Il y a notre monde, cruel, sombre, froid, pratiquement sans espoir quand on sort d'un bar la nuit partiellement embourbé dans l'alcool et les médicaments antidépresseurs. Et puis il y a l'autre, celui dans lequel on peut se réfugier, celui des souvenirs, de l'enfance pour certains, bref un monde rempli de magie.
Dans cet autre monde, Oliver Harrison était un étudiant comme les autres dans une académie magique de renom qui formait ses jeunes élèves à devenir de vaillants soldats dans une guerre contre les forces des ténèbres, contre le Baron Vanish et ses suivants les Hollow. Quand Vanish posa le pied en Everkeep, il dévasta tout sur son passage, fit de bien trop nombreuses victimes, et menaça directement les élèves de l'académie s'ils refusaient de rejoindre son armée grandissante. Oliver était alors le dernier espoir, celui par qui tout devait fatalement se résoudre, et il tint ce rôle à merveille.
Mais pour cela, il du franchir deux limites interdites aux gens de son espèce : premièrement, ne jamais se rendre dans la salle scellée où se trouvent de nombreux artefacts magiques d'une grande puissance, sous peine de mort. Deuxièmement, ne jamais se rendre seul dans le monde des humains, sous peine de mort. Oliver a fait les deux, utilisant un objet extrêmement rare pour contempler l'avenir, et revenant du monde humain avec un précieux souvenir que même Vanish n'avait pas anticipé, une arme terriblement concrète et réelle dans les mains d'un enfant de quatorze ans qui mit fin à la guerre avant qu'il ne soit trop tard.
Pour cela, Oliver fut acclamé par ses camarades. Mais les Hollow étaient partis, profitant de la pagaille générée par le décès prématuré de leur chef. Disparus on ne sait où, peut-être pour toujours.
Des années plus tard, on retrouve Oliver au détour d'une sordide ruelle dans laquelle il se fait agresser, comme tout camé ivrogne peut l'être à une heure avancée de la nuit. Sauvé de justesse par un super-héros de passage, Oliver sent une brûlure familière sur son épaule, à l'endroit où le sigle de sa Maison de naissance a été gravé dans sa chair. Et il sait, aussitôt, que ce soi-disant super-héros n'est rien d'autre qu'un Hollow ayant pris une autre apparence et œuvrant incognito dans le monde des humains !
Dès lors, Oliver laisse libre cours à sa vengeance et massacre sans pitié son ennemi, sans même accorder d'attention à ses suppliques. Il l'épargne toutefois au dernier moment et en fait le porteur d'un message bien personnel adressé à tous les autres membres de sa super-équipe : désormais, ils sont démasqués et Oliver les traquera jusqu'au dernier, pour venger la destruction d'Everkeep et la mort de toute sa famille. Pour commencer.
La guerre est donc déclarée entre Oliver et les super-héros anciennement Hollow du Baron Vanish, une guerre totale qui ne pourra se solder qu'avec la destruction complète de l'un ou l'autre des belligérants. Mais on peut tout de même se poser une question essentielle à ce stade : est-ce qu'Oliver ne serait pas tout bonnement en train de péter les plombs et de foncer tête baissée dans un délire auto-destructeur dont il a le secret ? Après tout, ses médicaments à foison et sa tendance à se réfugier dans l'alcool facile ne sont pas là par hasard, comme s'il essayait de fuir quelque chose en lui, de noyer une partie de ce qu'il est, ou de ce qu'il a pu faire... Que cache-t-il au fond de lui ?
En tout cas les autres Hollow ne vont pas se laisser faire sans rien dire, et les combats risquent d'être intenses pour ne pas dire mortels. Avec autant d'ennemis à terrasser, Oliver sait qu'il peut très bien ne pas s'en sortir indemne, voir pas du tout. Mais tant que sa vengeance est consommée, il n'en a rien à faire. Même pas un égard pour sa femme, complice de toujours depuis les bancs de l'école, ni pour son meilleur ami qui tente de le détourner de cette voie sanglante et de cette spirale de violence. Malheureusement, ce sont eux qui devront payer les pots cassés...
