Nous sommes en 1973. Un petit groupe de voyageurs traverse l'Europe en direction de la Transylvanie, pour se rendre dans un château mythique oublié du reste du monde. Frank Drake, l'heureux nouveau propriétaire de la demeure médiévale, a subi plusieurs revers de fortune ces derniers temps, mais cette fois-ci il semble bien décidé à profiter de sa chance, du moins s'il accepte de suivre les conseils pas toujours très avisés de son meilleur ami qui l'accompagne dans ce périple.
Là, au cœur d'une nuit plus sombre que d'ordinaire, les trois étrangers vont découvrir au sein du château la dépouille enfermée dans un cercueil de nul autre que l'ancêtre de Frank, un certain comte Vlad Dracul. Personne ne croirait vraiment aux événements décrits dans le célèbre roman de Bram Stoker, n'est-ce pas ? Pourtant, c'est avec une conviction mêlée de crainte que l'on retire le pieu de bois qui perce le cœur du cadavre squelettique... qui reprend alors des couleurs, la chair revenant sur les os poussiéreux, une vie impie et maudite habitant de nouveau le corps décomposé.
Ils n'avaient aucun moyen de le savoir à l'époque, mais leurs vies allaient être changées du tout au tout par ce geste malheureux. Car les légendes sont vraies, voyez-vous, tout est vrai, et bien plus encore. Et ce soir, le terrible Comte Dracula renaît une fois encore pour hanter la nuit des simples mortels, sa seule existence incarnant un suprême affront à la face de Dieu et de l'ordre naturel ! Oui, Dracula vit à nouveau, de sa non-vie contre-nature, et avec lui reviennent également les hordes infernales qu'il a généré des siècles durant.
Après avoir échappé de justesse à la fureur de son ancêtre, Frank reprend la direction de l'Angleterre et y fait la rencontre de Rachel Van Helsing, petite-fille du célèbre chasseur de vampires qui a un siècle plus tôt réussi à stopper le comte dans sa terrible tentative d'invasion. Quincy Harker est là lui aussi, vieil homme dont les parents ont donné leur vie pour défendre un monde ignorant tout de la menace qui planait sur ses habitants. Ils seront rejoints par beaucoup d'autres dans leur lutte contre le Prince du Mal, comme le mutique Hindou Taj ou encore le chasseur impétueux connu sous le nom de Blade, armé de ses célèbres couteaux de lancer en bois qui font des ravages dans les rangs des morts-vivants.
Ensemble, ils combattront Dracula sur tout le territoire Européen, ne lui laissant aucun répit, affrontant ses légions et ses sbires les uns après les autres, l'acculant plusieurs fois sans jamais réussir à le détruire totalement. A chaque fois qu'un plan est contré, une autre machination se met en place, les ramifications tentaculaires de l'esprit malade du seigneur des vampires ne connaissant aucun repos. A présent, le vieux monde tremble chaque nuit quand la lune perce les voiles de ténèbres de la campagne britannique, Londres ne trouve plus le sommeil, et de très nombreux innocents devront périr dans la gueule infâme de la créature. S'attaquant aussi bien aux hommes qu'aux femmes, ses proies de prédilection, Dracula n'hésite pas un seul instant à attirer dans ses filets des âmes pures et ignorantes du danger, comme de simples enfants ou encore de douces victimes à la psyché brisée.
Le roi des vampires veut conquérir le monde, lui imposer la plaie du vampirisme et régner à jamais sur des hordes d'enfants de la nuit éternelle, mais ses projets vont à de nombreuses reprises devoir attendre car d'autres que les chasseurs se dressent sur sa route, des menaces surnaturelles qu'il lui faut éradiquer afin d'être parfaitement sûr d'être le seul maître de la Terre quand viendra l'heure dernière. Rivaux, rebelles, résistants, tous périront de la main du Comte Dracula. Et tandis que sa fureur et son ombre s'étendent toujours davantage, Vlad l'Empaleur se plaît à replonger dans ses expériences passées et ressasse ses échecs pluriels, jurant que ni Dieu ni le Diable ne l'arrêteront définitivement. Car il est et sera toujours Dracula, maître de la nuit, fléau des mortels, régnant par la peur et le sadisme, mais toujours seul.
