Il fût un temps où même notre
Antiquité paraissait futuriste. Un temps d’avant l’Histoire, un temps oublié
des hommes d’aujourd’hui, une ère sauvage et mystique où tout était possible.
C’est l’Âge Hyborien, l’âge entre les âges, celui qui a vu naître les légendes
de notre espèce et où les anciens dieux parcouraient la Terre encore nouvelle
au gré de cultes étranges et puissants. Une époque où l’Atlantide elle-même
n’était pas encore tombée dans l’oubli, une époque au sein de laquelle la magie
se mêlait à la science et où des bras solides et forts pouvaient faire la
différence entre la vie et la survie.
C’est à cette époque que naquît
une jeune paysanne des hautes plaines d’Hyrkanie, qui alors qu’elle venait
d’avoir dix-sept ans survécu de justesse à un raid de pillards et de voleurs
sur son village. Ses parents et toutes les personnes qu’elle connaissait furent
massacrées, et elle-même fut retenue captive et violée par les soudards jusqu’à
ce qu’ils la considèrent comme morte et la laissent ainsi. Mais la jeune rousse
survécu donc, peut-être à cause du hasard tout simplement, ou bien des desseins
des dieux d’avant sa naissance. Elle se fit la promesse de ne jamais plus
tomber face à quiconque, et reçu d’une déesse éprise de justice des dons
incroyables pour le maniement des armes et le combat. Ainsi naquît Red Sonja,
Sonja la Rousse, la Diablesse à l’Épée, qui ne devait jamais plier face à un
homme à moins qu’il n’en triomphe en combat singulier.
Sonja se forgea sa propre légende
en parcourant les terres voisines, mais elle rencontra aussi bien la fortune
que la misère. Une vie d’expédients, comme mercenaire la plupart du temps, mais
toujours du côté des justes et des victimes pour les défendre face aux
oppresseurs. Cependant la roue tourne, et ayant fâché un souverain en refusant
sa demande d’union, la guerrière flamboyante fut contrainte de quitter les
terres qui l’avaient vu naître et de partir au loin explorer d’autres pays.
C’est ici que notre histoire commence.
Alors que Red Sonja voyage au fil
de ses envies et des coups du sort, elle affrontera plusieurs périls mortels et
devra faire face à de nombreuses créatures infernales ou nées de la main de
l’homme le plus fou. De puissants golems mécaniques habités par quelque démon,
de noirs sorciers aux pouvoirs fétides, des créatures de cauchemar ou bien
issues des rêves les plus profonds, et jusqu’à se confronter à certains chefs
et souverains locaux faisant ployer leur peuple sous le poids des croyances et
des illusions de grandeur. Red Sonja est de tous les combats, de toutes les
causes nobles, et sa seule présence suffit à changer la donne et à retourner
des situations désespérées en faveur de celles et ceux qui luttent pour le
mieux.
Bien sûr, elle n’est pas la seule
à se faire une solide réputation sur ce continent lointain. Contemporaine d’un
certain Conan, Cimmérien de son état, Sonja le rencontrera à de nombreuses
reprises et l’affrontera même au cours de duels homériques sur fond de quête
mystique ou de menues rapines, mais toujours sans malice et avec beaucoup de
fair-play et de respect. Aucun des deux ne cède face à l’autre, et la question
sera condamnée à rester en suspens.
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Au fil de ces neuf chapitres
dessinés par l’incroyable Frank Thorne, le lecteur accompagnera Red Sonja au
cœur de ses premières grandes aventures publiées chez Marvel à l’époque et sera
tout bonnement subjugué par la puissance du dessin, la justesse du trait de
l’artiste et cette apparente facilité avec laquelle il parvient à représenter
la guerrière de légende en pleine action ou plongée dans ses pensées, dans des
décors toujours plus somptueux ou sauvages, au cœur d’une époque oubliée et
très largement fantasmée.
Neuf chapitres, quelques
histoires prises sur le vif et qui frisent le génie, deux scénaristes
principaux que sont le jeune et talentueux Bruce Jones et l’expérimenté Roy
Thomas, mais surtout surtout dans cet album magnifique un dessinateur commun et
hors du commun, Frank Thorne, qui a donné à Red Sonja son apparence définitive
et qui l’a illustré durant quelques années qui ont tout changé, à une époque où
le public féminin était en recherche d’héroïnes fortes pour faire concurrence
aux super-héros masculins et où les récits d’aventures avaient encore le vent
en poupe. A l’heure des premiers résultats de l’émancipation des femmes et des
lectrices, les comics se mettent au pas et nous offrent un personnage iconique
qui aura même droit à ses propres conventions, c’est dire à quel point la
Diablesse à l’Épée aura marqué les esprits !
Un grand grand merci aux éditions
Neofelis qui ont adapté cet ouvrage incroyable en français avec une qualité
formidable ! Des pages en grand format et un papier de très bonne qualité,
rien ne bave rien ne jure, et même si nous avons ici du noir et blanc c’est
tout bonnement magnifique et on se laisse emporter durant quelques heures dans
cette lecture passionnante et puissante ! Un second et dernier tome est
d’ores et déjà annoncé par l’éditeur, je l’attends donc avec impatience !
Seul petit défaut, vraiment pas grand-chose : l’histoire avec Conan en
invité est coupée en deux chapitres et le second n’est pas présent dans
l’album… peut-être à cause de problèmes de droits entre les deux séries et les
différents éditeurs de ces personnages en V.O., toujours est-il que ne pas
avoir le final de cette confrontation grandiose est un peu frustrant. Mais on
oublie vite cette déception légère en replongeant dans les aventures épiques de
Red Sonja.
Ma partie préférée… j’hésite très
fortement entre le court récit avec la licorne, purement majestueux et à la métaphore
filée très forte également, ou bien celui qui marque la fin de l’album avec la
confrontation au sommet entre Red Sonja et la terrible reine Sortilej, durant
laquelle se joue le destin de tout un peuple sur fond de rivalité féminine et
de combats sociaux dramatiques. Vraiment du très bon au programme de ce premier
tome, et je vous invite totalement à vous procurer cet album et à attendre avec
moi la suite !
Red Sonja est une héroïne dont je
suis surtout les aventures en V.O. chez Dynamite (je vous en ai présenté la
plupart) mais aussi depuis quelques années en V.F. chez Graph Zeppelin, et je
vais continuer surtout si d’autres éditeurs comme Neofelis se jettent dans la
course avec un tel souci de la qualité ! A signaler aussi : les
deux introductions de Roy Thomas et Cecil McKinley qui sont parfaitement dithyrambiques
et très exhaustives, et aussi dans les bonus l’ensemble des couvertures en noir
et blanc de ces neuf chapitres, propres et nettes et qui permettent en un seul
coup d’œil de se faire une idée très précise du génie et de la dextérité de
Frank Thorne, et surtout de son amour pour le personnage. Amour, vraiment, vous
vous en rendrez compte très vite, et vous finirez par le partager tout
bonnement avec des décennies d’écart.
Sur ce, je vous laisse vous faire
votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture, en espérant vous
retrouver bientôt pour un nouvel article !
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