lundi 9 octobre 2023

Les Contes Interdits - La Petite Sirène (ADA Éditions - Février 2019)


Monstre. C'est le seul qualificatif qui vient à l'esprit d'un pauvre homme dont la femme vient de mourir en donnant naissance à un être difforme, une fille affligée du syndrome de la sirène, la sirénomélie. Le bébé vient tout juste de naître, affublée de membres postérieurs soudés l'un à l'autre en une parodie de queue de poisson, et déjà son géniteur n'a qu'une idée en tête, mettre fin à ses jours. Heureusement, une bonne âme permettra au bébé de survivre et d'être recueillie par un cirque forain qui s'engage à lui assurer une vie décente.


Malheureusement, la bonne fortune ne dure pas et l'enfant, prénommée Angela, devient rapidement une attraction comme une autre, un monstre de foire que des passants et visiteurs impudiques viennent reluquer dans son aquarium saumâtre, moyennant un prix confortable pour le gérant du cirque. Qui soit dit en passant, propose également à ses clients d'assouvir leurs vices et fantasmes à la vue de la sirène en lui passant dessus lorsque les lumières s'éteignent et que la foire redevient calme pour la nuit.


Angela n'est pas seule dans cette vie de misère. Accompagnée par son seul véritable ami, un tout jeune adulte aux mains semblables à des pinces de homard du nom de Henry, la sirène se prend parfois à rêver à une vie meilleure, loin des attractions, loin du cirque, avec la possibilité pourquoi pas de s'arracher à son fauteuil roulant et de marcher par elle-même ? Après un énième dérapage de la part du gérant du cirque, qui tourne au plus mal cette fois-ci, Angela n'a plus le choix. C'est décidé, elle quitte cette vie et va chercher par tous les moyens à concrétiser son rêve, avoir deux jambes et pouvoir s'en servir !


Rejointe dans son périple par Henry et d'autres rescapés de la foire, Angela ne s'attendait pas à ce que le monde extérieur soit si attaché à sa personne, si déterminé aussi à lui rappeler envers et contre tout qu'elle demeure un monstre, quoi qu'elle en pense et quoi qu'elle fasse. Mais il se murmure dans certains milieux qu'une opération est possible dans ce genre de cas, opération clandestine bien sûr mais le risque en vaut la chandelle apparemment. Suivant sa lubie, Angie embarque tout son petit monde à Montréal, où l'attend le légendaire Palais des Nains, lieu de magie où les miracles chirurgicaux sont possibles pour les êtres comme elle !


Cependant la réalité va s'avérer bien plus cruelle que nécessaire pour la pauvre sirène et sa triste compagnie. Tombés entre les mains de véritables fous furieux, ils nagent d'horreur en terreur dans ce sinistre Palais où le mal est roi et où tout peut arriver. Et comme si cela ne suffisait pas, Angela est poursuivie depuis son départ du cirque par un odieux trio qui fera tout pour mettre la main sur elle et la livrer à leur employeur, prêt à toutes les bassesses pour s'emparer d'une telle rareté !


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Bien plus dans l'esprit du conte original d'Andersen que du long-métrage d'animation des studios Disney, cette version de La Petite Sirène par Sylvain Johnson m'a laissé plutôt froid je dois bien l'avouer. La faute sans doute à pas de chance...


En fait, je trouve tout simplement que beaucoup d'éléments dans ce conte sont forcés, les traits sont trop grossis, et tout ce côté horreur de fête foraine a déjà été exploité en dix fois mieux par la série American Horror Story – Freakshow, donc je ne vois rien de vraiment surprenant ou inédit dans tout ce qui est raconté ici. Vous me pardonnerez au passage de ne pas supporter patiemment le passage au forceps des noms revisités de tous les auteurs gravitant autour du projet des Contes Interdits et présentés ici comme personnages à part entière de l'histoire. La démarche aurait été mieux dosée, je ne dis pas, mais là on sent qu'il y a volonté de caser tout le monde pour le plaisir du clin d’œil sans penser un seul instant à la lassitude que cela entraîne au bout d'un court moment.


J'avais bon espoir que ce conte d'horreur contemporain m'emmènerait vers des sentiers encore inexplorés, mais je me suis trompé. Toutes les péripéties sont assez prévisibles, et seul le final arrachera un haussement de sourcil appréciateur aux connaisseurs du genre. Le reste n'est pas non plus à jeter, attention, il y a des qualités malgré cet avis dans l'ensemble très mitigé que j'émets ici, mais ce n'est clairement pas suffisant. Et je ne vous ai même pas parlé des diverses incohérences qui se sont glissées ci et là au cours de l'écriture et qui auraient bien mérité une bonne relecture !


Vous l'aurez compris, rendez-vous manqué pour moi avec cette Petite Sirène version Québecoise, pourtant j'ai espéré jusqu'au bout que ce serait une réussite. Au fond, je suis un peu comme Angela elle-même, j'espère contre toute attente que ça va bien se passer... et je suis immanquablement déçu et dépité. Je ne suis tout simplement pas le bon public pour ce genre d'histoire déjà vue et revue. J'espère maintenant que les prochains contes de Sylvain Johnson seront plus réussis et qu'il y mettra davantage d'audace et de sa personne, au-delà des sympathiques mais néanmoins usants clins d’œils répétés à la profession.


Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !

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