre, où tous les moyens sont bons pour subsister et se maintenir dans son rang. Et qui, par le fait, reste encore très vrai même de nos jours, malgré le petit côté arriéré des technologies que l'on imaginait à l'époque pour 2022. Ça pourrait limite être la petite touche d'humour involontaire et bienvenue du film si on le regarde aujourd'hui, pour permettre de détendre un peu l'atmosphère qui ne manquera pas de grandement s'alourdir devant cet ensemble de plans-chocs, d'idées-chocs et de propos-chocs. Et de toute façon ça ne fera aucun mal à votre culture, bien au contraire !

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne séance, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

mercredi 5 novembre 2014

Joyland (Stephen King - Albin Michel - Mai 2014)



Le Roi de l'Horreur n'en finit plus d'écrire sur ses vieux jours et le moins que l'on puisse dire c'est que son nouveau style lui va admirablement bien, ainsi qu'à son lectorat (moi) ! Voici son dernier-né en date, Joyland, paru chez Albin Michel en Mai dernier pour notre plus grand bonheur.

L'histoire se passe durant l'été 1973, dans un petit parc d'attractions aux allures de fête foraine. Nous suivrons le jeune Devin Jones, 21 ans, tandis qu'il obtient un petit boulot pour l'été et se faire un peu d'argent en vue de reprendre ses études à la rentrée prochaine, comme bon nombre d'étudiants dans son cas. Engagé comme travailleur saisonnier, comme ''bleu'', à Joyland, Devin va apprendre à se familiariser avec le milieu forain : sa vie, son atmosphère, son langage, ses codes, sa philosophie si particulière et si riche. Durant cet été de dur labeur, il connaîtra le chagrin, la perte du grand amour, le doute, la dépression, de nouvelles amitiés, l'ambition, la reconnaissance, le sentiment d'avoir trouvé une nouvelle famille, l'amour à nouveau peut-être... mais aussi la peur, bien entendu. Car Joyland a un secret, voyez-vous. Au sein de sa Maison Hantée, se trouve un fantôme qui n'est pas artificiel. Une jeune fille assassinée voici quelques années de cela, dont le corps fut laissé à l'abandon dans l'attraction et dont le meurtrier serait toujours en liberté, anonyme. Devin va entreprendre de lever le voile sur ce mystère et de faire partie des rares personnes à avoir vu ce fantôme de ses propres yeux. Pour lui, c'est bien plus qu'une simple histoire, une légende que se racontent les forains et les locaux pour effrayer les bleus et les touristes. Pour lui, c'est une seconde chance, l'occasion de faire enfin quelque chose de sa vie, de se prouver sa valeur. De rendre justice. Mais, en compagnie de ses camarades saisonniers, Devin va aussi se rendre compte petit à petit que le plus grand danger, à Joyland, n'est pas forcément de rencontrer les morts... et que la confiance est une chose rare.

Comme j'avais déjà pu l'observer dans ses dernières œuvres, Stephen King semble résolument se tourner vers une dimension plus humaine de ses récits, où la place du surnaturel est de plus en plus réduite, jusqu'à n'être plus ici qu'un simple prétexte à l'enquête du personnage principal et surtout à son évolution durant cet été fondamental de sa vie, celui où il passera à l'âge d'homme et où il connaîtra différentes expériences qui le forgeront et feront de lui un être plus sûr de lui et plus solide. Il y a tout de même toujours certains éléments typiquement ''Kingesques'', même à cette période très éclairée et contemplative de sa vie, comme par exemple cette prescience de certains personnages, souvent de très jeunes ou d'assez vieux. Énigmes du destin, messages de l'au-delà ; quelques éléments surnaturels qui ne sont ici que soutiens discrets d'une histoire très humaine, très réelle. Celle d'un jeune homme qui apprend à grandir avec les souffrances de son âge, à accepter le changement et les pertes, la découverte, l'évolution, et à trouver son utilité dans ce monde. A l'image du roman lui-même, l'histoire est somme toute assez courte et simple à suivre, et ce n'est en rien une déception. Cela correspond simplement aux nouvelles préoccupations de Stephen King, l'envie de sortir de ce carcan de l'horreur dans lequel il s'est enfermé depuis le début de sa carrière pour, à l'âge de retraite, parvenir enfin à traiter des sujets bien humains et concrets, à délivrer des messages sincères et d'une portée bienveillante, avec toujours ce zeste de critique un brin cynique (mais plus aussi désabusée) de la société et de ses travers. Un King sur ses vieux jours, désireux d'explorer de nouvelles pistes et, comme l'on pouvait le noter dès la lecture de Docteur Sleep, de simplement porter son regard et celui de ses lecteurs sur des sujets moins horribles, moins surnaturels et irréels qu'à son habitude, et nous offrir plutôt une sorte de réflexion sur nos propres expériences, passées et à venir. Certains cracheront un peu dans la soupe en faisant remarquer qu'il s'agit de plus en plus de romans assez courts et très faciles à lire (police plus grosse, pages avec davantage d'espace, etc.), mais je leur ferai remarquer quant à moi que le Vieil Homme a une carrière très bien remplie derrière lui, et qu'à son âge et à son niveau il peut se permettre de se lâcher un peu la bride et de faire partager ce qui lui plaît. Pour ma part j'apprécie tout autant de pouvoir lire ce genre de format que ceux de ses premiers gros romans, type Ça, où tout était assez petit et serré pour un volume très imposant. Le rapport d'adaptation depuis qu'Albin Michel édite Stephen King (2009-2010 il me semble mais je peux me tromper) est très satisfaisant. Et surtout, fidèle à l'esprit de chaque roman, Joyland en étant le dernier et meilleur exemple en date.

Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

lundi 3 novembre 2014

Emission n°26 : L'adaptation des comics à la télévision.

Cette nouvelle émission fait dans le "tendance" avec le sujet des adaptations comics sur petit et grand écran. Et celui-ci est tellement vaste que vous n'aurez pas une, mais deux émissions !

Dans cette première partie nous nous efforcerons de réaliser un recensement des principales séries télé tirées de l'univers des comics des années 1940 à nos jours, soit de Batman à Gotham en passant par Hulk et Agents of Shield, vous aurez l'occasion de voir que le petit écran est un dérivé ancien et récurrent de nos héros favoris sur papier !

L'équipe de Radiophogeek vous souhaite une agréable écoute :)

samedi 1 novembre 2014

Dracula Untold (Gary Shore - Universal / Michael De Luca Productions - Octobre 2014)


Lendemain d'Halloween. Quand y'en a plus, y'en a encore ! Voici l'occasion d'un petit bonus (DLC ?) à mon mois spécial sur les vampires, pour vous parler du film Dracula Untold de Gary Shore sorti le mois dernier tout juste, énième adaptation sur grand écran du célèbre personnage de la littérature victorienne qu'il n'est plus utile de présenter désormais. Quoique...

L'an 1462, sur les terres reculées de la Valachie, au sein des Carpathes de Roumanie. Le récit nous emmènera suivre le destin du Prince Vlad III Basarab, connu sous le nom de ''Dracula'', le Fils du Dragon, du Démon. Souverain juste et bon, éclairé, dévoué à son peuple et à sa famille, il sera confronté à un choix cruel lorsque le tout-puissant Empire Ottoman, avec le Sultan Mehmet II à sa tête, exige un tribut de 1000 jeunes Transylvaniens pour ses campagnes futures contre les nations rebelles de l'Europe de l'Est. Vlad sait que s'il refuse, Mehmet n'hésitera pas à rayer son pays de la carte et à s'approprier ses terres et son peuple quoi qu'il advienne. Mais s'il paie le tribut, il devra alors laisser son fils partir en tant qu'otage diplomatique, un enfer que Vlad a connu durant toute son enfance et redoute par-dessus tout. Désespéré, acculé, le Prince va alors commettre l'irréparable pour sauver son fils ainsi que ce peuple apeuré qui compte sur lui pour le protéger. Concluant un pacte avec une puissance obscure des plus redoutables, Vlad obtient le pouvoir de commander à la nuit, aux ténèbres, la force de cents hommes, la vitesse du vent, la capacité à répandre la peur chez ses ennemis... mais également une faim irrépressible de sang humain, comme prix de sa nouvelle condition. Le marché est très clair : si Vlad parvient à résister à son désir de se nourrir de sang durant trois jours, il retrouvera alors sa nature humaine et aura pu utiliser ces sombres pouvoirs pour faire le bien et délivrer son royaume de la menace Ottomane. Mais si jamais il cède à son nouvel appétit, si la moindre goutte de sang humain vient nourrir ses ténèbres... il deviendra alors un monstre, condamné pour l'éternité à arpenter la Terre en causant la mort et la désolation, émissaire du Mal détruisant tout sur son passage, et voué à perdre chacun de ses proches, errant à jamais sans but et sans attaches.