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La série du Tombeau de Dracula naît au début des années '70 grâce à un assouplissement involontaire de la très crispée Comic-Code Authority, qui permet alors à nombre d'artistes frustrés jusque là de représenter la mort et certaines transgressions morales plus facilement dans leurs récits illustrés. Les séries d'horreur ont le vent en poupe à cette époque, et Marvel sait bien que pour asseoir son emprise sur le marché des lecteurs il lui faut séduire toutes les tranches du public, pas seulement avec des super-héros colorés. Très vite, des icônes de la culture littéraire classique et gothique refont leur apparition dans les pages des périodiques, dont bien évidemment Dracula en personne. Il faudra toutefois attendre le septième numéro de sa nouvelle revue pour que le succès vienne enfin à la rencontre des artistes, grâce notamment à l'association géniale de Marv Wolfman le bien-nommé et de Gene Colan la légende vivante, aidés par d'autres talents comme Tom Palmer et son encrage des plus experts.
Qu'ai-je pensé de ces quelques trente-et-un premiers numéros compilés dans ce premier omnibus ? Ma foi... je suis intéressé par le scénario, même s'il part trop souvent dans des directions éparses et assez rapidement brouillées, et le dessin est vraiment plaisant surtout pour l'époque, mais ça reste très -trop- classique à mon goût. L'inspiration principale vient des vieux films de la Hammer, où Dracula est vêtu comme un aristocrate du vieux monde, suranné et en faisant des caisses, et possède malgré lui de nombreuses faiblesses que ses adversaires peuvent exploiter, à commencer par son égo et sa fierté. Se cantonnant principalement à l'Europe, le prince des vampires ne rencontrera pour l'instant aucun super-héros du nouveau monde, même si son existence dans la même réalité Marvel est validée à quelques reprises.
Le microcosme gravitant autour de cette version de Dracula ne s'en éloigne jamais vraiment, et même si quelques tentatives sont faites pour explorer son passé antérieur, rien dans ce premier omnibus ne sort vraiment du lot, et j'en suis bien désolé. Peut-être que j'ai passé trop de temps à faire des recherches sur le personnage, sa légende, son existence, les inspirations, etc. Peut-être que j'attendais tout simplement trop d'une série centrée sur lui, malgré son air vieillot et sa portée assez minime il faut bien le reconnaître. La vérité c'est que je ne suis pas devenu un fan inconditionnel comme j'aurais aimé l'être, mais toutefois j'ai bien aimé cette lecture et je poursuivrai sans problème avec les suivantes.
Il sera fait référence quelques fois à une autre série, Dracula Lives !, qui ne sera malheureusement pas présente et qui elle en revanche me fait terriblement envie. Fort heureusement, elle paraîtra très bientôt dans le troisième et dernier omnibus au début du mois de Novembre 2022, et nous aurons enfin le plaisir de poser les yeux sur ces pages en noir et blanc d'un charme profond et qui exploreront à loisir tous les détails de la légende vivante.
Autrement, une seconde série appelée La Malédiction de Dracula intervient parfois entre deux chapitres du Tombeau, pour apporter aux lecteurs de nouvelles aventures et étoffer un peu plus les intrigues qui sans ça se répètent tout de même beaucoup. Combien de fois ai-je eu l'impression de voir la même case ou les mêmes postures au fil des pages d'un seul album ? Sans parler des dialogues ou monologues qui tournent très souvent en rond. C'était une autre époque, que voulez-vous, il faut s'y préparer quand on replonge comme ça des années en arrière pour redécouvrir des œuvres aujourd'hui dépassées.
Ne vous méprenez pas, j'aime quand même cette version du personnage de Dracula, mais je préfère toutefois la version plus fidèle de Coppola ou celles qui s'inspirent davantage du personnage historique derrière la légende et les mythes. Aujourd'hui c'est Jason Aaron qui, à ma connaissance, nous a offert la plus récente vision de Dracula chez Marvel, dans les premiers tomes de sa série Avengers débutée en 2018, et même là c'était assez anecdotique. N'y aurait-il du bon que dans le passé le plus lointain ?
En attendant de trouver la réponse à cette question, aussi éternelle que la soif de sang du Prince de la Nuit, je vous laisse apprécier par vous-mêmes ces quelques histoires tirées du meilleur des années 1970, et je vous souhaite de trouver le repos quand la nouvelle lune arrivera. Qui sait ce qu'elle entraînera dans ses lueurs...
Sur ce, je vous laisse vous faire votre propre avis et je vous souhaite une bonne lecture et un Joyeux Halloween, en espérant vous retrouver bientôt pour un nouvel article !
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