Oliver dit agir pour empêcher le retour de Vanish, plus que tout au monde. Il aurait vu un avenir où le sombre sorcier serait ramené à la vie et ferait de nouveau trembler les différentes réalités, et il sait que ce sera l'un de ses fidèles Hollow qui le fera revenir. Cependant, la vision ne semble pas avoir été aussi claire qu'il en a le souvenir, il a pu laisser échapper quelques petits détails mine de rien assez cruciaux... et que penser de ce que lui disent chacune de ses victimes, sur le fait qu'ils étaient manipulés par leur leader, qu'ils ont le droit à la rédemption après toutes ces années à œuvrer pour le bien des humains dans leur monde, etc. etc. ? Oliver n'y croit pas. Mais le problème, c'est que lui non plus on ne le croit pas vraiment.
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Cette nouvelle série de magie horrifique signée par Donny Cates et Ryan Stegman, le duo d'artistes à qui l'on doit chez Marvel un sacré bon cycle sur Venom et le massif event King in Black, nous propose d'emblée de nous emmener du côté d'une sorte d'anti-héros de l'extrême, pour ne pas carrément dire de vilain aux pulsions homicides refoulées depuis trop longtemps.
Car qui tue des super-héros à foison en règle générale ? Les vilains qui les affrontent et qui apparaissent un peu partout sur leur chemin. Oliver Harrison semble être bien parti pour être considéré par la population comme l'un de ces nouveaux vilains en puissance puisqu'il n'a de cesse d'assassiner sauvagement les héros qu'il rencontre. Mais est-ce que toute cette histoire de monde magique parallèle et de grand seigneur du Mal à arrêter coûte que coûte est bien réelle ou bien est-ce que tout ceci n'a lieu que de la tête et l'esprit dérangé d'Oliver ?
Pour le moment après ces quatre premiers chapitres riches en action contenus dans ce premier tome, nous n'avons pas encore la réponse définitive mais l'on peut se poser la question assez légitimement, malgré la présence d'indices sérieux laissant à penser qu'Oliver est dans le vrai depuis le début. Nous ne sommes toutefois pas à l'abri dans les tomes et chapitres suivants d'un gros retournement de situation dont l'auteur a le secret et qui pourrait rebattre totalement les cartes distribuées ici.
Pour une fois je suis assez content parce que cette série semble vraiment taillée pour un nouveau lectorat avide de sensations fortes et en ayant sa claque des super-héros traditionnels des deux grandes maisons d'édition des comics. Image nous propose avec Vanish de dynamiter les codes du genre super-héroïque, avec ceux de la dark-fantasy au passage, et de mixer les restes pour voir ce qui apparaîtra. C'est vachement agréable mine de rien et ça faisait longtemps que je n'avais pas à ce point accroché à une lecture de V.O. indépendante, je tire donc mon chapeau à Donny Cates pour cela !
Concernant le dessin il est vraiment très bon, assez facile à suivre même au cœur de l'action la plus débridée et sanglante qui soit, les planches sont très souvent teintées d'obscur mais paradoxalement claires à comprendre malgré cela, tout est vraiment fait pour qu'un lecteur novice puisse se plonger sans le moindre problème dans ces premiers chapitres sans se taper des heures de révisions auparavant. C'est du très bon niveau à mon sens et j'aimerai vraiment en voire davantage des comme ça !
Petit bonus qui rend la chose encore plus appréciable à mes yeux : le lettrage n'a pas l'air d'être prévu pour des gnomes, pour une fois, et la lecture n'en est que plus aisée et confortable, donc merci beaucoup à toute l'équipe créative qui a semble-t-il pensé à tout ! Vanish a apparemment tout pour plaire, et son adaptation toute prochaine en Version Française chez Urban nous prouve que le public est demandeur d’œuvres dans ce genre pour renouveler les habitudes, comme Saga peut le faire pour le space-opera depuis le début de sa parution. Tiens, c'était chez Image aussi non ? Pas de hasard.
Pour ma part je continuerai à suivre la série en V.O. ne vous en déplaise, je trouve que le format est très bon comme ça déjà et le vocabulaire est vraiment facile à comprendre et à traduire mentalement au cours de la lecture, ça vient presque tout seul. Encore une preuve s'il en était besoin que quand on a des auteurs déterminés et qui se bougent pour livrer une belle création bien pensée jusqu'au bout, ça fait souvent des merveilles !
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