Le pari de ce film était de présenter un personnage dont le grand public ignore encore beaucoup de choses, le véritable homme derrière la légende et le mythe du vampire Dracula. Car oui, il y a vraiment eu un Prince Vlad III Basarab ''Dracula'' ou encore ''Tepes'' (l'Empaleur) pour certains. En un sens c'est même l'un des ''pères'' de notre Europe telle que nous la connaissons depuis des siècles.
Voilà donc quel était l'intérêt présenté au départ de ce film, nous parler de cet homme, ce personnage historique, nous raconter ses exploits et sans doute ce qui fît de lui une légende du vampirisme par la suite. Sauf que dans les faits, vous pouvez oublier tout le côté reconstitution historique/fictive, vous n'aurez quasiment que du film de vampire là-dedans en réalité. L'aspect historique du personnage de Vlad est traité assez rapidement, disons durant les 5 à 10 premières minutes grand maximum, avant que la dimension surnaturelle de l'histoire ne vienne s'imposer et que le film ne devienne qu'un nouveau film de monstres sur Dracula parmi une pléiade d'autres. J'avoue que personnellement ce constat m'a un peu déçu en salle, je m'attendais vraiment à un genre de biopic fictif, et ce malgré les bandes-annonces jouant sur le sensationnel du célèbre vampire. J'avais un petit espoir, en somme, que le film ne serait pas QUE là-dessus. Et pourtant si. Dommage.
Mais ce fut tout de même loin d'être une déception ! Le film est sympathique, esthétiquement plutôt agréable, les effets spéciaux sont tous assez soignés (quelques petites fautes ici ou là mais rien de grave ni que l'on ne puisse pardonner) et il faut souligner la qualité de la musique, signée Ramin Djawadi (que vous avez déjà pu écouter via Iron Man, Le Choc des Titans ou encore plus récemment Pacific Rim et bientôt Warcraft de Blizzard). Un habitué des films de monstres à gros budgets en somme !
Et justement, venons-en à parler du budget et des attentes que celui-ci pouvait susciter. Pas moins de 100 millions de dollars, pour un film sur lequel repose depuis peu le projet fou de créer un univers partagé avec différentes licences de monstres gothiques victoriens au cinéma. C'est beaucoup, pour ce genre. Ça fait même assez peu quand on y pense, avec tout le passif un peu lourdingue que se traînait le personnage depuis des dizaines d'années via la Hammer puis Universal. Et pourtant en un sens c'est une réussite, modérée disons-le tout de suite mais réussite tout de même, reconnaissons au moins que le budget se ressent dans le rendu final du film, dans ses effets spéciaux, sa qualité visuelle et son étalonnage, ses musiques, ses costumes et décors, etc. Peut-être aussi un peu dans ses acteurs, mais alors pas tous loin de là. Et quelques facilités dans le déroulement du scénario et les relations entre les personnages.
Cependant pour moi le plus gros défaut de Dracula Untold, ce n'est pas son manque de profondeur historique. Ça, je peux le pardonner quand je vais voir un film à vocation fantastique. Ce n'est pas non plus le jeu de certains de ses acteurs, car on est souvent confronté à ce genre de petite déception quand on pioche dans ce domaine. Non, c'est plutôt... son réalisateur, en fait. Non pas que Gary Shore soit un manche, au contraire il a même plutôt l'air d'avoir de très bonnes idées et techniques. Mais à plusieurs reprises, et vous aurez aussi sans doute cette impression en le voyant, j'ai été choqué par le montage assez brutal des scènes entre elles. Pour tout dire, sur un plan le personnage de Vlad se trouve légèrement en hauteur dans une salle, en train de parler, et sur le plan suivant il est inexplicablement dans les bras de sa femme en poursuivant le même discours dans la même salle, sans le moindre effet mouvement pour servir de transition entre ces deux plans. Et ce n'est qu'un seul exemple, le montage est vraiment ce qui pèche dans ce film et gâche un peu l'expérience.
Comment expliquer cela ? En sortant de la séance je cherchais une raison qui aurait pu justifier un tel raté : les studios trop pressants ? Des rajouts de dernière minute pour ce fameux projet d'univers partagé, comme on en a eu connaissance un peu avant la sortie du film ? Changement de monteur ? Post-production difficile ? Et puis la personne qui m'accompagnait a mis le doigt sur ce qui semble être la seule explication vraiment logique : ce n'est jamais que le tout premier vrai long-métrage de Gary Shore. Tout aussi génial qu'il soit, il a encore beaucoup à apprendre et il s'est vu confier d'un coup un budget assez énorme pour réaliser un film sur lequel pesaient de nombreuses attentes de la part des studios, largement de quoi faire des erreurs. Et au final, ce ne sont même pas des erreurs si graves que cela, elles ne dénaturent pas le récit ni l'expérience du film lui-même en salle, c'est un poil dérangeant mais sans plus, et largement pardonnable une fois que l'on réalise que oui, c'est une première fois. Il y a toujours des erreurs et des faux-pas, mais ça se corrigera pas la suite ! Ça reste une œuvre d'une certaine qualité et surtout avec beaucoup de bonne volonté, légèrement décevante sur la forme mais pas dans le fond, et ce malgré des inspirations parfois plus qu'évidentes (et du coup assez gênantes quand on s'en rend compte) : petit jeu, essayez de retrouver LA scène quasiment copiée-collée de The Amazing Spider-man 2 Le Destin d'un Héros dans Dracula Untold, je vous jure que vous n'allez penser à rien d'autre en la voyant, même la musique s'y met.
Allez, inutile de l'enfoncer davantage, je reconnais qu'il y a de gros défauts dans ce film et que ce n'est pas forcément ce à quoi je m'attendais en allant le voir, mais j'admets aussi que malgré tout ça j'ai passé un bon moment et qu'il a bien rempli son contrat en me divertissant et en m'offrant une histoire nouvelle sur un personnage que j'aime beaucoup et qui me passionne, même si je ne me considère pas vraiment comme faisant partie des gens à qui ce film est censé apprendre des choses sur Vlad. Si vous êtes allés le voir également, donnez votre avis ça m'intéresse ! Et si vous n'y êtes pas allés, eh bien donnez-lui sa chance en DVD lorsque vous le pourrez, il n'y a pas grand chose à en regretter. Et vivement les autres films de monstres pour juger de ce fameux univers partagé !

Sur ce je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne séance, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !